mercredi 27 décembre 2023

"Le nœud de vipères", François Mauriac

J'aime énormément la littérature française du XXe siècle. Je pense souvent à nos grands ancêtres des Lettres qui ont consacré leurs heures à écrire, à imaginer, à créer des mondes romanesques. Cette année, j'ai redécouvert avec délectation notre grande Colette au style génial. Récemment, j'ai ouvert un roman de François Mauriac, "Le nœud de vipères", publié en 1932. J'avais envie de me plonger dans une ambiance d'Aquitaine, ma région d'origine. Ce roman singulier évoque la confession épistolaire de Louis, un ancien avocat de 68 ans. Ce patriarche se sent détesté par sa femme et par ses enfants qui rodent autour de lui pour s'approprier sa fortune. Il veut se venger des siens en les déshéritant. Ce texte testamentaire raconte l'imbroglio des relations familiales qui ne sont pas de tout repos. Le narrateur établit un bilan négatif de tout en entourage. Il détestait sa mère car elle l'aimait trop. Sa femme avait un premier amour dont il sera jaloux toute sa vie. Il est déçu par son fils, Hubert, et par sa fille, Geneviève. Il cherche une solution pour son héritage et il avoue qu'un fils "illégitime", Robert, vivant à Paris, pourrait recevoir sa fortune au détriment de sa famille. Mais, ce jeune homme craintif divulgue le secret de son père à Hubert. Qui est donc Louis, cet homme torturé, méfiant, avare et malheureux ? Souffre-t-il d'une dépression grave pour réagir de cette façon ? François Mauriac écrit en parlant de son personnage : "Non, ce n'était pas l'argent que cet avare chérissait, ce n'était pas la vengeance que ce furieux avait faim. L'objet véritable de son amour, vous le connaîtrez si vous avez la force et le courage d'entendre cet homme jusqu'au dernier aveu que la mort interrompt". Alors que Louis songeait à sa mort, il perd sa femme. Ce deuil brutal transforme Louis. Le narrateur avoue son malaise ainsi : "Je connais mon cœur, ce cœur, ce nœud de vipères : étouffé sous elles, saturé de venin, il continue de battre au-dessous du grouillement. Ce nœud de vipères qu'il est impossible de dénouer, qu'il faudrait trancher d'un coup de couteau".  Pourtant, Louis arrivera à trancher ce nœud, à la fin de sa vie. Ce roman n'a pas pris une ride et je l'ai lu avec beaucoup d'intérêt. Les thèmes abordés par François Mauriac dans ce texte appartiennent à sa matrice littéraire : l'argent au cœur d'une famille, les relations du couple, la filiation, la religion catholique si prégnante à cette époque. Et le style, quel style ! J'ai revu un extrait sur François Mauriac qui citait ses deux écrivains préférés : Balzac et Proust, une indéniable influence heureuse.