mardi 6 septembre 2022

"Cher connard", Virginie Despentes

 Je viens de lire le best-seller de la rentrée littéraire : "Cher connard" de Virginie Despentes. Que dire de ce roman générationnel ? Faut-il que je le critique durement ou dois-je faire preuve de compréhension ? Je parle souvent d'univers en évoquant les grands écrivains mais pour cette écrivaine française très rock and roll, (trop démodé le rock, c'est même devenu aujourd'hui une sorte de musique noble comme l'antique musique classique), je ne perçois pas trop quel est son univers littéraire. Cette égérie de la cause "féministe" écrit comme une rappeuse car elle utilise le langage parlé, courant pour développer de longues litanies victimaires d'une outrance parfois ridicule. Ma première impression en parcourant son livre : la pauvreté du vocabulaire, de la syntaxe, des tournures de phrases. On se croirait dans un salon entre des adolescentes, sans complexe et revendiquant même la révolution linguistique d'aller au plus pressé. Pour Virginie Despentes, le langage doit avoir une origine masculine et comme elle déteste les "mâles surtout blancs', elle n'aime guère se saisir de la langue française pour la "poétiser". Style banal, vocabulaire minimaliste, vision de la vie au bord de l'apocalypse. Pour Madame Despentes, la vie est un calvaire et seuls, les drogues, l'alcool, le sexe amortissent son "malheur d'être" face à une société "masculiniste", patriarcale voir fasciste d'extrême droite. Sa défense systématique des femmes, victimes des hommes, des bourreaux sur pattes, lui font dire : "La féminité est une prison et on en prend perpet".  La société tue littéralement les femmes et l'écrivaine enfonce ses idées avec un marteau et non avec une plume. Deux personnages dialoguent et parlent de leurs diverses addictions : Rebecca, une actrice quinquagénaire sur le déclin et Oscar, un écrivain raté, contesté par une ancienne collaboratrice et dénoncé par Meetoo. Il est question d'entreprendre une cure de désintoxication en participant à des groupes de paroles mais, cette démarche semble bien "bourgeoise". L'univers de Virginie Despentes m'entraîne sur une planète étrange, d'une noirceur étouffante, celle des "martyrs" du capitalisme blanc, d'un patriarcat assassin. Il vaut mieux s'adonner aux drogues diverses, pour "se foutre en l'air", pour effacer un Réel cruel pour les femmes. Virginie Despentes veut-elle concurrencer Sartre, Céline, Genet, Houellebecq ? Malheureusement pour elle, il lui manque l'ironie, l'humour, le style. Peut-être devrait-elle louer une place dans une navette pour la lune pour enfin créer une société nouvelle où les femmes s'exileraient loin de leurs prédateurs. L'engouement d'une presse littéraire pour ce roman politique m'étonne beaucoup. La littérature militante ne s'inscrit pas dans la longue durée des siècles. Cette autrice cultive une posture révolutionnaire, mais je ne vois pas en elle un Rimbaud au féminin. Pensons à la langue magnifique de cet astre rebelle ! Hélas, n'est pas Rimbaud qui veut.  Ma curiosité intellectuelle a pris le dessus pour lire ce texte que j'oublierai très vite. Et je ne vais pas encore me réconcilier avec cette littérature de combat. Mon féminisme basique n'a pas déclenché en moi un sentiment de sororité à son égard. Dommage.