jeudi 28 mars 2013

"Le roman du mariage"

Ce roman de l'écrivain américain Jeffrey Eugenides a été salué par les critiques littéraires et j'ai donc "attaqué" les 551 pages avec curiosité. La structure est simple : trois étudiants, deux hommes et une femme, Mitchell, Léonard et Madeleine formant un trio de choc dans une Amérique des années 80. Mitchell, étudiant en religions, est amoureux de Madeleine. Madeleine étudie la littérature victorienne, et elle lui préfère Léonard, qui, lui, se débat intérieurement contre une maladie maniaco-dépressive. La jeune femme décrit ses tourments et, malgré l'état de Léonard, accepte de l'épouser. Mitchell entreprend comme beaucoup de jeunes à cette époque, un voyage en Europe et en Inde. Nos trois "héros" vivent le temps chaotique de leur jeunesse à la recherche de l'amour. Léonard est terrassé par ses démons intérieurs, se soigne à l'hôpital psychiatrique, se marginalise, se drogue, lâche prise malgré la présence aimante de Madeleine. Mitchell cherche dans la religion catholique une réponse à sa quête de spiritualité. Ce roman épais et dense est aussi un portrait sans complaisance d'une Amérique des années 80 en quête de sens et de vérité. Le mariage de Madeleine et de Léonard sombre dans des difficultés insurmontables. Pour vous donner envie de lire Eugenides, je ne vous donnerai pas la clé de l'intrigue amoureuse, un huis-clos à trois. Madeleine va-t-elle comprendre que Mitchell serait un compagnon plus conforme à son idéal de mari ? Mitchell sera-t-il disponible après son retour de voyage ? Léonard vaincra-t-il sa dépression paralysante ? J'ai retrouvé dans ce livre la richesse descriptive, psychologique, sociologique de la littérature américaine. Un très bon roman dans la rentrée de janvier.

mardi 26 mars 2013

Atelier d'écriture

Ce mardi après-midi, la séance "écriture", animée par Marie-Christine, avait pour objectif : un voyage au cœur des livres. Après avoir lu un extrait de "La petite chartreuse" de Pierre Péju, elle nous a demandé d'établir une liste de mots évoquant le monde des livres. Ensuite, elle nous a proposé d'écrire un texte avec les 10 mots choisis dans le cadre d'une animation littéraire nationale. Voici les 10 mots : atelier, bouquet, cachet, coup de foudre, équipe, protéger, savoir faire, unique, vis à vis, voilà. J'ai donc écrit ce texte, inspiré par un souvenir de voyage : "Ma bibliothèque préférée,
Voilà, j'ai vécu un véritable coup de foudre livresque pour un lieu unique au monde. Je me baladais dans les rues tranquilles de Taormina quand je suis tombée sur une petite chapelle dont le cachet me révélait l'ancienneté. Je pénétrais dans cet antre dont le seul vis à vis me semblait stupéfiant : la mer s'étalait nonchalante derrière les hautes fenêtres. Mais, la surprise la plus notable éclatait sur les murs, couverts de livres. Ce lieu, béni des dieux siciliens, s'était transformé en... bibliothèque municipale. Une petite équipe de bibliothécaires protégeait avec amour les collections et leur savoir faire donnait une âme à cet espace insolite. J'éprouvais un bouquet d'émotions : amour des livres, admiration devant une chapelle aux murs peints de fresques religieuses, sentiment de plénitude avec la mer en surplomb. J'avais manqué ma vocation. J'aurais dû postuler à Taormina. J'ai demandé à la bibliothécaire : voulez-vous que j'anime un atelier de lecture ? J'avais décidé de changer de pays, de langue et de m'installer dans cette bibliothèque-chapelle, un lieu saint devenu laïque... La culture est décidément une cause sacrée ou une sacrée cause ! "

lundi 25 mars 2013

Rubrique Cinéma

Avec un temps gris et pluvieux sur la ville, j'ai préféré passer mon après-midi au cinéma. J'ai donc vu "La Religieuse" de Guillaume Nicloux, adaptée du roman de Denis Diderot. Dans les rôles des Mères Supérieures, j'ai retrouvé Louise Bourgoin et Isabelle Huppert. La comédienne qui joue la Religieuse se nomme Pauline Etienne. Tout le monde connaît cette histoire de jeune fille contrainte de rentrer au couvent. Ses deux sœurs se marient et les parents ont des difficultés financières pour "caser" la troisième. Le couvent reste la solution ultime pour Suzanne Simonin, très croyante par ailleurs. Sa mère lui confie aussi qu'elle a été conçue hors mariage. Elle supplie sa fille d'expier sa naissance. Elle intègre le couvent mais la vie austère et rude ne lui convient pas. Elle découvre vite que sa vocation est une imposture. Soutenue par une Mère Supérieure très généreuse, elle supporte la vie monacale. A la mort de cette Mère, commence la révolte de Suzanne contre l'application de nouvelles règles, imposée par la nouvelle Mère. Suzanne devient rebelle et les sœurs l'enferment dans une geôle. Elle parvient à écrire un journal intime qu'elle confie à une sœur amie. Devant son obstination et sa demande de liberté, un prêtre compréhensif l'envoie dans un couvent dirigé par une Mère Supérieure, qui va la choisir comme amie de cœur. Suzanne subit alors un harcèlement affectif avec stupeur. Un prêtre confesseur va comprendre sa situation et permettra sa libération. Ce film brosse un portrait d'une jeune fille au XVIIIème siècle, contrainte et forcée de se retirer du monde alors qu'elle voulait vivre sa vie en toute liberté. Denis Diderot avait une audace particulière pour dénoncer l'asservissement religieux. Ce beau film raconte le cheminement d'une jeune et belle personne vers sa propre vie.

vendredi 22 mars 2013

"Libération des écrivains"

Ce jeudi 21 mars, j'ai acheté mon Libé comme d'habitude pour lire le Cahier des Livres avec ses critiques souvent originales et décalées, sérieusement "décontractées". J'ai vu tout de suite que ce numéro était intitulé "Spécial, Libé des écrivains". Sur la première page, une photo emblématique : deux femmes pugnaces et rebelles, Virginie Despentes et Angela Davis, une écrivaine française sulfureusement féministe et une militante américaine, icône de la lutte anti-capitaliste dans son pays. Les articles sont écrits par une vingtaine d'écrivains, pas tous connus, mais reconnus dans le microcosme littéraire parisien. J'ai remarqué les signatures de Jérôme Ferrari, Thierry Beinstingel, Cécile Guilbert, Martin Page, etc. Les actualités décryptées par des écrivains prennent des couleurs, du relief, des odeurs même sur le papier... De la guerre au Mali à l'AQMI, de Sarkozy à Copé, de Hollande à sa compagne Valérie, de la place du tramway en ville jusqu'au village qui vote à 75 % FN, je remarque l'éclectisme des infos, le côté brouillon du journal, son ancrage à gauche, une gauche assez rouge d'ailleurs et nos écrivains renforcent cette tendance. Des mots que l'on a un peu oubliés renaissent sous la plume des journalistes amateurs : révolution, révolte, rébellion, indignation. Quand le journal confie son édito à Virginie Despentes, il n'est pas étonnant de lire des propos forts et justes dans la dénonciation d'une société mal en point. J'apprécie ce Libé annuel qui sort à l'occasion du Salon du Livre à Paris, rendez-vous incontournable pour tous les professionnels de la lecture : éditeurs, diffuseurs, libraires, sans oublier les auteurs, qui, avec leurs manuscrits édités, font le bonheur de millions de lecteurs !

jeudi 21 mars 2013

"Rideau"

En lisant le Monde des Livres du vendredi 8 février, la rubrique "Prière d'insérer" de Jean Birnbaum  évoquait un roman de Ludovic Zékian, "Rideau", édité chez Phébus. Je connaissais la mère de Ludovic Zékian, car elle était propriétaire de la Maison de la Presse à La Tour du Pin, où j'étais nommée comme responsable de la Médiathèque de cette petite ville du Nord-Isère. J'avais souvent de grandes conversations avec elle sur les livres, les revues et je prenais bien soin de lui réserver un budget mensuel assez conséquent pour pallier le manque à gagner que l'ouverture de la médiathèque allait provoquer. Elle m'avait confié sa fierté d'avoir un fils dont la réussite universitaire la flattait beaucoup, à juste titre. Son fils a donc écrit son premier roman, en grande partie autobiographique. Il révèle le rapport particulier que sa mère entretenait avec son "magasin", la Maison de la Presse, qu'elle a gérée avec une compétence professionnelle indéniable. Mais son investissement n'a pas suffi à garder son commerce ouvert. Elle a fini par renoncer et le fermer. Les lieux du livre et de la presse sont décidément fragiles et pourtant indispensables dans nos villes. Ludovic Zékian a écrit un bel hommage à sa mère, et à cette vocation-mission de "vendre" de l'information avec toutes les contraintes financières que cela suppose. J'ai retrouvé avec plaisir l'ambiance des années 95  à la Tour du Pin où ce commerce "culturel" tenait une place essentielle dans une petite ville, bien à l'écart dans le département malgré son titre de "sous-préfecture". Ce roman parle d'une époque révolue qui laisse un goût de nostalgie et la littérature me fait revivre ce passé si lointain et si proche aussi. Ce premier livre "turripinois" (les habitants se nomment ainsi) est vraiment une grande réussite.

mardi 19 mars 2013

"Programme sensible"

J'attendais beaucoup du dernier roman d'Anne-Marie Garat, "Programme sensible", car j'avais aimé sa trilogie "Dans la main du diable", "L'Enfant des ténèbres" et "Pense à demain", publiés chez Actes Sud. J'ai même acheté son livre dans la librairie "Actes sud" à Arles, lors de mon dernier périple en Provence pendant les vacances de février. J'ai retrouvé la fougue stylistique, sa plume vraiment particulière et unique dans son genre, un torrent de mots et de phrases. Le sujet du livre se veut "ultra-contemporain", l'éditeur le qualifiant même de "l'une des premières fictions qui invitent délibérément notre rapport contemporain aux nouvelles technologies". Jason, le personnage principal, est traducteur professionnel en free lance. Il a divorcé, se met en marge de la société et vit avec son ordinateur, seul compagnon fiable dans sa vie. Il est aussi obsédé par des souvenirs douloureux de sa mémoire enfantine quand il évoque une histoire obscure, un meurtre collectif de sa famille en Estonie, perpétré par une tante qui l'aurait emmené avec elle en France. La structure du roman repose sur son présent actuel et sur ce passé, plus fantasmé que réel. Anne-Marie Garat utilise aussi les sujets sociétaux avec la présence des sans-papiers, de réchauffement climatique, des camps de Roms, de pauvreté. J'apporterai dans ma critique un bémol concernant les délires "informatiques" de Jason qui alourdissent le texte et découragent un peu la lecture du roman. Mais, l'art de cette écrivaine ressemble à un volcan en éruption. Si vous aimez une littérature classique et sobre, il vaut mieux passer son chemin. Mais, si vous aimez une littérature épicée, "intranquille", apocalyptique, allez à la rencontre d'Anne-Marie Garat...

lundi 18 mars 2013

"Profanes"

Le dernier roman de Jeanne Benameur, "Profanes",  se lit avec un vif intérêt que j'avais déjà ressenti pour "Les insurrections singulières", paru en 2011 chez Actes Sud. La voix musicale douce et lancinante de cette écrivaine traverse le texte et envoûte littéralement le lecteur(trice). Le héros du roman se nomme Octave Lassalle, ancien chirurgien du cœur, âgé de 90 ans. Il recrute trois femmes et un homme pour l'assister dans sa vie quotidienne. Ces quatre accompagnateurs se partagent des horaires qui ne permettent pas la rencontre entre eux. Chacun vit une blessure, un accident de parcours. Marc Mazetti, farouchement solitaire, revient traumatisé par l'Afrique en guerre. Yolande Grange, seule aussi, adopte une maman célibataire qui attend un enfant.  Béatrice Benoît, l'élève infirmière, fuit son passé familial difficile et la dernière "pensionnaire", Hélène Avèle, la femme artiste est chargée de peindre le portrait de Claire, la fille unique d'Octave Lassalle, morte dans un accident de voiture à l'âge de 19 ans. Ce quintet de personnages et la force du sujet forment la trame romanesque du livre. Ils vont finir par se rencontrer et lier des liens avec le vieil homme. Octave Lassalle demandera à Hélène de partir au Canada pour rencontrer sa femme et déposer le portrait de Claire sur sa tombe. Le journal intime de Claire est retrouvé dans la cabane du jardin et pourrait révéler la raison de son accident. On pourrait craindre un certain pathos dans ce texte mais Jeanne Benameur évite ce piège en intégrant une dimension de "re-construction", de renaissance des êtres, abîmés par la vie, la mort, la maladie, la solitude, le manque d'argent, d'amour et de solidarité. Le titre "Profanes" se justifie par l'interrogation de l'écrivaine : comment se consoler des chagrins que la vie vous inflige sans l'aide de la foi, de la croyance en l'Au-delà, sans le sacré ?  C'est peut-être la relation aux autres qui donne une dimension spirituelle à l'existence de chacun. Je cite un extrait p.81 où elle évoque une librairie : "C'est un lieu où l'on se sent bien. A l'abri et en même temps prête à toutes les aventures intérieures. Bordée. Elle est venue se glisser là comme entre les pages d'un livre aimé. (...) Elle a besoin ce soir de s'appuyer à l'humanité discrète et forte de ceux qui lisent". Quand une écrivaine aime autant les librairies et certainement les bibliothèques comme elle l'écrit, je ne peux qu'éprouver un sentiment de connivence avec son œuvre et ressentir une solidarité empathique pour tous ceux qui lisent et qui écrivent...

vendredi 15 mars 2013

Rubrique cinéma

Le film d'Agnès Jaoui, "Au bout du conte" mérite vraiment le détour. Ces deux heures de cinéma français décalé et ironique possèdent un charme certain, ne serait-ce que dans l'évocation des contes, en particulier "Cendrillon", "Le petit Chaperon rouge", la pièce de théâtre interprétée par les enfants et Agnès Jaoui en fée bienveillante. Le film raconte les espérances des personnages : une jeune fille à la recherche du Prince charmant, un jeune homme compositeur qui croit en son talent, des adultes en mal de vivre, les séparations, les ruptures, les rêves écroulés, les chimères perdues. Jean-Pierre Bacri, en mal de père, fermé, cadenassé, va peu à peu soigner son angoisse de la mort en acceptant son fils. Le personnage d'Agnès Jaoui est au centre de l'intrigue et règle les problèmes des uns et des autres tout en affichant elle-même des problèmes avec sa petite fille et sa phobie de la conduite. Les scènes se suivent dans un rythme où la musique joue un grand rôle (ah, les cantates de Bach !). Tous les personnages présentent un travers, un défaut qui leur rend la vie difficile et la morale de l'histoire pourrait se résumer en quelques mots clés : courage, générosité, patience... On sourit, on rit même à des répliques de Bacri, et on se met aussi à réfléchir sur soi et sur les autres. Très bon film...

jeudi 14 mars 2013

Atelier d'écriture poétique (suite)

Le deuxième poème devait être inspiré par un tableau de Magritte, "L'empire des lumières" à la manière de Guillevic :
"Dessinez un arbre inconnu de vingt mètres de haut
posez une maison en arrière-plan
avec deux fenêtres ouvertes et éclairées à l'étage
et deux autres en rez-de-chaussée aux volets clos
Peignez un ciel bleu et des nuages blancs cotonneux
Disposez devant la maison un vieux réverbère
qui se reflète dans la rivière
En bas, il fait nuit,
En haut, il fait jour,
Enfin, le jour et la nuit
lumière naturelle
lumière artificielle
la réconciliation,
Magritte est heureux."

Dernier poème que j'ai écrit avec l'intégration de trois vers (en italiques) de Guillevic sur un arbre :
"Et si ce n'était que pure imagination ?
L'olivier m'attend sur la colline, adossé au ciel
qui pétille de chaleur
il vit depuis mille ans,
il vient d'Alicante et
ne donnant plus d'olives,
on l'a transplanté à côté du
Pont du Gard
Pourquoi renoncer à ce que j'étais ?
Il souffre de l'exil, mais
le Pont est devenu son compagnon,
deux fois son âge,
les siècles me narguent
Ensemble, nous rêvons
d'éternité."

mercredi 13 mars 2013

Atelier d'écriture poétique

Hier, mardi, nous étions une dizaine de participantes à l'atelier d'écriture, animé par Mylène. Elle a choisi un fil conducteur : la poésie. En effet du 13 mars au 24 mars, le Printemps des Poètes met à l'honneur Pablo Neruda, Aimé Césaire et Andrée Chédid. Après avoir lu un extrait de la préface, signée Stéphane Hessel dans son anthologie "O ma mémoire, ma nécessité", Mylène nous a proposé trois exercices sur la poésie : un poème de Neruda sur le printemps à base de cinq strophes sur deux lignes, un poème-tableau à la manière de Guillevic, un dernier poème dit "senton", utilisant quelques vers de Supervielle et de Guillevic. Voilà mon premier exercice :
Le printemps

Dans la douceur de l'air,
les hortensias dorment encore, traumatisés par le rude hiver,
vont-ils se réveiller ?

Dans la lumière du jour,
les perce-neige montrent leurs clochettes
vont-ils fleurir longtemps ?

Dans la quiétude du jardin,
le rouge-gorge sautille, innocent et naïf,
sait-t-il que le chat l'attend ?

Dans la promesse du printemps,
les forsythias explosent comme un soleil permanent,
sont-t-ils aussi jaunes la nuit ?

Dans l'esprit de renaissance,
vais-je enfin nettoyer les cendres
soucieuses de mon âme enfin apaisée ?

Prochain billet sur l'atelier, jeudi.

mardi 12 mars 2013

"A la lisière"

Cet ouvrage inclassable, de genre hybride est édité dans la très passionnante collection "Un endroit où aller" chez Actes sud. Ecrit par l'écrivain philosophe, François Poirié, il porte un titre suggestif : "A la lisière". Ce recueil de textes courts, un "essai sur dix thèmes délaissées" (sous-titre) aborde la Promesse, la Lassitude, la Dette, le Compliment, la Grossièreté, la Gêne, la Négligence, la Perte, l'Indécision, l'Enfance. Dans l'avant-propos, François Poirié qualifie cette tentative littéraire, de fragmentaire, née de réflexions, de pensées, issues "d'expériences personnelles et de lectures abondantes". Les sujets abordés ne sont pas analysés avec l'esprit austère de la philosophie officielle et institutionnelle. Les citations d'écrivains et de philosophes illustrent les chapitres et forment un "mélange" qui rend la lecture très agréable. Je ne peux pas résumer chaque thème, mais je peux m'arrêter sur un exemple : la lassitude. En un seul chapitre, il cite Mallarmé, Leiris, Beckett, Gontcharov, Hopper, Duras, Barthes, Michaux, Proust... Vertigineux ! Le charme du livre réside dans cette accumulation de références qui, au lieu de noyer le lecteur, le transporte dans la littérature, la philosophie, le cinéma, le théâtre, etc. Il conclut chaque chapitre par une réflexion personnelle : "C'est presque la nuit et nous sommes fatigués de tout, au bord de nous, en marge. Que se passe-t-il, précisément ? Nous ne savons pas le dire mais "cela" nous a envahis entièrement. Comme un évanouissement, une destruction silencieuse". Cet essai mérite une lecture silencieuse, concentrée et renouvelée... Il prendra place dans ma bibliothèque à côté de mes livres que je garde pour les relire.

lundi 11 mars 2013

Rubrique cinéma

J'aime les films politiques : celui que j'ai vu jeudi dernier, "NO" de Pablo Larrain, cinéaste chilien, évoque le référendum de 1988 au temps du dictateur Pinochet. Le personnage principal, interprété par Gael Garcia Bernal, travaille dans une agence de publicité, dont le directeur soutient la dictature, issue du coup d'Etat militaire du 11 septembre 1973. L'opposition de gauche choisit le jeune publicitaire pour illustrer le NON à l'appel du général Pinochet. Le pouvoir n'imagine pas une seule seconde qu'il perdra le référendum car il tient tous les médias. Les quinze minutes allouées au NON et au OUI vont rythmer les images, filmées "caméra au poing". La publicité va se mettre au service du changement politique et les idées de René vont transformer le Chili et provoquer dans le calme le retour de la démocratie. Au lieu de montrer le passé tragique du pays avec la chasse aux militants  et la présence constante de la torture, le clip parle d'espoir et de joie, sur une musique à clips. Il fallait un courage certain pour fabriquer ces quinze minutes sous la menace des sbires de Pinochet. Dans les années 70, les dictatures comme celles de Pinochet ou de Franco mobilisaient les militants de gauche qui soutenaient un très grand nombre de réfugiés chiliens en France. Le cinéaste emploie des archives mêlées à des passages fictifs dans une ambiance rétro, vintage. Ce film est d'une qualité indéniable, honnête, vraie. A voir, évidemment... Pour un événement historique peu connu et un hymne à la liberté et à la démocratie.

vendredi 8 mars 2013

8 mars, journée internationale des femmes

Cela fait plus de trente ans que les médias montrent les divers événements de la journée internationale des femmes. Cette "fête" annuelle revient comme un jour de mauvaise conscience et marque surtout la "défaite" d'un grand nombre de femmes sur la planète. La communauté européenne et américaine prône l'égalité des droits et des statuts, mais malheureusement, les femmes même en France sont davantage au chômage et subissent des écarts de salaire à travail égal. Elles sont victimes de viol,  de la violence conjugale, de la violence symbolique car traitées comme inférieures et "consommables" pour certains machos universels. Cette journée est quand même utile pour rappeler notre histoire pour l'égalité et la liberté.  Les 365 jours de l'année ne suffiraient pas à effacer toutes les discriminations et toutes les injustices subies. Heureusement, il existe encore des féministes, (et certains hommes aussi) qui luttent et militent pour améliorer la condition féminine. L'inégalité et l'infériorité des femmes se vivent dans beaucoup de pays. Alors, pour ne pas se désoler et se lamenter, il faut réagir, crier, s'indigner comme le disait Stéphane Hessel, et surtout se révolter. J'ai décidé de proposer des conseils féministes pour affronter tous les problèmes de société liés à la "féminité" : prenons le pouvoir politique pour changer le monde, luttons contre les clichés de la femme soumise, entraînons-nous aux arts martiaux pour circuler librement, arrêtons de tout sacrifier pour nos enfants et nos compagnons, ne vendons plus notre corps, soyons autonomes financièrement et pratiquons des métiers masculins, n'ayons plus peur de rien et surtout pas des hommes... Dans ce blog consacré aux livres et à la littérature, lisons des livres écrits par des femmes, et ce soir, il ne faut pas rater le beau portrait d'Antoinette Fouque, dans la  série Empreintes sur la 5, femme rebelle, psychanalyste et philosophe, une pionnière du MLF, côté psy et po...

jeudi 7 mars 2013

Hommage à Stéphane Hessel

J'ai regardé l'hommage de la République à Stéphane Hessel : cérémonie émouvante sans le côté trop souvent grandiloquent d'un événement chargé d'Histoire, écrasé d'honneurs. J'ai écouté les deux discours officiels et le poème d'Apollinaire lu par Carole Bouquet. Un grand résistant, ami de Stéphane Hessel, nous a relaté sa grande et belle vie que tout citoyen "éclairé" connaît à travers les nombreux articles de presse, les émissions de télé et les débats depuis trois ans. Ce contemporain, qui avait l'âge de mes parents, eux aussi disparus,  a connu la guerre de 39, la Résistance, Londres, les camps, la torture, la vie politique à gauche, la participation active à la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, l'accompagnement des "sans toit, sans papiers", des humbles, des perdants, des exclus, des pauvres. Cet homme indigné n'avait de cesse de plaider la cause des "cassés" de la vie, de ceux et de celles qui n'ont pas la chance de naître du "bon côté", pays, fortune, santé, etc. Son petit livre tiré à cinq millions d'exemplaires à travers le monde, "Indignez-vous", a frappé les jeunes de tous les pays et par conséquent, a peut-être permis l'arrivée de la gauche au pouvoir. S'indigner contre l'injustice reste et restera le credo de la gauche, de tous les gauches et doit être aussi la devise vraiment vécue de la république. Ce très charmant Monsieur donnait aussi une image du grand âge, loin des clichés sur la vieillesse, naufrage du corps et de l'esprit. Il était vif, alerte, piquant, anticonformiste et courageux. Il a aussi remis à la mode l'amour de la culture et de la poésie, car il pouvait réciter des centaines de poèmes. Loin de le ridiculiser, il affirmait sa passion avec une candeur désarmante. Je ne veux pas relever les polémiques sur ses engagements divers et mal perçus par certains. Je voulais rendre un simple hommage d'une citoyenne à un grand, très grand Monsieur qui va nous manquer...

mardi 5 mars 2013

Rubrique cinéma

J'ai enfin vu une comédie américaine romantique à souhait...Elle ressemble aux films des années d'avant, vous savez, les années du XXème siècle... "Happiness Therapy" de David O. Russell, comme son nom l'indique, évoque la maladie mentale, le mal-être, la différence. Le joli couple d'acteurs va finir par convaincre le spectateur que l'on peut guérir par l'amour et se débarrasser des démons intimes de son soi, attaqué et envahi par la violence, la tristesse mélancolique, l'autodestruction. Si en plus l'environnement social peu tolérant et une institution hospitalière quelque peu enfermante s'ajoutent à l'épreuve, ces hommes et ces femmes en souffrance se  marginalisent malgré eux.Le héros, Pat Solatano, a frappé l'amant de sa femme et il a ainsi perdu sa maison, son travail et son mariage. Il est obligé de vivre avec ses parents. Pat, l'agressif nerveux, ne peut pas se résigner à tourner la page et veut revoir sa compagne. Mais il rencontre une femme qui a, elle aussi, pris des chemins de traverse. Tiffany propose à Pat un challenge : l'aider à reconquérir sa femme et lui, en échange, doit participer à  un concours de danse. Une complicité va évidemment naître et la film bascule dans la romance d'amour. Le message du film affiche un optimisme "à l'américaine". On peut quelque fois lâcher prise et croire aux contes de fée... Les acteurs, Bradley Cooper, Jennifer Lawrence et Robert de Niro forment une équipe tonique, remuante, et fragile malgré tout. Un bon moment de détente, sans vulgarité avec un happy end attendu. Ce n'est pas un chef d'oeuvre du cinéma américain mais, la "maladie mentale" est souvent peu abordée  par les cinéastes, abordée, dirais-je, d'une façon humoristique, légère et grave à la fois.

lundi 4 mars 2013

"La part du feu"

Après une semaine de vacances, je reprends le clavier pour renouer avec le plaisir d'écrire et de rendre "compte". J'ai découvert le deuxième roman d'Hélène Gestern, "La part du feu", publié chez Arléa en 2012.  Le personnage principal se nomme Laurence, une jeune femme qui pratique un métier rare : codicologue à l'Institut d'histoire des manuscrits. Elle examine les écrits des écrivains : quelle chance de pratiquer un tel métier... Quand elle apprend par hasard que son père n'est pas son père biologique, elle comprend qu'elle doit enquêter sur ses origines. Ses recherches vont la conduire à un ancien compagnon de sa mère, Guillermo Zorgen, un militant d'extrême gauche des années 70. Il a fait de la prison à cause de son militantisme révolutionnaire qui prônait l'action violente. Un incendie d'un appartement a provoqué la mort d'une femme de ménage et cette action criminelle a stoppé les actes violents du groupuscule. Laurence va peu à peu rencontrer les hommes et les femmes qui connaissaient ce "Zorgen", amoureux de sa mère. Est-il son vrai père ? Pour vous donner envie de lire ce roman très intéressant sur cette période obscure d'une marge politique terroriste, je préfère laisser le lecteur(trice) découvrir le secret de la mère de Laurence... Roman attachant, surprenant, très bien construit et d'une écriture élégante...