mercredi 21 mai 2014

Rubrique cinéma

J'avais vu des extraits de ce film en avant-programme sans savoir qu'il était dans la sélection du festival de Cannes. Pour les âmes sensibles, il vaut mieux s'abstenir. Pour tous ceux et celles qui vivent dans une atmosphère de gaité, de légéreté et d'optimisme béat, il vaut mieux ne pas dépenser 6,80 euros pour voir ce western hors-norme, "The Homesman",  que Télérama a intitulé dans son long article, "Sur la piste des pionnières devenues folles" ou l'histoire d'un Far-West plus vrai que légendaire, plus authentique que touristique. La folie féminine dérange, perturbe, effraie et au final, tétanise le spectateur. Le réalisateur, Tommy Lee Jones, est aussi l'acteur principal, bougon, ronchon, dur et indiffèrent.  On imagine mal une Amérique de l'Ouest aussi terrible qu'au milieu du XIXème siècle : les pionniers n'habitaient que des masures en bois, étaient éloignés les uns des autres, et vivaient sous la menace des hivers rudes, des Indiens pas gentils du tout, des épidémies, des maladies. Cette conquête d'un nouveau Eldorado ressemble plus à l'Enfer qu'au Paradis. Dans ces espaces illimités, Mary Bee Cuddy, une pionnière forte, déterminée, cultive ses terres et ne rêve qu'à se marier et fonder une famille. Mais ses tentatives de relation restent vaines malgré sa beauté. Elle fait peur aux hommes. La communauté religieuse lui demande de conduire trois femmes atteintes de folie, de dérèglement mental, pour les soigner. Elle rencontre un homme rustre qu'elle sauve de la pendaison et ils vont ainsi entreprendre un long voyage parsemé d'aventures dangereuses où ils vont rencontrer des Indiens inquiétants, des hommes violents, et surtout ils vont s'associer pour "contenir" la violence d'une des femmes malades. Ce film devient un périple moral et philosophique qui va transformer les personnages. George Briggs, le cynique, va éprouver de la pitié envers ces trois femmes en détresse, victimes de viols, de maltraitance conjugale. La vie qu'elles mènent les rend tout simplement "folles" : la perte de leurs enfants, morts de maladie, la solitude de ces terres, la rudesse du travail agricole, l'éloignement de leur famille, l'isolement des fermes. Mary Bee Cuddy représente la bonté, la générosité et quand cet homme lui refuse le mariage, alors qu'ils ont vécu une expérience qui pourrait les rapprocher, elle aussi, perd la tête. Elle se pend de désespoir à un arbre et laisse Briggs tout seul avec les trois malades. Comment va-il réagir ? Les abandonner ou les mener à la femme du pasteur qui va les prendre en charge ? Allez voir ce film parfois éprouvant mais tellement prenant : vous verrez une épopée tragique, un drame humain historique, un portrait de ces femmes dont le courage et l'abnégation en font des héroïnes "bibliques"... Un grand film épique dans un Far-West terrible, un beau film d'amour malgré tout.