lundi 21 novembre 2011

"Grâce leur soit rendue"

Ce roman, écrit par Lorette Nobécourt, aux Editions Grasset, n'a pas été trop remarqué à la rentrée littéraire. Pourtant, les lecteurs-lectrices qui aiment un certain souffle romanesque, un effet "touffu", un ressort dramatique, des personnages hors du commun et la description d'un milieu artistique peuvent apprécier ce livre de 449 pages... Roberto et Unica forment un couple passionnément amoureux l'un de l'autre. L'histoire se passe à Barcelone dans les années 80. L'auteur évoque aussi l'exil forcé de Roberto et Unica, fuyant le Chili, pays meurtri par Pinochet et sa bande immonde de tortionnaires. La lectrice "motivée" et patiente que je suis s'est tout de suite attachée au personnage d'Unica, vivant sa vie comme un absolu, sans compromis et sans fadeur. Ce portrait de femme éclaire le roman d'une lueur noire et blanche à la fois. Cette femme au sommet de la passion amoureuse finira par se suicider. Roberto se reconstruit avec leur fils Kola et retrouvera un équilibre grâce à l'amour paisible et rassurant de la psychanalyste d'Unica. Kola partira à la recherche de ses racines au Chili et résume à lui seul le parcours chaotique de ses parents, voués à la création littéraire, se transformant en force de destruction, surtout pour Unica. J'ai été sensible aussi à toutes les références culturelles et artistiques de l'époque, et au style puissant et imagé de Lorette Nobécourt. En voici un exemple : "La bourgeoisie ! Apeurée, craintive, réductrice, méprisante, avare, hypocrite jusqu'à la méchanceté, baignant dans ses dénis dédaigneux, ses funestes non-dit, infectée par la haine de soi, gâtée par son aversion du passé, solidaire dans la perversité, rivale dans le gain, épargnante. La bourgeoisie où, vêtus de costumes trois pièces, circulaient des porcs." Je me demande pourquoi ce livre a été quelque peu marginalisé dans cette rentrée encore dominée par des écrivains masculins, certes très talentueux mais qui ne possèdent pas cette vision passionnée de l'amour et de la vie dans la littérature. Seule, une femme écrivain ne pouvait que composer une telle symphonie de mots et de personnages inscrits du côté de la vie "excessive"...
Un petit mot sur l'auteur trouvé sur le site de Decître :
Lorette Nobécourt est née à Paris en 1968.
Elle est l’auteur de plusieurs romans dont La Conversation (1998), Horsita (1999, En nous la vie des morts (2006), La Démangeaison (2009) et L’Usure des jours (2009), tous publiés chez Grasset. Grâce leur soit rendue est son neuvième livre.
Je vais donc découvrir ses romans antérieurs avec curiosité.