lundi 11 août 2014

"Médium"

Il existe une catégorie d'écrivains que je lis avec curiosité et amusement sans pourtant les aimer vraiment... J'ai donc fini hier le dernier roman de Philippe Sollers, "Médium" et cet homme, admiré et craint à la fois dans le monde littéraire parisien, écrit des chroniques sur l'air du temps, propose une vision ironique de la vie, voltairienne, insolente et drôlement intelligente. Son livre ressemble plus à un récit autobiographique masqué qu'à un simple roman. Le narrateur, le professore, (certainement Monsieur Sollers) vit à Paris et s'installe très souvent à Venise, sa résidence secondaire.  Il décrit ses fins de semaine dans cette ville où il entretient une relation exclusivement sensuelle et sexuelle avec Ada, une masseuse professionnelle, et fantasme sur la jeune Loretta. Il aime Venise et je cite ces quelques phrases : "Il y a une magie médiumnique de Venise. On la voit sans la voir, on l'entend sans l'entendre, elle disparaît parfois pendant des semaines ou des mois, et soudain, dans une clarté imprévue, elle est là. On la respire, elle fait signe, elle fait flamber les toits et les mâts, l'espérance pour rien recommence." Qui a visité cette ville maritime et aquatique ne peut qu'apprécier ces passages de "grâce" quand il évoque ses séjours vénitiens. Sollers est un fou de littérature et il intègre dans son roman des extraits de Montaigne, Voltaire, Proust, Baudelaire et surtout Saint-Simon. Et dans la dernière partie de son livre, il offre un festival de mots sur la folie de notre temps présent.  Je cite encore un extrait sur la folie : "Passons sur les médias ou Internet, où elle fait régner la plus grande confusion possible, l'essentiel, le cœur du pouvoir n'est pas là. Agitation et transvasement numérique, recyclage technologique, ordinateurs et téléphones toujours nouveaux, tablettes remplaçant les tablettes, ça fonctionne et les satellites s'en  chargent. Le noyau dur, c'est l'archive, l'encyclopédie, le savoir au bout des doigts, autrement dit la Mémoire. La main-mise sur la mémoire est une priorité absolue." Philippe Sollers avec son talent de polémiste, propose un manuel de la contre-folie, un espace de résistance pour se sentir libre, prendre son temps, fuir cette folie contemporaine. Un roman "fourre-tout", un mélange littéraire composé de miettes philosophiques, de confessions intimistes, de colères politiques, de divagations voyageuses... Un bon Sollers, un très bon Sollers !