vendredi 11 août 2023

"Zuckerman délivré", Philip Roth

 Dans la Pléiade "Philip Roth", j'ai poursuivi ma lecture du deuxième roman, "Zuckerman délivré" après avoir évoqué dans ce blog, "L'écrivain fantôme". Nathan, un double négatif de l'écrivain, avait raconté dans le premier volume sa visite avec un grand écrivain retiré à la campagne, E.I. Lonoff. Il a rencontré aussi la jeune Amy Bellette qui a déclenché chez lui des fantasmes érotiques. Il attire aussi la colère de son père qui désapprouve ses écrits sur sa propre famille, d'origine juive. Dans le "Zuckerman délivré", il s'est passé quinze ans de plus et il est devenu un écrivain reconnu et apprécié avec son roman, "Carnonsky", bestseller scandaleux comme le "Pornoy" de Philip Roth. Il s'est séparé de sa quatrième femme (!), Laura, et se retrouve célibataire. Il vit dans un beau quartier de New York.  Mais, sa notoriété le fragilise car il est harcelé par un homme quelque peu déséquilibré, Alvin, qui le pourchasse au téléphone pendant la nuit. Il entreprend une relation amoureuse avec une star du cinéma qui l'abandonne très vite pour rejoindre un amant qui s'appelle "Fidel Castro" ! Sur le plan familial, rien de va plus : son père est en train de mourir et il se sent culpabilisé par le traitement qu'il a réservé à sa famille en critiquant leurs manières de vivre. Il sera pourtant "délivré" de ce poids moral. Dans son roman qu'il a publié avec succès, il raconte ses prouesses sexuelles et il affirme qu'il ne faut pas le confondre avec ce personnage loufoque. Zuckerman ou la créature de papier de l'écrivain américain, lui permet d'exposer "la métamorphose de la subjectivité", une transformation perpétuelle d'un "Moi" aléatoire. Dans le premier volume, il est tout admiratif d'un mentor littéraire. Dans le second, il a changé avec l'influence du succès et ses funestes inconvénients : "Tout peut arriver, et c'est précisément ce qui arrive : tout". Ce roman d'une virtuosité flamboyante se lit avec plaisir car il ne faut pas oublier l'humour féroce de Philip Roth dans toutes ses œuvres (c'était un grand ami de Milan Kundera) et il cultivait cette distance ironique avec les personnages fictifs. Fiction et réalité, mensonge et vérité, l'écrivain américain brouille les pistes pour déstabiliser son lectorat. Philip Roth traite de plusieurs thèmes dans ce roman baroque : les affres de la célébrité et son lot de "cinglés" harceleurs, l'incompréhension de sa famille et de ses lecteurs et lectrices, les problèmes du couple, les relations hommes-femmes, la sexualité. Son roman, "Zuckerman délivré", ressemble à une autobiographie déguisée, travestie. Philip Roth propose une prouesse littéraire mâtinée d'un humour caustique et d'une vérité dérangeante sur la "comédie humaine".