jeudi 28 décembre 2017

La lecture, un bonheur secret

Pour terminer l'année 2017, je reviens sur le bonheur "secret" de la lecture. En janvier, j'établirai mes listes des "dix meilleurs" dans les catégories romans, récits, séries et films. Une sorte de bilan culturel qui me permet de me remémorer mes découvertes de l'année. Lire est un sport de l'esprit. Je pratique cette discipline quotidiennement comme un marcheur qui arpente des pages et des pages de mots. Ma ration mensuelle n'a pas de limite, mais, en principe, je dévore de six à huit livres par mois (parfois davantage) et je me permets ce luxe grâce à mon temps libre de retraitée... Certaines amies me demandent mon secret : comment fais-tu pour lire autant ? Je ne mesure pas le temps que je passe dans mes livres. Je vis, je lis. Pour ouvrir un livre, il faut s'isoler, se cacher, se blottir en soi et délaisser les activités chronophages :  courses diverses, repas sans fin, relations sociales superficielles. Je ne renonce pas à mes balades, à la musique, au cinéma,  à Internet, etc. Lire, c'est se retrouver en tête en tête avec un objet familier en papier sur lequel sont inscrits des milliers de mots composés par un(e) écrivain(e). L'écriture exige du temps, de la rigueur, un sacrifice. Je mène ainsi une conversation intérieure avec celui ou celle qui m'a donné rendez-vous. Ma bibliothèque est ainsi peuplée d'ami(e)s. Je réserve la matinée aux lectures plurielles : presse nationale sur internet, magazines littéraires, Le Monde, le roman en cours. Pendant ma séance de vélo d'appartement, je préfère la philosophie. Je lis depuis un mois un chapitre par jour de "l'Histoire de la pensée" de Lucien Jerphagnon. Mon approche pour ces textes denses ressemble à un exercice physique où concentration et effort se marient à merveille... L'après-midi, quand je reste chez moi, je feuillette un de mes beaux livres d'art, le roman ou le document en cours. Et le soir, je reprends mon roman en cours... Peut-être que pour certains, je lis trop... Mais, pour moi, je ne lis jamais assez. J'ai reçu à Noël, des livres sur l'art, des romans et ma liste de livres à lire s'allonge sans fin comme une éternité promise. Je pense à ces vers de Borges : Et quand je pensais à la Terre promise, c'est une bibliothèque que je voyais". Belle définition de la lecture... A l'année prochaine pour partager mes bonheurs de lire, de voyager, de flâner et de vivre... 

vendredi 22 décembre 2017

Rubrique cinéma

Comme j'aime le monde des sopranos, de l'opéra et de la musique baroque, je suis allée voir le film de Tom Volf, "Maria by Callas". Cette femme légendaire et sublime, disparue en 1977, fait donc l'objet de ce film documentaire avec la voix de Fanny Ardant. Les images d'archives défilent sur l'écran en alternant l'histoire de sa carrière avec celle des moments d'intimité où la diva se confie aux journalistes de l'époque. Cet immense travail de tri du réalisateur compose un hommage sensible qui présente une image complexe et attachante de cette femme unique. Née en 1923 à New York, de parents grecs immigrés, elle passe sa première audition radiophonique en 1934. Cinq ans plus tard, elle rejoint le Conservatoire de musique d'Athènes dans la classe d'Elvira de Hidalgo. En 1945, elle revient à New York et commence sa carrière de soprano. Mariée à son imprésario italien de 28 ans son aîné, elle divorcera dix ans plus tard quand elle rencontre l'amour de sa vie, le milliardaire grec, Aristote Onassis. Mais, elle se sentira trahie quand elle apprend le mariage de son amant avec Jacqueline Kennedy. Elle mène sa carrière dans le monde entier avec l'admiration des fans digne de celle d'une rock star... Sa dernière prestation publique a lieu en 1974 à Tokyo. En 1977, elle meurt d'une embolie pulmonaire à Paris dans son appartement où elle vivait recluse. Ce film présente des extraits musicaux où la toute puissance de sa voix envahit l'espace intime du spectateur. Et, quand elle se confie à la caméra, elle se dévoile comme une femme "ordinaire" qui ne rêvait (selon elle) que d'un prince charmant et d'une famille aimante. Son destin de chanteuse lyrique l'a détournée de cette voie traditionnelle. Le réalisateur raconte dans un entretien : "En oscillant de la femme éperdument amoureuse à l'artiste de génie, le film fait une place à cette dualité  qui a hanté sa vie". Ce film documentaire sur Maria Callas montre qu'une voix peut toucher l'âme de tous ceux (celles) qui prêtent attention à la magie du chant lyrique... Au fond, cette diva avait conservé dans son intimité, une immense simplicité et un esprit de sacrifice qui lui venait, certainement, de ses origines grecques. Une sœur d'Antigone, égarée dans le monde contemporain. 

mercredi 20 décembre 2017

"C'est chose tendre que la vie..."

Né à Paris en 1952, André Comte-Sponville effectue ses études à l'Ecole Normale Supérieure et à la Sorbonne. En 1975, il obtient l'agrégation de philosophie. Il a enseigné en lycée et à la Sorbonne. En 1988, il quitte ses fonctions de professeur pour se consacrer entièrement à la philosophie. Auteur de nombreux essais qui ont le mérite d'être compris par un large public, il attire la méfiance de certains "puristes" qui n'apprécient pas sa méthode claire, sérieuse et pédagogique pour tous les curieux de philosophie. Il est parfois très difficile de pénétrer de plain pied dans les œuvres de Platon, Aristote, Descartes, Pascal, Montaigne, Spinoza sans citer les plus hermétiques comme Heidegger... Des médiateurs empathiques nous aident à découvrir ces sommets d'intelligence et d'érudition. Je préfère pour ma part André Comte-Sponville à Michel Onfray. J'ai donc lu dernièrement "C'est chose tendre que la vie", publié en 2015 chez Albin Michel et disponible en Livre de poche. Ces entretiens avec François L'Yvonnet empruntent leur titre à Montaigne, "C'est chose tendre que la vie, et aisée à troubler...". Le philosophe rappelle que "la philosophie (...) n'abolit pas ce trouble, toujours possible, mais rend cette tendresse-là un peu plus précieuse, un peu plus consciente, un peu plus réfléchie, un peu plus forte, un peu plus libre, un peu plus sage... Puis, il y a le plaisir de penser. Penser sa vie, et vivre sa pensée, du moins essayer... C'est la philosophie même".  André Comte-Sponville évoque, avec clarté et honnêteté, sa vie personnelle et son parcours professionnel, les influences de ses maîtres, ses valeurs, ses lectures. Il expose en profondeur les grands thèmes de ses livres : le bonheur (qu'il définit comme un gai désespoir), la politique, l'art, la morale. Ce tour d'horizon sur sa vie d'intellectuel  évite le piège de la simplicité démagogique et la forme de l'ouvrage en un dialogue structurant facilite la lecture parfois ardue de quelques concepts. Il rend ainsi hommage à tous ceux qui l'ont nourri : Epicure, les Stoïciens, Montaigne, Pascal, Spinoza chez les anciens et Marcel Conche, Lévi-Strauss, Clément Rosset pour les modernes. Il n'oublie pas la pensée orientale en pratiquant la méditation. Il propose dans ce livre dense sa philosophie : il est matérialiste donc athée, il prône la raison et revendique l'humanisme. Sa vision d'une civilisation universelle repose sur les droits humains et sur le libre arbitre. Si on veut découvrir la philosophie sans subir l'obstacle d'un langage complexe, André Comte-Sponville prend son lecteur par la main et lui explique avec patience et beaucoup de bienveillance les merveilles du questionnement...  

lundi 18 décembre 2017

"Sable mouvant"

Le dernier ouvrage de Henning Mankell remplira tous ses fidèles lecteurs de nostalgie. Car cet écrivain suédois, traduit dans trente cinq langues est décédé d'un cancer à l'âge de 65 ans. Il a composé avec son célèbre Wallander, une série de dix romans policiers qui ont marqué les amateurs de ce genre littéraire. Dans "Sable mouvant, fragments de ma vie", il livre un témoignage émouvant sur sa maladie contre laquelle il se bat farouchement : "En 2014, j'ai appris que j'étais atteint d'un cancer grave. Cependant ce n'est pas un livre crépusculaire, mais une réflexion sur ce que c'est de vivre". Il raconte sa visite chez le médecin qui lui annonce le cancer du poumon, le suivi de la maladie, la chimiothérapie, la fatigue, l'angoisse de sa propre disparition. Mais, la maladie n'envahit en aucun cas les pages de ce beau récit. Il revient sur les épisodes décisifs de sa vie d'homme : sa jeunesse voyageuse, son engagement politique à gauche, son amour du théâtre en Mozambique, ses expériences africaines, sa relation perdue avec sa mère qui l'a abandonné. Il évoque ses tourments, ses colères dirigées en priorité contre les dangers du nucléaire. Le livre prend une dimension "historique" quand il brasse la notion du temps. Que va-t-il rester des hommes dans 150 000 ans ? Pour lui, ce sont des déchets nucléaires, engloutis dans une énorme cavité creusée dans la roche à 430 mètres sous terre sur la côte finlandaise.... Ce vertige du temps l'obsède : il raconte les peintures rupestres de la grotte Chauvet, une sculpture préhistorique en ivoire trouvée en Allemagne en 1939, un temple à Malte, les statues de l'Ile de Pâques... Et nous, dit-il, nous léguerons les déchets nucléaires... De ces faits historiques et culturels, il les évoque comme des ruptures dans la civilisation humaine. Les ruptures, Henning Mankell les analyse dans sa propre vie. A Salamanque, un serveur lâche son plateau après une dispute avec des clients et quitte le restaurant en courant, le jeune homme Mankell comprend qu'il faut saisir sa chance, tout lâcher pour vivre vraiment ses désirs et il choisit l'écriture de romans... Il se souvient de deux petits frères en Mozambique qui vivaient dans une poubelle dont l'aîné protégeait le cadet avec amour. L'écrivain relate ces moments de grâce avec une empathie communicative malgré la présence de la grave maladie. Récit intime, essai politique, réflexions philosophiques, ce livre de vie se termine sur une note d'espoir : "Je vis dans l'attente de nouveaux instants de grâce. Des instants qui viennent. Qui doivent venir, si la vie doit avoir pour moi un sens". Un témoignage bouleversant d'un grand écrivain suédois...

vendredi 15 décembre 2017

Cours sur l'art

L'Université savoisienne du temps libre (USTL) a proposé un programme intéressant pour la saison 2017-2018. Je me suis inscrite à la session sur l'art avec "Etudier une image" et sur la littérature avec "la tragédie grecque". Geneviève Gaufillet, notre professeur, nous a présenté, en six séances d'une heure trente minutes, une méthode pour analyser une œuvre d'art. Sa méthode pédagogique s'appuie sur un diaporama avec des illustrations évidemment très nombreuses. Un tableau très concis présente un survol de l'histoire de la peinture, du Moyen Age au XVIII, accompagné d'un lexique du langage pictural. Anamorphose, clair-obscur, détrempe, glacis, lavis, marouflage, prédelle, sinope, tondo, vanité, veduta :  ces quelques mots techniques que j'ai choisis dans le lexique, une fois bien définis, ouvrent le chemin vers la compréhension de l'image. Pour déterminer une image, le professeur a décliné tous les supports (rigides et souples), puis les techniques (eau, huile, vernis) et a terminé par les formats. La première partie de l'identification de l'image était accompagnée de tableaux réputés. Les conditions de réalisation constituent la deuxième partie : l'artiste, la signature, le titre et la date de l'œuvre, le contexte et le destinataire. Une fois ces éléments expliqués, il faut s'attacher à décrire les éléments représentés : peintures d'histoire, religieuse, littéraire, allégorique, portrait, paysage, nature morte, trompe l'œil, etc. Elle a montré aussi l'importance capitale de la perspective en repérant dans une toile les dimensions : des verticales, des perpendiculaires, des horizontales, des points de fuite. Pour vraiment étudier une image, il faut se doter de tous ces outils intellectuels pour mettre l'œuvre "en perspective". L'artiste ne peint pas au hasard, à l'instinct, sans but et sans message. Bien au contraire, un tableau en fait représente une énigme. J'aime cette dimension mystérieuse d'une œuvre d'art... Peut-on se passer de toutes ces connaissances techniques pour apprécier un tableau ? Comme l'a dit une amie qui suivait ce cours avec moi, et l'émotion devant une toile, une sculpture, un temple, une fresque, un dessin ? Ce choc esthétique, ce moment de grâce ne s'apprend pas, il se vit dans des minutes qui nous marqueront à tout jamais... Après l'émotion, vient peut-être la réflexion avec toute la panoplie que nous a offert notre professeur d'art. Cette session s'est révélée très intéressante, jamais ennuyeuse et même ludique parfois avec des exercices amusants. Comme je fréquente ardemment tous les musées d'Europe, je regarderai certaines peintures avec un œil plus formé, plus averti, plus curieux... 

jeudi 14 décembre 2017

"L'ordre du jour"

Eric Vuillard a obtenu le prix Goncourt 2017 à la surprise des médias car il n'était pas le favori... Mais, je comprends le jury pour deux raisons évidentes : l'Histoire et le Style. On ne parle pas assez de cet élément essentiel, primordial, capital dans une œuvre littéraire : le don de la langue. L'auteur de "l'ordre du jour" écrit une histoire dans l'Histoire en apportant un soin unique et rare de nos jours : les mots, ses mots. Le roman démarre ainsi : "Le soleil est un astre froid. Son cœur, des épines des glaces. Sa lumière sans pardon". Le décor posé, il évoque un événement anodin, daté du 20 février 1937,  qui va se dérouler dans l'indifférence des "gens ordinaires" : "Pourtant, la plupart passèrent leur matinée, plongés dans ce grand mensonge décent du travail, avec ces petits gestes où se concentre une vérité muette, convenable, et où toute l'épopée de notre existence se résume en une pantomime diligente". Ce jour fatal de février, vingt-quatre "messieurs" allemands d'influence se réunissent, car ils sont convoqués par le Président du Reichstag, Goering. Le nouveau chancelier, Hitler, fait son apparition et demande l'appui financier de tous ces industriels, fascinés par le programme politique des nazis : éloigner la menace communiste, éliminer les syndicats, imposer la force. Après cette rencontre qui scelle l'alliance mortifère des nazis avec les puissants de l'économie allemande, le texte bascule sur un deuxième événement majeur et prémonitoire : l'annexion de l'Autriche dans le Reich. Le chancelier autrichien Schuschnigg est convoqué par Hitler pour préparer son pays à l'inéluctable. Le projet d'Eric Vuillard réside dans cette description au scalpel de la lâcheté humaine à travers des personnages historiques d'une faiblesse certaine ou d'une férocité totale. Il active un zoom sur ces moments cruciaux où l'Histoire bascule dans le tragique, dans la violence et dans l'injustice. Il n'a aucun besoin de personnage central, de récit linéaire et pourtant, ce texte se lit comme un roman. A l'origine du livre, l'auteur raconte dans Télérama : "un sujet qui m'intéresse, sur lequel j'ai lu des tas d'ouvrages depuis des années, et tout à coup survient un embryon d'idée, à quoi s'ajoute cette brûlure intime qui fait que j'ai envie d'écrire, de m'y mettre". Ce roman dénonce le pouvoir des Puissants et l'écrasement des Faibles et dans une phrase fulgurante, Eric Vuillard écrit : "Les plus grandes catastrophes s'annoncent souvent à petits pas". Un Prix Goncourt audacieux et mérité.

mercredi 13 décembre 2017

"Je me promets d'éclatantes revanches"

Le sous-titre significatif "Une lecture intime de Charlotte Delbo" de ce récit-hommage définit le projet biographique de Valentine Goby : deux femmes, deux écrivains, deux époques, deux générations. La contemporaine Valentine évoque la figure emblématique de Charlotte Delbo, beaucoup moins connue en France que Jorge Semprun dans le domaine du témoignage historique sur les camps nazis. Cette femme de la Résistance est arrêtée en 1942 et son mari est fusillé au Mont-Valérien. Emprisonnée, elle est ensuite déportée à Auschwitz, puis à Ravensbrück. Elle réussit à survivre dans cet enfer nazi et elle va utiliser l'écriture pour témoigner, pour évoquer l'horreur des camps de concentration. Les éditions de Minuit publieront dans les années 60 ses premiers écrits sur son expérience concentrationnaire, "Auschwitz et après" en trois volumes. Valentine Goby raconte sa belle rencontre avec cette femme exceptionnelle. En écrivant son roman, "Kinderzimmer", une amie lui demande si elle connaît Charlotte Delbo. Elle découvre alors une voix unique : "A la lire, j'ai pensé qu'écrire, c'est peut-être exactement cela : forger une langue capable de nous ramener d'entre nos morts ; la langue de nos confins où nous nous croyons muets". Les mots de Charlotte Delbo ressemblent à un "souffle" et sa "sœur" en écriture relate la vie de cette femme engagée au Parti communiste. Elle fut la secrétaire de Louis Jouvet avant la guerre et s'est ensuite engagée dans la Résistance. Après son retour des camps, elle a travaillé à l'ONU et elle meurt d'un cancer du poumon en 1985 à l'âge de 65 ans. Le récit de Valentine Goby revient sans cesse sur la vie de Charlotte Delbo, peu reconnue de son vivant. Cet élément de non-reconnaissance, une véritable injustice, chagrine la narratrice qui, avec le livre qu'elle compose, veut effacer cet oubli injustifié. Ce récit oscille entre une biographie, un exercice d'admiration et un journal intime sur sa découverte de Charlotte Delbo. Elle en parle dans une classe pour la faire connaître, elle se plonge à corps perdu dans ses archives à la Bibliothèque nationale, elle absorbe la prose intense de l'écrivain. Elle écrit : "Oubli ou mémoire, deux pôles entre lesquels comme en nous-mêmes, la vie, l'écriture de Charlotte Delbo hésitent sans cesse". Le titre du livre résume aussi la rage de vivre de Charlotte Delbo qui a déclaré avant de s'éteindre : "tu sais, j'ai eu une belle vie"... 

Atelier Lectures, 4


Je consacre un quatrième billet pour terminer l'évocation de ces voix féminines dans la collection Babel. Régine a parlé avec conviction de "Bad girl : Classes de littérature" de Nancy Huston. Ce livre s'apparente à une autobiographie intra-utérine qui se poursuit par celle de sa petite enfance. L'écrivaine tutoie son propre fœtus qu'elle appelle Dorrit. La petite Dorrit, pourtant abandonnée par sa mère,  est devenue une femme libre et engagée. Cet ouvrage original par sa forme traite de l'abandon et de la difficulté de se construire avec un tel héritage. "Bad girl" n'a pas été désirée, ni aimée par sa mère. Grand-père pasteur, tante missionnaire, grand-mère féministe, belle-mère allemande, père dépressif, mère conflictuelle, la petite Nancy se jette à corps perdu dans la littérature comme une survie essentielle. Cette "mauvaise fille" est devenue Nancy Huston, canadienne anglophone et pure parisienne, avec un parcours littéraire de premier plan... Un récit fort, indispensable pour rencontrer une écrivaine singulière et puissante. Danièle a présenté "Opéra sérieux" de Régine Detambel. Ce roman plaira beaucoup à tous les amateurs d'opéra et de chant lyrique. En 1926, Elena Marsch pousse son premier cri. Son père est un ténor célèbre et sa mère, elle-même soprano, meurt prématurément. Après la Deuxième Guerre mondiale, ils s'installent en Amérique, fuyant les persécutions nazies. Elena ne connaît que ce milieu de l'opéra et va devenir une chanteuse lyrique en médusant son public avec une voix unique. La soprano confondra l'opéra et la vie. Elle finira par s'égarer dans ce monde de l'illusion. Ce roman d'une écriture somptueuse possède un charme envoûtant. Je terminerai par "Dans l'ombre de la lumière" de Claude Pujade-Renaud. La narratrice, Elissa, raconte sa vie de concubine avec Saint Augustin à Carthage avant qu'il ne devienne évêque, puis, leur vie à Thagaste et en Italie où le jeune Augustin était rhéteur. Il répudie Elissa pour devenir un pilier de l'église chrétienne dans ce siècle passionnant entre les religions païenne, manichéenne et chrétienne. Ils perdent leur fils unique et ne se reverront plus. Elissa, revenue vivre dans son pays, raconte sa vie quotidienne chez un potier et chez un copiste qui lui lit des extraits des "Confessions". Elle aimera cet homme exceptionnel jusqu'à sa mort. Ce roman historique se lit sans difficulté et avec un intérêt croissant au fil du récit. La collection Babel d'Actes Sud, a tenu ses promesses de "bonnes lectures". Tous ces romans que j'avais conseillés ont conquis mes lectrices de l'atelier. Mission accomplie...

dimanche 10 décembre 2017

Héros populaire

La France médiatique vit au rythme de deux disparitions "mythiques", celle de D'Ormesson et celle de Hallyday, l'intellectuel aristocrate et l'artiste saltimbanque : deux facettes de notre pays paradoxal. Je me lance dans cet exercice car j'ai suivi par curiosité les deux cérémonies, très différentes mais uniques chacune dans leur genre. Pour l'un, les Invalides avec les honneurs de la nation, pour l'autre, un départ rock'n'roll avec des bikers sur leur Harley Davidson de prestige.  Une marée humaine a déferlé à Paris ce samedi, toutes générations confondues, surtout venues d'une France profonde et périphérique. Cette foule de fans semblait éprouver pour ce chanteur populaire une véritable adoration. Le rock'n'roll, le blues, la pop irriguent la culture musicale d'une très grande majorité de Français. J'avoue que j'ai rarement écouté Johnny car mes goûts musicaux sont depuis toujours du côté du classique... Pourtant, je me souviens des débuts du "yé-yé" quand mes parents tenaient un bar.  Un jour, un scopitone a fait son apparition dans l'établissement. L'ambiance a changé d'un seul coup : les jeunes du village sont venus fréquenter le bar pour écouter cette musique de "sauvages"... Les stars modernes sont nées à ce moment-là : Richard Anthony, Eddy Mitchell, les Chaussettes noires, et surtout Johnny, le plus grand de tous. Le twist faisait des ravages et qui, dans ma génération, n'a pas dansé sur ces airs-là ? Quand je m'imagine cette époque des années 60, les années de mon adolescence, nos oreilles étaient collées sur le transistor pour écouter Salut les Copains... Des clans naissaient dans le lycée : celui de Johnny, celui d'Adamo, celui de Claude François. Ces années d'une France qui entrait dans une modernité musicale, sociétale, culturelle restent gravées dans la mémoire des Français(e)s ! Tous ces fans qui ont défilé sur leur moto veulent faire durer leur jeunesse dans une impossible quête de rêve américain. Car Johnny ressemblait à ses fans : simple et complexe à la fois. Il symbolisait la force vitale, la liberté dans ses excès : l'alcool, la coke, la vitesse, les  femmes et les copains... Et sa voix chaude chantait tous les malheurs d'amour, consolait les inconsolables et donnait un moral d'acier à tous les éclopés de la vie. Johnny, le rocker thérapeute, le demi-dieu du public est parti dans une apothéose kitsch... 

vendredi 8 décembre 2017

Hommage à Jean d'Ormesson

Cet écrivain français a connu de son vivant la plus belle des consécrations pour un amoureux de la littérature : être publié dans la Pléiade. Côtoyer sur une étagère son mentor, Chateaubriand, et les compagnons (peu de compagnes...) des lettres constituait sa plus grande joie. Je me souviens d'une émission de Léa Salamé sur lui où il racontait qu'il préférait être lu dans deux cents ans plutôt qu'aujourd'hui. Son goût profond et authentique des Classiques lui dictait ces paroles convaincantes. Pourtant, les critiques des puristes exigeants l'ont certainement blessé et le monde universitaire  ne s'est toujours pas penché sur ses œuvres par manque de profondeur, (je suppose). J'ai suivi ce matin l'hommage que lui a rendu le Président de la République. Ce discours sur la France littéraire, sur l'amour des écrivains, du langage, de l'élégance m'a étonnée et m'a rassurée sur la culture française. Il avait déclaré qu'il n'y avait pas de culture française dans un de ses meetings en 2016. Jean d'Ormesson a donc remis notre jeune Président sur le "droit chemin"... Pourquoi cet engouement du grand public pour cet écrivain, noble de naissance, raffiné, cultivé, élégant ? Ses livres sont lisibles, ses livres racontent des histoires, ses livres ont rencontré beaucoup de lecteurs(trices). Mais son succès médiatique dépassait largement la portée de ses écrits. Il symbolisait le charme ancien, la séduction naïve, la politesse exquise, l'esprit goguenard. Sa gentillesse étonnante dégoupillait les velléités agressives de ses contradicteurs. De droite, il parlait avec la gauche. Sa tolérance proverbiale provenait de son profond humanisme. Si j'écris un billet sur lui alors que je ne l'ai pas lu (je vais combler ce manque de curiosité), c'est pour le combat insensé qu'il a mené dans les années 80 pour imposer la candidature de Marguerite Yourcenar à l'Académie française, complétement hostile aux femmes de lettres. Ce geste d'un féminisme courageux et symbolique a ouvert les portes de cette institution au "deuxième sexe" même si elles sont encore ultra minoritaires. Son grand âge qu'il portait magnifiquement prouvait aussi que la vieillesse n'est pas toujours un naufrage. Il aimait la vie et la vie semblait l'aimer aussi... Un grand monsieur des Lettres françaises est parti dans le paradis des écrivain(e)s avec son crayon modeste, mais indispensable pour laisser des traces sur la page blanche de sa nouvelle carrière auprès de ses confrères disparus... 

jeudi 7 décembre 2017

Atelier Lectures, 3

Dany a beaucoup aimé un roman d'Anne Percin, "Les singuliers". Dans les années 1888-1990, Hugo Boch, une jeune peintre venu de Belgique, s'expatrie à Pont-Aven, loin de sa famille bourgeoise. Il rencontre de nombreux artistes dont Gauguin. A cette époque-là, les Impressionnistes révolutionnent l'art moderne et ce roman épistolaire mélange les personnages fictifs et historiques. Pour Dany, cette lecture est un régal total, surtout si on aime le monde de la peinture. Geneviève a présenté avec enthousiasme "Cherchez la femme" d'Alice Ferney. Serge et de Marianne s'aiment, se marient, se déchirent, se séparent. L'écrivaine pose la question du poids familial dans le comportement du couple qui s'use au fil du temps. Que veut dire s'unir ? S'aimer ? Se marier ? Les origines sociales, le passé familial, la vie professionnelle, les convictions et les valeurs peuvent peser dans le couple jusqu'à la séparation inévitable. Ce voyage à travers l'autopsie d'un amour n'empêche pas des touches d'humour dans une prose vivifiante. Les femmes dans ce livre n'ont pas le beau rôle et les hommes paraissent inexistants, d'après Geneviève. Un livre captivant et réussi à découvrir pour celles qui ne l'ont pas encore lu.  Janelou a choisi "Kinderzimmer" de Valentine Goby.  En 1944, le camp de concentration de Ravensbrück compte plus de 40 000 détenues. Mila, une jeune femme de la Résistance, a été denoncée et elle est déportée dans le camp de la mort, alors qu'elle porte en elle la vie. Elle découvre la faim, les brimades, le froid, l'horreur et elle ne sait pas s'il faut cacher ou avouer sa grossesse. Il existait une "chambre", kinderzimmer, où naissaient ces nourrissons. Dans ce lieu de destruction, la vie de ces petits êtres semblait une anomalie. Mila se bat pour maintenir son bébé vivant. Ce livre difficile a beaucoup dérangé Janelou qui se demandait si l'écrivaine avait trop mis de pathos dans cette histoire terriblement triste. Il faudrait d'autres lectures pour se faire une opinion sur ce roman très sensible. La suite, demain...

mercredi 6 décembre 2017

Atelier Lectures, 2

J'avais proposé en "lectures fortement recommandées" des écrivaines françaises dans la collection de poche Babel. La maison Actes Sud redonne une seconde vie à leurs romans brochés en les publiant dans ce format accessible à tous les budgets. J'ai choisi 10 romans emblématiques de la littérature actuelle, 10 voix de femmes, 10 univers différents, 10 imaginaires singuliers. Marie et Agnès ont lu "Des phrases courtes, ma chérie" de Pierrette Fleutiaux. La narratrice raconte la vieillesse de sa mère dans une maison de retraite. La mère a été professeur et considère sa fille écrivain avec un peu de condescendance. Sa fille raconte la fin de vie de cette mère qui présente un double visage : charmante avec les "étrangers" et peu aimable avec sa fille, décevante à ses yeux car elle aurait préféré qu'elle exerce un métier médical comme son frère chirurgien. Ce récit ne peut que toucher toutes les lectrices qui traversent ou ont traversé cette expérience difficile  : voir sa mère perdre son autonomie, ses facultés intellectuelles et physiques. L'ambivalence des sentiments mère-fille nait d'une communication difficile entre elles. Un livre fort, dérangeant et intimiste, qui raconte une histoire universelle. En 2016, Pierrette avait aussi écrit un roman très intéressant, "Destiny". Janine a lu avec émotion un roman de Jeanne Benameur, "Otages intimes". Photographe de guerre, Etienne est pris en otage dans une ville en guerre. Après sa libération, il revient dans son pays natal auprès de sa mère.  Il retrouve ses deux meilleurs amis : Enzo, le musicien et Jofranka, une avocate à La Haye pour les femmes victimes de guerre. Ce trio amoureux tente de répondre à la question : qui est l'otage en nous ? L'écrivaine signe un roman très sensible, toujours touchant et toujours d'actualité. Annette et Pascale ont lu "Amazones" de Raphaëlle Riol, un road-movie au féminin. Alice, la trentenaire borderline, et Alphonsine, la grand-mère indigne refusent de rentrer dans le moule du conformisme ambiant. Rebelles comme les Amazones, elles s'insurgent contre les hommes dominants et vont fuguer pour reconquérir leur liberté. Un roman agréable mais parfois agressif, facile à lire. La suite, demain...

mardi 5 décembre 2017

Atelier Lectures, 1

Nous étions nombreuses pour ce dernier rendez-vous de l'année autour d'une table à la Maison des Associations. Malgré le froid dans la salle, une certaine chaleur circulait entre nous et nous avons démarré avec les coups de cœur. Mylène a parlé d'un roman, "Les noces de charbon" de Sophie Chaveau, édité chez Folio. Cette saga familiale du Nord de la France démarre à la fin du XIXe jusqu'en 1968 dans le milieu des mineurs et de leurs patrons bourgeois. Deux familles sont décrites, l'une du "côté de Proust", l'autre du "côté de Simenon", dans un affrontement de classe. Une histoire d'amour va lier les deux héritiers de ces familles discordantes... Mylène a émis une réserve sur le style un peu trop "facile" de l'auteur... Dany a lu un ouvrage d'Erwan Larher, "Le livre que je ne voulais pas écrire". L'auteur commence son livre ainsi : "Tu étais au mauvais endroit au mauvais moment, tu es un miraculé, pas une victime". L'auteur relate sans pathos et sans larmes son expérience terrible quand il s'est retrouvé face aux barbares du Bataclan. Un témoignage capital pour comprendre les sentiments d'un survivant avec l'aide de l'écriture. Danièle a choisi "Le chœur des femmes" de Martin Winckler, publié en 2009. Ce grand succès de librairie a conquis Danièle où elle a retrouvé une symphonie de voix féminines dans un service hospitalier de gynécologie. Toutes ces paroles des patientes forment une polyphonie d'expériences vécues avec le personnage romanesque d'une interne qui se pose beaucoup de questions sur la pratique médicale. Ce pavé de plus de six cents pages, édité dans l'excellente maison d'édition, POL, peut dérouter ou enflammer les lecteurs(trices)... Régine a vraiment eu un grand coup de cœur pour le dernier roman de Sorj Chalandon, "Un jour d'avant" dont on a déjà souligné l'intérêt dans un précédent atelier. Elle a évoqué un roman très agréable à lire, "La tresse" de Laetitia Colombani. Trois femmes de trois pays différents aux origines sociales opposées refusent leur condition : une Intouchable, une avocate et une ouvrière dans l'atelier de son père. Geneviève a présenté "Les bottes suédoises" de Henning Mankell, un formidable roman, la suite des "Chaussures italiennes". Janelou a aimé le roman,  "Les bourgeois", d'Alice Ferney que Mylène avait déjà présenté. J'ai terminé les coups de cœur avec celui d'Evelyne, (que je partage), un récit magnifique de Daniel Mendelsohn, "Une Odyssée, un père, un fils, une épopée". Demain, la suite sur les lectures "imposées"...

lundi 4 décembre 2017

Hommage à Françoise Heritier

Récemment, j'ai vu Françoise Héritier dans la Grande Librairie. Atteinte d'une grave maladie paralysante, elle arborait pourtant un sourire serein et lumineux malgré son handicap. Cette grande dame de l'anthropologie africaniste est décédée le jour de ses 84 ans. En 1957, elle effectue sa première mission en Haute-Volta. Plus tard, elle succèdera à Claude Lévi-Strauss au Collège de France. Ses nombreux ouvrages savants, difficiles à lire pour des néophytes, ont marqué l'histoire de la pensée du XXe siècle. Pour comprendre les théories qu'elle développe dans "Masculin/Féminin", j'ai suivi une émission sur elle très éclairante qui montrait l'importance de ses recherches. Dans la notice nécrologique du Monde, un de ses collègues témoigne : "Elle s'est battue avec toute la force de son intelligence pour affirmer les droits des femmes et leur volonté de se débarrasser de cette domination masculine". Ses champs de recherche se concentrent sur la condition des femmes et leurs rapports avec les hommes, le tabou de l'inceste, la contraception, la différence sexuelle en s'appuyant sur les sociétés africaines.  Féministe, elle était persuadée que "l'évolution vers l'égalité est inéluctable, car elle va dans le sens de l'Histoire". En 2012, elle entame une nouvelle carrière en écrivant le délicieux " Le Sel de la vie", édité chez Odile Jacob, où elle établit une liste des "petits bonheurs de l'existence", les "petits riens" qui forment une autobiographie originale et abrégée. L'année suivante, elle récidive avec "Le goût des mots" en leur faisant un éloge vibrant. Quelques mois avant sa mort, elle publie "Au gré des jours", où elle se confie avec une intimité discrète et élégante. Elle évoque ses souvenirs en Afrique quand elle a découvert ce continent : "une odeur chaude, poivrée, enivrante, d'humus mais aussi de poussière. Invasive, troublante mais immédiatement familière, comme appartenant à l'ordre naturel des choses". Le prix Femina lui a décerné un prix d'honneur pour l'ensemble de son œuvre. Malgré ses graves problèmes de santé, elle semblait vaincre ses souffrances avec une sagesse stoïque, digne de Marc Aurèle. Une grande intellectuelle a disparu mais, elle nous lègue son œuvre d'anthropologue, son engagement féministe et son esprit libre...

vendredi 1 décembre 2017

"Summer"

Le roman de Monica Sabolo démarre avec cette phrase : "Dans mes rêves, il y a toujours le lac". Le lac Léman envahit la mémoire du narrateur entre fantasmes et réalité.  Sa sœur, Summer, dix-neuf ans a disparu lors d'un pique-nique en plein été. Vingt-cinq ans après, son petit frère se pose l'effarante et lancinante question : qu'est-elle devenue ? Cette disparition mystérieuse et inexpliquée obsède Benjamin, le petit frère inconsolable et inconsolé. Sa grande sœur était une jeune fille libre, belle, rebelle, et parfois audacieuse dans ses relations avec les garçons. Les rapports familiaux souffraient de ce comportement insolent et sa mort probable était peut-être liée à ses fréquentations douteuses. Pourtant, le milieu où Summer a grandi ressemble à un paradis de privilégiés au bord du lac Léman. Son père, avocat célèbre et sa mère, une ex-mannequin vivent dans une belle propriété bourgeoise. Un monde parfait selon le narrateur. Mais, tout s'effondre quand Summer n'est pas retrouvée par la police locale : aucune trace d'agression, aucun corps dans le lac, aucun enlèvement avec demande de rançon. Benjamin est hanté par sa sœur : "La nuit, Summer me parle sous l'eau. Sa bouche est ouverte, palpitante comme celle des poissons morts".  Benjamin s'empêche de vivre en pensant sans cesse à sa sœur : tourments angoissés, cauchemars nocturnes, interrogations permanentes, fugues improvisées et pour parachever son malaise existentiel, sa rupture définitive avec ses parents. Benjamin ne renonce pas à retrouver sa sœur disparue. Il finit par prendre son destin en main en menant sa propre enquête au fil du récit. Ses parents réagissent différemment en effaçant les traces de leur fille dans la propriété. Benjamin raconte son adolescence chaotique, ses relations amoureuses décevantes, ses amitiés dangereuses. Il ressasse ce manque dans un flux de pensées ininterrompues. Un jour, il découvre enfin la vérité sur sa sœur... Ce récit ressemble à un thriller psychologique d'un magnétisme troublant et envoûtant. Monica Sabolo décrit ce milieu aisé avec en arrière-plan, une critique sociale sans concession. Seul, Benjamin, le personnage central, attire l'empathie des lecteurs(trices) avec ses souvenirs récurrents, ses rêves obsédants, son amour de frère pour une jeune fille solaire.  Un roman très réussi, palpitant et très bien écrit et qui aurait mérité le prix Goncourt.