mercredi 27 janvier 2016

Atelier de lectures, 2

Je poursuis l'évocation des coups de cœur avec Mylène qui s'est montrée convaincante avec le roman de l'écrivain anglais, Ian McEwan, publié en décembre, "L'Intérêt de l'enfant". Une femme juge, Fiona, proche de la soixantaine, doit rendre un jugement sur une affaire délicate : un jeune adolescent de 17 ans refuse une transfusion sanguine pour des raisons religieuses. Lui et ses parents appartiennent aux Témoins de Jéhovah. La juge rend visite à cet adolescent et tente de comprendre ce refus, ce rejet. Que va-t-elle décider ? Dans ce dilemme, s'ajoute la crise conjugale qu'elle traverse avec difficulté. Je n'en dirai pas plus car, d'après Mylène, ce roman passionnant pourrait devenir un modèle de narration pour les amateurs d'écriture. Il faut donc lire ce grand écrivain en particulier son "Samedi" qui, bien avant les attentats terroristes, avait décrit les tensions sociales et la violence aveugle à Londres. Evelyne nous a lu quelques textes de Christian Bobin, extraits de l'ouvrage, "Noireclaire". Il rend hommage à sa femme disparue depuis vingt ans et cet amour a illuminé sa vie et continue à l'illuminer. Cette prose poétique peut envoûter le lecteur(trice) comme l'agacer. Mais, il vaut mieux le découvrir pour s'en faire une idée précise. Marie-Christine a beaucoup aimé "Nuit de feu" d'Eric-Emmanuel Schmitt où l'écrivain relate un voyage dans le désert saharien dont il sortira transformé par la foi. Régine a présenté un premier roman, "La Maladroite" d'Alexandre Seurat, déjà très remarqué dans le cadre du Festival de Chambéry. Le récit s'inspire d'un fait divers tragique concernant la mort d'une petite fille maltraitée. Chaque personnage revient sur cet événement et interprète les signes avant-coureurs de la maltraitance mais la "machine administrative" intervient trop tard. Selon Régine, ce récit bouleversant mérite vraiment une lecture attentive. Geneviève a terminé la partie "coups de cœur" avec le roman d'Isabelle Monin, "Les gens dans l'enveloppe". La narratrice achète une enveloppe, remplie de photos, et à partir de cet élément, elle construit son texte en deux parties : elle invente la biographie des personnages dans la première partie et mène une enquête dans la deuxième partie sur leur vie réelle. Un livre ludique et judicieux très agréable à lire... Dans un troisième billet, je ferai un compte-rendu sur la littérature israélienne, thème de l'atelier de janvier.

mardi 26 janvier 2016

Atelier de lectures, 1

Le premier atelier de lectures s'est déroulé ce mardi et nous étions pratiquement au complet sauf deux absentes. J'ai commencé ma séance en leur présentant deux livres des éditions Robert Morel, "Célébration de la lettre" et "La cuisine paléolithique" de Joseph Delteil. Je collectionne les titres de cet éditeur et je voulais montrer la beauté de ces livres objets, simples et astucieux dans leur conception. Ensuite, nous avons démarré par les coups de cœur : Janelou a rappelé les ouvrages indispensables de Paul Veyne, "Palmyre" et celui de Maylis de Kerangal, "A ce stade de la nuit". Dany nous a étonnées en nous parlant d'emblée de... bisons. En effet, elle a beaucoup aimé un récit de Dan O'Brien, "Les bisons de Broken Heart", un hommage à l'Ouest américain avec ses grands espaces et ses bisons. Un grand souffle de liberté et de nature à l'état sauvage. Son deuxième coup de cœur m'a fait vraiment plaisir car elle a présenté le récit de Nuala O'Faolain, "Chimères", un livre coup de poing, un témoignage sur la relation qu'entretient l'écrivaine avec son pays, l'Irlande archaïque et paradoxale. J'ai mentionné l'œuvre de Nuala O'Faolain dans un de mes derniers billets et je conseille fortement sa découverte. Véronique a brièvement présenté "Virevolte" de Nancy Huston, un de ses plus beaux romans. Janine a repris le même écrivain autrichien, Robert Seethaler dont elle avait apprécié le dernier titre, "Une vie entière". Elle nous a évoqué l'excellent "Le tabac Tresniek" publié en 2014. Ce roman raconte le parcours du jeune Franz qui quitte ses montagnes pour travailler dans un bureau de tabac-presse avec Otto, un personnage bienveillant et caustique. Ce jeune homme voit la montée du nazisme en 1937 et rencontre Freud à qui il demande des conseils pour conquérir une femme. Ce roman avait déjà été salué à sa sortie. Comme la partie "coups de cœur" a pris plus de temps que prévu, j'écrirai la suite demain.

lundi 25 janvier 2016

Pour Alain Finkielkraut

Je ne peux pas rester sans réagir devant l'irrespect total d'une participante à l'émission "Des paroles et des actes" de jeudi. Je voulais voir Alain Finkielkraut que je lis depuis longtemps. Cette femme professeur d'anglais, se définissant comme "musulmane", donne l'ordre au philosophe de se "taire"... Même si l'on ne partage pas l'opinion de cet intellectuel français, contesté par les uns et adulé par les autres, j'ai été vraiment outrée devant le discours intolérant et pontifiant de cette enseignante-militante qui a manqué de respect envers Alain Finkielkraut. Elle n'a peut-être pas lu l'œuvre du philosophe et n'a retenu de lui que des remarques lucides sur un pays qui change, qui ne se reconnaît plus dans son identité traditionnelle. On a quand même le droit d'éprouver ce sentiment d'autant plus qu'Alain Finkielkraut est un nostalgique de la culture classique et patrimoniale. On a le droit de ne pas aimer le rap, le rock, les jeux vidéos, la modernité dans ses manifestations les plus vulgaires comme une partie de la programmation télévisuelle. Que dit le philosophe ? Il rappelle les valeurs d'égalité entre les hommes et les femmes, la place de la culture dans la société, l'esprit critique, la liberté d'être athée ou pas. Notre société démocratique et laïque ne semble pas plaire à tout le monde, surtout aux individus liberticides.  Nous avons le droit de critiquer toutes les religions, nous avons le droit, comme le souligne souvent Alain Finkielkraut, de déplorer l'oubli du passé et des symboles de notre siècle des Lumières. Les notions d'effort, de travail, de récompense, de hiérarchie des valeurs ne sont ni de droite, ni de gauche. Réactionnaire, archaïque, dépassé, incompatible avec la modernité multiculturelle, raciste, islamophobe, tous ces qualificatifs le désignent à la vindicte populaire médiatique. Je me dois de défendre cet intellectuel français courageux, blessé dans sa passion de la littérature, ulcéré par les attaques de ses détracteurs souvent aveuglés par le déni de réalité. J'apprécie depuis longtemps l'œuvre du philosophe et je me réjouis qu'il intègre l'Académie française. Ces thèses ne sont ni racistes, ni fascistes. Il a le droit et le devoir de parler, d'écrire et de s'exprimer dans les médias. Et je soutiendrai l'expression de sa liberté et de ses idées, même si elles déplaisent à un grand nombre de nos concitoyens...       

vendredi 22 janvier 2016

Cueillette à Emmaüs

Ma passion des livres me conduit régulièrement à la librairie du centre Emmaüs de la Motte-Servolex. Et pendant une bonne heure, je m'adonne à un de mes loisirs préférés : la cueillette de bonnes occasions. Mes champignons en papier se cachent dans les étagères, sur les tables, dans des bacs, dans des vitrines. Les livres sont installés les uns sur les autres, en piles ou en rang serré. Couchés, debout, assis, sur le dos, sur la tranche, ces bons petits soldats des mots combattent depuis des siècles, la stupidité, l'ignorance, la bêtise et l'indifférence. Chaque visiteur(e) se retrouve dans un lieu où, débusquer quelques pépites,  relève d'une chasse aux trésors. La semaine dernière, j'ai donc déniché quelques ouvrages intéressants : deux petits dictionnaires Larousse sur les civilisations grecque et romaine, une étude sur la religion grecque, un roman récent de l'anglaise, Francine Prose, un ouvrage de philosophie de Pierre Hadot, et deux beaux livres. L'un de ces beaux livres, "La civilisation de l'écriture" des Editions Fayard-Dessain et Tolra, a été publié en 1976. Je l'avais acheté pour une bibliothèque municipale et je n'avais pas eu le réflexe d'en prendre un pour ma bibliothèque personnelle. Quand je l'ai vu à Emmaüs, j'ai su que ce livre n'attendait que moi... Roland Barthes a composé une préface à cet ouvrage et il écrit : "Le corps reste lié à l'écriture par la vision qu'il en a : il y a une esthétique typographique. Tout livre est donc utile, qui nous apprend à distancer la simple lecture et nous donne l'idée de voir dans la lettre, à l'égal des anciens calligraphes, la projection énigmatique de notre propre corps". Ce livre magnifique complète à merveille toute ma collection sur la civilisation de l'écrit. L'iconographie remarquable, le texte, la mise en page composent un hommage à cette invention géniale qui date de trois mille ans. J'ai aussi eu le bonheur de débusquer tout au fond d'une rangée de livres anciens, un beau dictionnaire Larousse de 1935 sur la mythologie générale. Mon heure de chercheuse d'or, de chasseuse de merveilles en papier, a été fructueuse. Pour la somme modique de quarante euros, j'ai eu la chance, cet après-midi de janvier, d'adopter ces ouvrages pour les mettre bien au chaud dans mon intérieur douillet...

mercredi 20 janvier 2016

"Un voyage à Berlin"

Chaque fois que je visite une capitale européenne, je cherche des informations dans les guides touristiques (souvent le Routard, le guide Bleu Hachette, les Cartovilles de Gallimard). Toutes ces informations sont précieuses pour préparer un séjour hebdomadaire. Mais, j'apprécie aussi les retrouvailles avec mes étapes européennes en lisant des romans. La littérature me semble supérieure  aux guides, encore faut-il débusquer les portraits de mes  centres urbains déjà vus et tous ceux que je vais découvrir dans les années à venir. J'ai donc retrouvé avec plaisir, Berlin dans l'ouvrage d'Hugo Hamilton, un écrivain irlandais. Son "Voyage à Berlin", édité chez Phébus en 2015, raconte le périple du narrateur, Liam, et de son amie, Una, dans la capitale allemande. Le personnage féminin, inspiré par l'écrivaine irlandaise, Nuala O'Faolain, se meurt d'un cancer. Ce sera son dernier voyage. Le livre fourmille de détails concernant leur séjour et j'ai suivi leurs traces dans les lieux que j'avais visités à Berlin : les places, le mémorial de l'Holocauste, l'île aux musées, etc. Leur déambulation s'accompagne de grands échanges sur leur vie respective. Una se souvient de son jeune frère disparu après une existence plus que difficile. Le narrateur relate ses relations complexes avec sa fille. Chacun établit un bilan et malgré la maladie menaçante d'Una, l'auteur ne sombre pas dans une tristesse liée à la perte de son amie. Il veut rendre hommage à son amour de la vie, à sa curiosité légendaire et à sa colère permanente contre les injustices, surtout celles vécues par son frère, rejeté par ses parents. Cette femme-écrivain passionnée et courageuse arrivera même à assister à un opéra de Verdi avant qu'il ne soit trop tard. L'amitié tendre qu'ils éprouvent l'un pour l'autre parcourt le texte en filigrane, ce qui donne au roman, proche d'un récit autobiographique, une touche nostalgique. J'ai beaucoup aimé Berlin. J'avais apprécié en son temps l'œuvre de Nuala O'Faolain. Je ne pouvais que lire avec plaisir ce roman-voyage, ce récit d'amitié sur cette grande écrivaine irlandaise, avec, en prime, une ballade à Berlin, le cœur de l'Europe...

lundi 18 janvier 2016

"Les vies multiples d'Amory Clay"

William Boyd s'est inspiré des vies de Margaret Bourke-White et de Lee Miller, deux reporters photographes, reconnues au XXe siècle. Le personnage romanesque, Amory Clay, naît en 1908 et s'éteint 70 ans plus tard. Dès son enfance, Amory est fascinée par la photographie. Son oncle l'initie à cet art nomade et l'introduit dans le milieu professionnel, un milieu hostile et opaque pour les femmes à cette époque. Motivée par sa passion et par les nécessités matérielles, elle démarre sa carrière dans les portraits de famille et les fêtes champêtres. Elle croit tellement en son art qu'elle s'embarque à Berlin pour photographier le monde interlope de la nuit. Sa patience "féminine", son obstination "virile" et son flair "anticipateur" confirment sa vocation de reporter original et téméraire. Revenue à Londres, elle se fait agresser par des nazis dans les années 30. Parallèlement à son travail, ses relations amoureuses fluctuent tout au long du roman entre amants et un mari avec qui elle a deux filles. Elle écrit dans un journal intime qui ponctue le récit : "Je crois avoir été consciente, même à l'époque, que, seule, la photographie peut réussir ce tour de magie avec tant d'assurance et de facilité : arrêter le temps, capturer cette milliseconde de notre existence et nous permettre de vivre éternellement". L'écrivain lui accorde une vie passionnante dans son métier et une vie décevante dans ses relations amoureuses et familiales. Elle part aux Etats-Unis, au Vietnam, sur les fronts de guerre. Etre une photographe reporter relevait d'un certain miracle à son époque et Amory Clay représente toutes les aventurières, toutes les pionnières, toutes les artistes qui ont conquis leur liberté et leur indépendance avec une détermination farouche et une audace sans faille. Un bon roman, une saga qui se lit avec plaisir, même si l'écriture rejoint le style journalistique, peut-être un effet voulu par l'auteur...

jeudi 14 janvier 2016

Atelier d'écriture

Mardi, nous nous sommes retrouvées une bonne dizaine "d'apprenties-écrivaines" dans l'atelier d'écriture, animé par Marie-Christine. Elle nous a lu un texte de France Léa, extrait de l'ouvrage, "Dits de scène". Le thème de la séance portait sur les penderies, placards, étagères : faut-il garder ou jeter ? Il fallait choisir cinq mots dans une liste proposée par l'animatrice. J'ai donc choisi l'album photos, la paire de lunettes, le pantalon de ski et les livres, évidemment. Voici trois petits textes sur les cinq que j'ai composés :
"Mes paires de lunettes,
Je ne sais pas pourquoi je conserve mes vieilles paires de lunettes. Pourtant, elles dorment dans un tiroir, ne me servent plus, car ma myopie évolue au fil des ans. Mais, ces montures m'accompagnent et me rappellent mes lubies du moment : montures rouges dans ma jeunesse, affirmation de ma personnalité, montures bleues dans ma quarantaine, plus sévères, plus sérieuses, un ancrage dans le monde du travail, montures dorées, une erreur de goût, vieillissement prématuré, montures transparentes aujourd'hui, légères, confortables, aériennes, un allégement dans le temps libre de la retraite. Vous me direz que ma myopie aurait disparu avec une opération, mais, je suis une "archéo-opticale" car j'aime porter des lunettes, greffées sur mon visage comme une protection, une sécurité extérieure. Je garderai donc mes vieilles paires de lunettes, jalons de ma vie, petits phares lumineux, vigies mémorielles."

"Les livres,
Hors de question que mes livres disparaissent. Dans mes déménagements successifs, beaucoup ont pris le large. Mais ils ont de nouveau conquis mon espace vital. Pourtant, il arrive un moment où l'espace se réduit et les étagères font grève. Que faire ? Lutter contre cette boulimie de papier ? Acheter d'autres bibliothèques ? Acquérir une maison plus grande ? J'ai trouvé une méthode de déplacement en pratiquant l'opération, baptisée le "bookcrossing", signifiant le livre nomade, et j'en distribue dans mon entourage. Mais quand je pense à toutes les années à venir, je remballe mes idées de vide, de tri, d'exil, de perte : mes chers livres m'accompagnent depuis de nombreuses années et ils peuvent encore veiller sur moi, me réchauffer et me bercer jusqu'à mon dernier souffle. Et après, ils verront bien, ils changeront de propriétaire, ils voyageront de maison en maison, et ils se feront un nid douillet dans une belle demeure, j'en suis persuadée."

"Albums photos,
Trop de photos dorment dans les boîtes, trop de photos encombrent les placards. J'ai décidé d'en déchirer une sur deux dans une période estivale. Disparues, les photos ratées, les photos redondantes, les photos d'amis oubliés. En mettant de l'ordre dans ces images du passé, j'ai reconstitué une trentaine de petits albums, un résumé de ma vie, un allégement de ma mémoire comme une lessive mentale. Cette purge bénéfique s'est transformée en une renaissance juvénile à l'orée de ma retraite. Je conseille cet exercice cathartique : jetez une photo sur deux et vous en sortirez vivant !"  

mercredi 13 janvier 2016

"Les Roses de la solitude"

La grande helléniste, Jacqueline de Romilly, a écrit des ouvrages savants sur la Grèce antique, étant une spécialiste de Thucydide, de la tragédie, de la démocratie grecque et de bien d'autres sujets. Sa passion pour cette culture essentielle aux yeux des Européens a beaucoup influencé des générations d'étudiants et d'amoureux de l'Antiquité. J'ai commencé à lire ces essais et j'avais délaissé les romans et les nouvelles qu'elle a écrits sur le tard. J'ai trouvé sur une étagère de la médiathèque, "Les roses de la solitude", ouvrage édité en 2006. J'ai retrouvé le charme suranné d'une dame très âgée, devenue malheureusement aveugle. Elle a affronté avec une abnégation stoïque et un courage extraordinaire, cet handicap terrible pour une intellectuelle qui lit toute la journée. Ce livre ressemble à une broderie constituée de souvenirs personnels et de rêveries. Elle évoque des objets de son appartement et leur redonne vie avec malice et ironie. Elle écrit : "J'ai souhaité réunir ici des expériences de tous les jours, de celles qui peu à peu forment une vie, sans fracas et sans drame. J'ai voulu aussi montrer des aspects de notre existence qui se révèlent à nous avec le grand âge, et qui apportent un message non pas de terreur, de contradiction et de désolation, mais de calme et d'espérance." Quand elle conte les "taches sur les meubles anciens", "les chevaux de l'Olympe", "le jour de Bérénice", les "tapisseries au petit point" et les "nouveaux rideaux", elle nous offre en pointillé, des éléments de sa vie privée qu'elle avait rarement dévoilés. Sa gentillesse, sa délicatesse et sa pudeur percent dans une écriture intimiste, éloignée de la prose professorale. Cet ouvrage montre une femme "ordinaire" dans le beau sens du terme, avec ses souvenirs familiaux, sa grande tendresse pour une mère exceptionnelle et aimante, ses amitiés et ses admirations. Jacqueline de Romilly avait dépassé un âge certain quand elle a écrit ce petit bijou littéraire et je remarque que la vieillesse, malgré tout, n'est pas toujours un naufrage.  

mardi 12 janvier 2016

"Boulevard des philosophes"

Suivre des cours de philosophie représente un exercice intellectuel passionnant. Je me souviens de ma terminale de philo et pendant des années, j'ai considéré que cette matière était réservée aux spécialistes mais, ma curiosité m'entraînait sur les sentiers caillouteux des textes de Gaston Bachelard, Jankélévitch, Camus, Beauvoir, Grimaldi, Finkielkraut,  Onfray, et bien d'autres. Mais, pour commencer à comprendre certains grands philosophes, dont certains ne sont pas très accessibles pour des raisons de "jargon" sémantique, rien ne vaut la pratique des passeurs pédagogiques  :  les  professeurs et les critiques. Ils nous préparent le terrain en aplanissant les difficultés de lecture. Pour cette raison, je recommande deux tomes de Bertrand Vergely, "Boulevard des philosophes", édités chez Milan en 2005 dans la collection "Pause Philo". L'auteur a déjà écrit des documentaires de vulgarisation comme "Petite philosophie grave et légère", "Petite philosophie pour les jours tristes", et il est l'auteur de biographies sur Nietzsche,  Kant, Heidegger, etc. Son tome premier évoque les philosophes de l'Antiquité à la Renaissance" et son second, "de la Renaissance à aujourd'hui". Même si on se sent loin de ce monde sérieux des idées, de la pensée et des concepts, ces deux livres se lisent vraiment facilement tout en évitant la simplification scolaire. Chapitre après chapitre, les philosophes antiques deviennent clairs comme l'eau de roche, ceux du Moyen Age, pourtant complexes, se laissent déchiffrer sans difficulté. Et Bertrand Vergely nous invite à flâner dans les chemins de la philosophie des origines à nos jours. Après avoir lu ces deux tomes, le lecteur(trice) peut franchir la deuxième étape : plonger dans quelques textes de Platon, d'Aristote, Saint Augustin, etc. Et essayer de comprendre, ce qui n'est pas une "mince affaire"...

lundi 11 janvier 2016

Philosophie, la rentrée

Le cours de philosophie a repris mercredi et j'ai retrouvé avec un grand plaisir notre professeur et la soixantaine de participants, motivés et à l'écoute. Il a été question du "cerveau humain", que nous a présenté Marcel, un grand spécialiste des neuro- sciences. Je comprends mieux notre comportement à partir de cet organe central, vital, ce noyau dur du corps, ce logiciel de chair qui nous anime tous les jours et qui peut aussi nous désarçonner quand il tombe malade. Avant la présentation du PowerPoint de Marcel, Daniel nous a lu un beau poème de Neruda que je retranscris dans ce blog. Le mot "heureux" est usé jusqu'à la corde et comporte des milliers de nuances, mais le poète rejoint la phrase d'Albert Camus, "Il n'y a pas de honte à être heureux". La notion de bonheur avec cet adjectif galvaudé, "heureux", pourrait correspondre à un état de "non-malheur aigu", quand la quiétude et la sérénité remplacent la jubilation, la joie et un optimisme dégoulinant de naïveté et d'arrogance. La philosophie est un art de la pensée et quand on s'adonne à la réflexion en compagnie des philosophes, cela fait partie de la notion heureuse de l'existence...

Pablo Neruda - Il meurt lentement

Il meurt lentement
celui qui ne voyage pas,
celui qui ne lit pas,
celui qui n'écoute pas de musique,
celui qui ne sait pas trouver
grâce à ses yeux.
Il meurt lentement
celui qui détruit son amour-propre,
celui qui ne se laisse jamais aider.
Il meurt lentement
celui qui devient esclave de l'habitude
refaisant tous les jours les mêmes chemins,
celui qui ne change jamais de repère,
Ne se risque jamais à changer la couleur
de ses vêtements
Ou qui ne parle jamais à un inconnu
Il meurt lentement
celui qui évite la passion
et son tourbillon d'émotions
celles qui redonnent la lumière dans les yeux
et réparent les coeurs blessés
Il meurt lentement
celui qui ne change pas de cap
lorsqu'il est malheureux
au travail ou en amour,
celui qui ne prend pas de risques
pour réaliser ses rêves,
celui qui, pas une seule fois dans sa vie,
n'a fui les conseils sensés.
Vis maintenant!
Risque-toi aujourd'hui!
Agis tout de suite!
Ne te laisse pas mourir lentement!
Ne te prive pas d'être heureux!

dimanche 10 janvier 2016

Ne jamais oublier Charlie

Il est rare que j'intègre dans mon blog l'actualité du moment, mais ce matin, j'ai regardé la commémoration des événements du 7 au 13 janvier où la bande de Charlie, des policiers, des Français juifs ont été assassinés par des criminels, des fanatiques islamistes. Il ne faut jamais oublier ces victimes innocentes qui aimaient la vie, la liberté, la culture, la France, aussi. Depuis ce mois terriblement atroce de janvier qui nous a tous secoués et ébranlés, le mois de novembre a vu surgir une deuxième bande de barbares qui a multiplié par dix, le nombre de victimes. Quand on entend qu'il faut vivre comme avant, je pense que personne ne peut vivre comme avant à moins de sombrer dans l'inconscience, le cynisme, la bêtise, l'indifférence. La peur et l'inquiétude s'insinuent dans notre existence et sans vouloir dramatiser l'influence délétère de ces attentats sidérants, nous devons nous adapter à ce nouveau schéma sociétal où des militaires protègent des lieux de culte et des policiers travaillent d'arrache-pied pour éviter d'autres attentats. Drôle d'ambiance dans nos villes après ce tournant tragique dans notre société française. Après avoir lu beaucoup d'articles dans la presse concernant ces événements traumatisants, j'essaie de comprendre l'incompréhensible violence de ces jeunes, nés et élevés dans notre pays ou en Europe. Je pense à toutes les victimes du terrorisme et à leur famille. J'ai vu ce matin, le symbole fort de la Place de la République, j'ai remarqué la sobriété de la cérémonie, j'ai écouté le texte de Victor Hugo, si beau, si juste, sur Paris, devenu en 2015, le centre du monde, de la laïcité, de la culture, de la démocratie et de la liberté d'expression. Tout le contraire de ces messagers des ténèbres, de la non-vie, du totalitarisme islamique, de la folie meurtrière et de la mort de la pensée. Certains optimistes espèrent le rebond de l'idéal républicain, la sauvegarde de nos valeurs démocratiques, le renouveau du  "bien" vivre ensemble, expression qui commence à me lasser... Le temps de la réflexion est venu pour affronter cette nouvelle donne que représentent les menaces terroristes. Ce dimanche de janvier ressemble à un chagrin national partagé et aussi, peut-être, à une espérance pour un avenir un peu moins violent dans quelques années.  

jeudi 7 janvier 2016

Ma liste de mes 10 meilleures séries

J'avoue que je suis une "fan" de séries depuis longtemps. Cette année, j'en ai suivi un certain nombre et j'ai établi ma liste des 10 meilleures. Comme j'aime le cinéma, je regrette souvent qu'un film ne dure que deux à trois heures. Quand on s'installe devant une série souvent composée de dix épisodes, quelquefois davantage, les heures défilent sans longueur, les personnages deviennent familiers, l'intrigue s'affine au fil du temps et le dépaysement agit sur l'imaginaire du "sériephile". Beaucoup de séries ne présentent pas un grand intérêt culturel, surtout les grandes productions américaines, mais certaines possèdent des véritables qualités liées à la mise en scène, aux sujets originaux, aux dialogues, etc. Voici ma liste des séries préférées en 2015 :
- "Mad Men", saison 7, pour le charme des années 60, le monde de la publicité, la société américaine de consommation, le personnage central perdu dans ses amours et gagnant dans son métier,
- "Les Américains", saison 2, le thème des espions russes déguisés en américains modèles,
- "Hatufilm", saison 2, des soldats israéliens, otages des Palestiniens depuis de nombreuses années, reviennent au pays, leur adaptation difficile et douloureuse,
- "The Fall", saison 2, un thriller anglais où une commissaire de police traque un serial killer surprenant,
- "House of cards", saison 3, la Maison Blanche, la corruption politique, l'ambition dans sa folie,
- "Homeland", saison 4, pour l'héroïne bipolaire et ses missions hautement dangereuses,
- "Hell on wheels", saison 4, la saga de la conquête de l'Ouest par son chemin de fer,
- "Occupied", saison 1, et si la Russie envahissait la Norvège sous les yeux consentants de l'Europe,
- "Les Vikings", saison 2, des paysages magnifiques, des personnages hauts en couleurs au 8e siècle,
- "Downton Abbey", saison 6, une série délicieusement English, reposante et romantique sur la fin d'un monde de privilèges.
Je sais que les séries n'attirent pas les puristes du cinéma, mais, le snobisme cinéphile les prive d'un grand plaisir !

mercredi 6 janvier 2016

Ma liste de mes 10 meilleurs films

Cette année, je n'ai pas vu un grand nombre de films, à peine une vingtaine le plus souvent à l'Astrée ou au Forum. J'aime ces petites salles intimistes et confortables, sans décor spectaculaire, sans boutique de bonbons, dans une grande sobriété d'accueil et dans un décor "vintage". Le goût du cinéma passe par tous ces signes de reconnaissance : voir les pellicules en VO pour savourer l'anglais, l'allemand, l'italien, l'espagnol. Cette démarche me rend encore plus "européenne" et j'aime me baigner dans ces ambiances feutrées. Revoir Rome, Berlin, New-York, un coin de Toscane, Londres, et bien d'autres paysages inconnus, donne envie de voyager, de partir, de quitter le quotidien pour aller à la rencontre d'horizons divers. Emotions, sensations, informations, tensions : tous ces mots résument les objectifs du cinéma. Voici ma liste de 10 meilleurs films de l'année 2015 :
- "Mia Madre" de Nino Moretti, le portrait bouleversant d'une quinquagénaire au mitan de sa vie,
- "Phœnix" de Christian Petzold, un thriller allemand troublant sur la perte d'identité,
- "Les merveilles" d'Alice Rohrwacher, un film italien sur l'enfance et ses "merveilles" dans une famille marginale à la campagne,
- "Every thing well be fine" de Wim Winders, une histoire de perte, de deuil et de résilience avec une Charlotte Gainsbourg, hiératique dans sa douleur de mère,
- "La tête haute" d'E. Bercot, un beau film sur l'adolescence difficile et la présence d'une juge exemplaire,
- "Le Labyrinthe du silence" de Giulio Ricciarelli, le portrait d'un jeune procureur à la recherche des SS impunis, son combat obstiné pour les victimes du nazisme,
- "Youth" de Paolo Sorrentino, comment vieillir dans le meilleur des mondes possibles ?
- "Latin lover" de Cristina Comencini, le plus délicieux des films de l'année 2015, un hommage au cinéma,
- "Back home" de Joachim Trier, pour Isabelle Huppert dans la peau d'une photographe de guerre,
- "While we're Young" de Noah Baumbach, le seul film américain de ma liste, et pour New York.
2016 va m'apporter certainement de très bons films qui, je l'espère, fourniront ma liste de l'année prochaine...

mardi 5 janvier 2016

Ma liste de mes 10 meilleurs essais de 2015

Je ne lis pas que des romans et plus je prends de l'âge, plus je cherche à comprendre le monde, la société, la vie... Et j'ai toujours ancré en moi ce besoin de rationalité même si, parfois, des événements nous sidèrent et nous empêchent de réfléchir comme certains en 2015.  La littérature m'apporte des réponses, mais surtout beaucoup de questions. Les essais m'éclairent, donnent une dimension plus approfondie à mes interrogations et je crois que je suis atteinte d'une maladie bénigne incurable : la curiosité... Et cette curiosité se nourrit de lectures éclectiques. Voici ma liste des livres de non-fiction que j'ai particulièrement appréciés en 2015 :
- "Et tu n'es pas revenu" de Marceline Loridan-Ivens, un témoignage sur l'enfer des camps de concentration,
- "Epicure en Corrèze" de Marcel Conche, un philosophe compréhensible et d'une sagesse communicative,
- "Sur l'idée d'une communauté de solitaires" de Pascal Quignard, pour les amoureux de la lecture,
- "Les livres prennent soin de nous" de Régine Detambel, la bibliothérapie expliquée et vécue par cette écrivaine originale,
- "Rimbaud le fils" de Pierre Michon, un portrait décapant d'un poète universel,
- "Mourir de penser" de Pascal Quignard, souvent difficile à comprendre mais d'une érudition délicieuse,
- "Un candide à sa fenêtre" de Régis Debray, le plus grand des philosophes français, une autobiographie intellectuelle d'une saveur particulière,
-  "Sapiens" de Harari, une histoire passionnante de l'humanité, incontournable pour comprendre notre passé,
- "Crépuscule des bibliothèques" de Virgile Starck, un pamphlet salutaire sur le devenir parfois trop technocratique de ces lieux merveilleux,
- "Palmyre" de Paul Veyne, un portrait éblouissant d'une cité antique en danger.
Tous ces essais ont marqué mon année passée et m'ont apporté un grand bonheur de lecture...

lundi 4 janvier 2016

Ma liste des 10 meilleurs romans de 2015

Comme tous les ans, j'effectue un bilan concernant mes lectures de l'année passée. Je vais donc proposer quelques listes : mes 10 meilleurs romans, mes 10 meilleurs essais, mes 10 meilleures séries, mes 10 meilleurs films. Je note mes lectures sur un carnet noir, acheté à Amsterdam pour sa couverture sur laquelle figure mon cher Albert Camus. J'ai lu en 2015, une bonne centaine de romans et d'essais, cent onze exactement... Mes coups de cœur dans la catégorie fiction s'avère un choix difficile et injuste pour tous ceux et celles que je vais délaisser. Voici quand même mon tableau d'honneur de janvier à décembre :
- "Soumission" de Michel Houellebecq, un roman pessimiste et visionnaire, un choc littéraire, une littérature polémique et politique,
- "Amours" de Léonor de Recondo, une histoire audacieuse d'amour entre deux femmes d'origine sociale différente dans une époque où l'émancipation des femmes démarrait,
- "Portrait craché" de Jean-Claude Pirotte, un témoignage autobiographique émouvant sur la fin de vie de ce poète franco-belge,
- "Une histoire d'amour et de ténèbres" de Amos Oz, une fresque mémorable sur une famille et sur un pays, Israël par l'un des plus grands écrivains contemporains,
- "Pour Isabel" d'Antonio Tabucchi, son dernier roman sur un personnage féminin à l'identité incertaine et multiple,
- "Histoire d'Irène" de Eri De Luca, encore un italien incontournable et sa magie de conteur dans trois histoires courtes et intenses,
- "Miniaturiste" de Jessie Burton, un roman historique passionnant sur Amsterdam et sur un personnage féminin attachant,
- "D'après une histoire vraie" de Delphine de Vigan, une histoire troublante sur une amitié inventée ou vécue, un thriller psychologique,
- "Théra" de Zeruya Shalev, l'analyse impitoyable du couple dans un environnement inquiétant,
- "La carte des Mendelssohn" de Diane Meur, un travail de titan, une saga généalogique de prestige.
Dans cette sélection, je remarque une égalité hommes-femmes, alors que je n'avais pas prévu cette parfaite adéquation. Je recommande ces dix excellents romans publiés en 2015. Je me dis que l'année 2016 va m'apporter des surprises semblables et je me réjouis déjà à l'idée de découvrir les futurs coups de coeur que certains écrivains sont en train de terminer sur leur table de travail...