vendredi 2 août 2024

"Le Hussard sur le toit", Jean Giono, 2

 Jean Giono a inventé les symptômes du choléra et de nombreuses scènes dans le roman sont parfois assez dérangeantes : descriptions à outrance des manifestations physiques comme les vomissements. Des tableaux de mourants, des cadavres à l'abandon, des charniers, des corbeaux, la pestilence. Une danse macabre digne d'un tableau de Bosch.  Mais le choléra représente une allégorie comme dans "La Peste" d'Albert Camus. Les hommes et les femmes, atteints de la maladie mortelle, présentent des défauts majeurs comme l'égoïsme, la haine, la peur, la lâcheté, la cupidité. Angelo, homme pur et innocent, n'attrape jamais la maladie malgré ses contacts permanents avec les malades et les morts. Comme il méprise le choléra, il le tient à distance. L'écrivain déclarait au sujet du "Hussard" : "Le choléra est un révélateur, un réacteur chimique qui met à nu les tempéraments les plus vils ou les plus nobles". Chevauchées, coups de feu, sabre au poing, Angelo traverse les événements avec un courage, digne d'Ulysse. Ce roman d'aventures au milieu d'une humanité malade montre les valeurs de l'héroîsme. Dans ce monde des ténèbres, Angelo et Pauline symbolisent la lumière. Angelo rencontre quelques rares hommes bons comme ce jeune médecin qui finira par mourir du choléra. Pauline aussi ressemble à Angelo, son âme soeur. Leur amour interdit donne un ton romantique au roman. Un nouveau Giono se lit dans toutes les lignes : dynamisme des personnages, nervosité et classicisme du style, trame historique et influence stendhalienne (Fabrice del Dongo dans "La Chartreuse de Parme"). Jean Giono définissait son personnage ainsi : "Angelo, en offrant sa vie à chaque instant, avec l'innocence et la fougue d'un héros romantique, décourage la fatalité, et en ignorant la mort se fait ignorer d'elle. La mort n'a rien à prendre à ceux qui ont tout donné". Malgré la présence morbide du choléra qui déshumanise les malades, Jean Giono n'oublie pas la beauté de la nature avec l'évocation des forêts protectrices, de la montagne provençale. Ce Giono libertaire se rêvait en Angelo, ce jeune homme intrépide, courageux et généreux sortant du "lot commun". Un roman culte à découvrir ou à relire. 

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