lundi 2 mars 2015

"La gaité"

Justine Lévy offre un témoignage très vivant sur la condition de "maman", une maman moderne, émancipée et vivant dans le milieu intellectuel parisien. On connaît son lien filial avec le philosophe BHL et ses trois précédents livres traitaient de sa vie privée, de ses relations avec une mère originale et avec un père surmédiatisé. Son œuvre s'inspire de sa vie propre, et peut s'inscrire dans l'autofiction. Dans son avant-dernier ouvrage, "Rien de grave" Justine Lévy évoquait la trahison amoureuse, la perte de l'être aimé, l'échec du couple. Nous la retrouvons mariée à un super "Pablo", son compagnon de vie, un super-héros positif et hyperactif. Elle a décidé de passer du côté de la "gaité", du bonheur en donnant naissance à deux enfants, une fille et un garçon. Certains passages concernant la maternité feront sourire toute mère débordée, angoissée, vigilante. Elle écrit sa peur de  tous les événements qui pourraient nuire à ses deux petits, en particulier, les nombreuses petites maladies qui les affectent. La question que la narratrice se pose au fil du récit : suis-je une bonne mère ? Ou une mauvaise ? Car revient en filigrane le rôle de la sienne, une mère en souffrance, déprimée, et même sous l'emprise de la drogue. Ce lien mère-fille d'avant conditionne le lien mère-enfants d'aujourd'hui. Ce livre écrit dans un style alerte, léger, syncopé raconte cette histoire de "psycho-généalogie". Son vécu de petite fille entre un père instable (il change souvent de compagnes) et une mère fragile (elle vit en marge) resurgit dans sa vie d'adulte. Comment guérir de cette enfance perturbée ? Comment se créer sa propre famille sans la pesanteur du passé ? La narratrice, Louise, lutte contre sa détresse, son anxiété, et cherche sans cesse à vivre dans une certaine sérénité, un apaisement retrouvé. Ce livre attire le sourire avec la description d'une maternité idéalisée. Mais, Justine Lévy raconte aussi le combat incessant qu'elle mène contre sa dépression, son mal d'être, sa tristesse... La littérature lui apporte-elle la "gaité" espérée ? Sans doute.