vendredi 20 mai 2011

Colères

Ce titre convient très bien au roman de Lionel Duroy. Avant de lire "Colères", il vaut mieux découvrir son "autobiographie" romancée dont j'ai parlé en 2010 dans mon blog. "Colères" constitue une suite plus courte, plus ramassée, plus concentrée. Lionel Duroy ou la difficulté d'avoir été un fils (voir le roman "Le chagrin"), d'être un mari deux fois abandonné, et d'être un père en difficulté. Lionel Duroy, le "Marcel" du roman ne cesse de faire le procès de la "cellule familiale", de la famille, ou de l'image de la famille. Il exploite sa vie d'homme et la restitue dans la littérature. Son style direct, simple et efficace atteint le lecteur comme une flèche, sa cible. Je cite un des passages du roman : "Pourquoi les choses se délitent-elles au moment justement où nous pensons les tenir ? Nous passons des mois à écrire que nous avons compris, à sauver de l'oubli ceux que nous avons le plus aimés, à régler leurs compte à ceux que nous haïssons, non pour eux-mêmes car ils sont morts la plupart du temps, mais pour les sentiments qu'ils ont incarnés que nous ne voulons plus voir, jamais, et tandis que nous menons à bien cette entreprise colossale, toute notre vie présente se fissure et puis s'effondre." La relation père-fils est décortiquée avec humour et dérision. Son fils a fui à New York en lui laissant des dettes d'argent. Son fils veut ainsi se venger de son père pour faire "payer" son premier divorce et le livre où il dénonce la folie de sa mère et la vie d'escroc de son père. Le roman de Lionel Duroy est un réquisitoire contre la famille, cellule vivante mais fragile, où l'on peut vivre heureux et malheureux, amoureux de sa femme et ne pouvant pas la toucher (la relation avec sa deuxième femme finira par une séparation), fier de ses filles et fou de rage contre son fils. On ne s'ennuie pas chez Lionel Duroy : c'est une thérapie familiale en permanence qui se joue devant nous. Un bon roman plein de colères, d'humour et de vie...