lundi 21 août 2017

"La Femme et le Sacrifice"

Cet été, j'ai donc découvert Anne Dufourmantelle en évoquant son "Eloge du risque" dans un billet récent. J'ai poursuivi ma lecture de son œuvre avec "La Femme et le Sacrifice" et "Puissance de la douceur". Le premier essai, publié chez Denoël en 2007, est consacré aux grandes figures féminines que l'on dit "sacrificielles". La psychanalyste brosse les portraits d'Antigone, d'Iphigénie, d'Hélène de Troie, de Penthésilée, de Médée, d'Iseut, de Jeanne d'Arc. L'essayiste mélange des personnages fictifs avec des femmes réelles pour illustrer sa thèse : le sacrifice prend des formes inattendues pour certaines héroïnes. Cet essai ne se résume pas avec facilité tant les anecdotes enrichissent le thème du sacrifice des femmes légendaires, mais aussi, des patientes en souffrance qu'elle a suivies dans son cabinet de psychanalyste. Un mot revient souvent dans ses analyses : l'esprit de sacrifice naîtrait de la névrose ou de l'empêchement de vivre, de la répétition d'un passé refoulé. Je cite Anne Dufourmantelle : "Le sacrifice, il y en a partout, tout le temps. (...) Nous le voyons à l'œuvre sous nos yeux dans la vie de ces femmes épuisées, harcelées, ignorantes de leur sacrifice voué à un Autre qui n'a même pas de nom. (...) Car le sacrifice n'est pas toujours tragique, héroïque, spectaculaire. Il y a des sacrifices sans écho, des vies absentes d'elles-mêmes jusqu'à l'effacement. (...) Des vies blanches". La psychanalyste utilise un langage d'une clarté appréciable, loin du jargon psychanalytique. Dans le deuxième essai, "La puissance de la douceur", paru chez Payot, Anne Dufourmantelle décrit ce comportement humain comme une puissance. Elle soutient la thèse d'une douceur symbolique qui métamorphose tous ceux qui la choisissent. Elle cite des écrivains, des philosophes et son style, d'une simplicité lumineuse, apporte à l'essai un souffle littéraire, assez rare dans cette catégorie de textes. Elle écrit : "La douceur est un retour sur soi qui invente de l'avenir, à l'image de la spirale. Une révolution ouverte". Anne Dufourmantelle démontre le pouvoir subversif de la douceur. Notre monde contemporain devrait s'adonner à sa pratique, sans mièvrerie et sans naïveté... Ces deux essais se lisent sans difficultés même s'ils demandent une attention exigeante.