vendredi 2 avril 2021

L'éternel retour

 Je pense à ce concept de Nietzsche, "l'éternel retour", quand j'ai écouté avec attention l'allocution solennelle de notre Président. Ce virus s'en va et revient, repart et réapparait : un ennemi stratège qui donne le vertige, un vertige qui nous tourne la tête encore pour un bon moment. En avril, il faut donc se priver de quelques belles balades à plus de dix kilomètres de chez soi et surtout ne pas transgresser les frontières intérieures. Ce virus nous intime l'ordre de rester dans sa chambre ! Pascal serait très heureux de vivre cette drôle d'époque car il a bien déclaré que "Tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne pas savoir demeurer en repos, dans une chambre". En ce temps de confinement, nous allons garder "la chambre", nidifier comme font les cygnes en ce moment au lac du Bourget. Cultiver l'art de s'arrêter un moment, faire une pause dans mon quotidien, me retrancher derrière mes murs de livres avec la musique. Prendre son temps, ralentir son tempo. Ce temps "immobile" peut aussi apporter un besoin de protection, un abri loin de la folie virale. Mais il faut penser aux salariés qui continuent leur galère dans le métro ou ailleurs, aux jeunes gens privés de relations, aux enfants contraints de rester chez eux sans vie sociale. La retraitée que je suis bénéficie de ce privilège : pouvoir s'isoler sans perdre un travail et rester à l'écart du danger mortel que représente le Covid-19. Je rentre dans ce tunnel temporel d'un mois avec une dose de sagesse nécessaire à la Sénèque ou à la Marc-Aurèle... Et dans un mois ou plus, la vie normale va peut-être revenir. Avec le vaccin en soi, je peux rêver de partir loin, d'aller au restaurant, au cinéma, de savourer à nouveau des rencontres, etc. Tout un programme alléchant et excitant. Pendant ce mois printanier, le jardin (quand on a la chance de vivre dans une maison), offre un spectacle réjouissant avec la glycine fleurissante, les hortensias en feuilles, la pelouse verdissante, le soleil resplendissant. Présence d'une nature en éveil, présence de la culture à travers livres et musique, présence d'un espoir en soi, celui de vivre une existence normale, une vie de liberté quand personne ne se rendait vraiment pas compte que sortir après 19h n'était pas répréhensible, que se réunir entre amis ne suscitait pas la réprobation, que voir sa famille relevait du banal heureux. Encore un effort, nous demande notre Président, trente jours dans une vie humaine, allez, ce n'est pas une catastrophe ! Mais, le doute s'installe toujours un peu plus en nous et si cette crise durait, durait, durait comme un éternel retour ? Ce cauchemar n'aura pas lieu. Notre Président l'assure : le 15 mai, ce sera enfin terminé. Un espoir vain ou une réalité possible ? Rendez-vous le 15 mai 2021...