jeudi 31 mai 2012

Festival du Premier Roman à Chambéry

Cela fait 25 ans que ce festival perdure : je suis souvent étonnée de voir des lecteurs à ce point fidéles pour vivre ce marathon littéraire depuis septembre jusqu'en mai tous les ans et je connais personnellement une lectrice qui s'investit avec un sérieux et une rigueur exemplaires. Lire des premiers romans et ce, depuis vingt cinq ans, mérite toute mon admiration... Je participe à un comité de lecteurs depuis dix ans, date de mon installation à Chambéry. J'ai vécu des moments souvent excitants dans le comité "Campus" de 2003 à 2010 à la Bibliothèque de l'université et j''ai rencontré des dizaines d'étudiants, plutôt des étudiantes à raison d'une quinzaine de rencontres par an qui aimaient lire, vraiment lire avec curiosité. En mai, j'animais les rencontres en invitant deux jeunes auteurs dans le hall de la BU. Depuis que j'ai pris ma retraite, j'ai continué à fréquenter ce groupe de lectrices, étudiantes et bibliothécaires, dans une ambiance fort sympathique. Cette année, nous avons rempli notre contrat de lectrices consciencieuses et motivées en lisant une vingtaine de premiers romans. Le Festival fête donc ses 25 années du jeudi 31 mai au dimanche 3 juin. Paradoxalement, je préfère la période de lectures suivies et commentées dans nos rendez-vous à la BU à ces quatre jours de représentation chapeautés par des élus locaux, des administrateurs du festival, des responsables de comités... et des auteurs invités, harassés par les rencontres avec les scolaires. Cette année, l'accent est mis aussi sur les premiers romans en Italie, en Espagne, en Roumanie, en Grande-Bretagne. Cette dimension européenne rend le festival plus moderne, plus contemporain et plus "chic" pour les journalistes parisiens. On est loin de l'ambiance des années précédentes, plus simple, plus conviviale et plus accessible. Je ne veux pas me montrer dubitative face à ce changement inéluctable. Les animateurs du Festival ont le mérite de mettre à l'honneur les premiers romans et de stimuler la lecture dans le milieu scolaire. Et il faut bien commencer à écrire un très bon premier roman pour poursuivre une "carrière" littéraire pendant de nombreuses années... Je me rendrai à deux rencontres pour retrouver des auteurs qui m'ont charmée avec leurs oeuvres. Je parle de Nicole Roland, d'Hélène Gestern et de Sophie Schulze.

mardi 29 mai 2012

"Je marche sous un ciel de traîne"

J'avais déjà parlé de cette écrivaine vraiment talentueuse avec l'obtention du prix Médicis en 2010, "La naissance d'un pont" que j'avais beaucoup appréciée. J'ai découvert par hasard son premier roman à la Médiathèque de Chambéry, paru en 2000 aux Editions Verticales, "Je marche sous un ciel de traîne". Ce roman porte déjà en lui la musique de Maylis de Kerangal avec l'utilisation d'un style travaillé, élégant et littéraire dans le bon sens du terme. D'emblée, les personnages intéressent le lecteur : Antoine Dezergues est dessinateur de monuments et il travaille pour l'Inventaire national. Il s'installe dans un village du Périgord et fait le connaissance d'un libraire au caractère bien trempé, Antoine Tabasque. Ce libraire présente à Antoine sa nièce à "problèmes", Claire. Ils deviennent amants et Antoine s'intègre peu à peu. Il tisse des liens amicaux avec le libraire et ses amis. Un secret dans le village va être révèlé à la fin du roman mais je ne le dévoilerai pas. Ce premier livre de Maylis de Kérangal possède des qualités indéniables qui ne laissent pas le lecteur indifférent : un style classique agréable à lire, des personnages bien campés, une histoire amoureuse, un secret enfoui depuis la Libération, une description de la vie en province non caricaturale. Je suis heureuse de constater que l'on peut encore lire des romans français bien écrits, construits sobrement sans bousculer les lecteurs. Je remarque l'évolution remarquable d'une écrivaine qui, en dix ans, a confirmé son entrée en littérature. J'attends son nouveau roman, je l'espère, pour la rentrée littéraire de septembre 2012.

lundi 28 mai 2012

"Tout ça pour quoi"

Quand on a du temps devant soi, on a envie de lire un gros bouquin de 500 pages. Je l'ai déniché dans une collection de littérature étrangère très honorable, aux Editions Belfond. Il s'agit du livre de l'américaine Lionel Shriver, "Tout ça pour quoi". paru en 2012. Pourtant, ce livre traite d'un sujet très grave et très douloureux : le cancer. C'est l'histoire de deux couples d'américains dans une Amérique consumériste et matérialiste. Pourtant, Shep Knacker ne rêve que de voyages lointains et exotiques pour fuir une vie de bureau étouffante. Son meilleur ami, Jackson, est dans une colère permanente contre l'Etat, les impôts, les turpitudes de ses contemporains, l'incompétence des fonctionnaires, etc. La femme de Shep est atteinte d'un cancer inguérissable et l'on sait qu'aux Etats-Unis, se soigner coûte très, très cher si on ne possède pas d'assurance convenable, aussi chère que les soins. Shep dispose d'un million de dollars après avoir vendu sa société de bricolage. Les économies fondent très vite et le cancer de sa femme s'aggrave. Dans ce roman, Shep est l'homme providentiel, celui qui paie toujours pour sa famille y compris pour son père et sa soeur. L'argent et la maladie changent les comportements des personnages. Les deux familles se soutiennent car les nombreux amis de Shep et de sa femme fuient tous la maladie de Glynis, la femme de Shep. Lionel Shriver dénonce l'emprise de l'argent dans la société, décrit avec une lucidité salutaire, le choc de la maladie dans un couple. La solidarité familiale et amicale atténue le désespoir de Shep. La fin du roman n'est pas surprenante car Shep perdra sa femme mais il lui offrira son dernier voyage en Afrique dans une île paradisiaque. Ces sujets pourtant essentiels dans la vie comme l'argent, la maladie, le couple sont traités franchement, avec un humour caustique. Malgré les accidents de la vie, il existe une renaissance possible... La littérature américaine nous offre souvent des grands romans de facture classique qui proposent des destins contrariés, des personnages attachants, des réflexions sur la vie d'aujourd'hui, une combinaison liitéraire très plaisante...

vendredi 25 mai 2012

Un peu de poésie

Un peu de poésie dans ce monde de brutes... De temps en temps, il faut ouvrir un livre de poèmes pour entendre une voix singulière, pour rencontrer un homme ou une femme qui porte un regard "différent" sur les choses, sur la vie, sur le fait d'être vivant, dans un quotidien parfois difficile. Et les mots atténuent souvent un sentiment de mélancolie face à la fuite du temps et aux soucis ordinaires que la vie peut parfois nous réserver... J'ai lu un poète-écrivain belge, Jean-Claude Pirotte, dont la musique douce et nostalgique enveloppe le lecteur. Je cite quelques vers de lui, tirés du recueil "Cette âme perdue" paru aux Editions du Castor Astral. "Dans les venelles du passé, pourquoi venelles pas ruelles et pourquoi pas les avenues les boulevards les autostrades Mais où circule le passé en vérité nul ne le sait ne resterait-il pas en rade près d'une île jamais connue Ou comme tant de caravelles "chargées d'or et de pierreries" depuis des siècles englouties ou ne serait-il qu'en avant de la mémoire ou hors du temps dzns une débâcle à venir dans une infinie bousculade où le réel n'est qu'un soupir." Voilà un poème sur le temps qui passe, à méditer...

mercredi 23 mai 2012

Portrait chinois

Vous pouvez jouer au portrait chinois pour donner une image de votre personnalité. Je propose dans ce billet mon portrait concernant mes goûts, mes plaisirs, mes rêves et mes envies. J'ai inventé évidemment les questions et j'ai essayé d'être sincère dans mes réponses... Si j'étais un continent, je serais l'Europe, évidemment, mon continent culturel préféré, étant une européenne convaincue. Un pays : l'Italie qui concentre 50 % du patrimoine culturel mondial... Une région : le Pays basque, mon pays natal qui a marqué profondément ma personnalité. Une ville : Venise, longtemps une ville fantasmée et encore plus belle dans la réalité. Une plage : la Madrague à Anglet, des baignades incomparables, un espace confortable en plein mois de juillet, Une montagne : la Croix du Nivolet à Chambéry, ma vue préférée de ma cuisine et de ma chambre, à peine 1500 mètres d'altitude et une croix de trente mètres pour nous protéger des catastrophes. Une rivière : l'Adour à Bayonne, mon fleuve de l'enfance et de mon adolescence. Un paysage : la mer, la mer, la mer, comme une cure de jouvence éternelle. Si j'étais une époque, je serais la Grèce antique et dans la peau d'une femme philosophe, essayant d'exister pour ma liberté et mon indépendance. Si j'étais un personnage historique, je serais une suffragette pour obtenir le droit de vote des femmes, la cause du féminisme est une cause essentielle pour moi. Si j'étais un objet culturel, je serais un livre, bien sûr... Si j'étais un objet ordinaire, je serais un joli verre pour accueillir un bon vin italien. Si j'étais une peinture, je serais un tableau de Vieira da Silva, ma chère Vieira qui a peint des bibliothèques, des livres, des étagères, un espace vertigineux de beauté intelligente. Si j'étais un film, je serais un Almodovar, son amour des autres et son identité follement espagnole me séduisent Si j'étais un livre, je serais "A la recherche du temps perdu" de Proust. Si j'étais une couleur : le rouge, un parfum : la lavande. Si j'étais un dessert : je serais un mille-feuille, la gourmandise incarnée, un fruit : une belle orange juteuse, une friandise : du touron basque. Si j'étais une fleur, sans hésitation un hortensia rouge. Si j'étais un animal, je serais une mouette pour planer sur les vagues. Si j'étais un arbre, je serais un olivier centenaire pour regarder le temps passer. Le portrait chinois pourrait contenir des dizaines de questions sans fin, je m'arrête à la trentaine, ce n'est déjà pas mal pour me présenter et décliner mes goûts...

lundi 21 mai 2012

"Mauvais genre"

Ce roman de Naomi Alderman, anglaise de naissance et américaine d'adoption, se lit avec intérêt malgré l'antipathie que le lecteur(trice) éprouve pour les personnages. On ne peut pas toujours ressentir une connivence empathique dans un univers romanesque. C'est particulièrement vrai pour le personnage principal, James Stieff, narrateur de l'histoire, qui étudie à Oxford, malgré des origines familiales modestes. Il va rencontrer dans cette université prestigieuse une bande de copains aussi déjantés les uns que les autres. Ils sont tous attirés par le plus riche d'entre eux, Mark, dans le rôle de l'homosexuel caricatural, consommateur d'amours éphèmères et charnelles en toute innocence. Il ne se doute pas encore du fléau qui va tomber sur cette communauté, le sida dans les années 80. Cet étudiant richissime achète l'amitié de ses copains, les héberge dans une vaste maison de maître. Il est un aimant-amant fascinant pour toute cette bande d'amis (filles et garçons) qui subisssent tout de même une pression intellectuelle permanente de la part des professeurs et de leur exigence hors-norme. Toute cette jeunesse "oxfordienne" étudie mais vit aussi des amours, des passions, des amitiés fondatrices. Mark, le héros négatif, va pourtant se marier avec la petite soeur d'un de ses amis. Il entretiendra aussi une relation amoureuse avec son meilleur copain, James, qui lui vit avec une compagne musicienne. Ce tourbillon amoureux est la marque de fabrique de ce deuxième roman de Naomi Alderman, une romancière anglo-américaine au talent romanesque évident. Ce livre a le mérite de nous plonger dans le milieu universitaire d'Oxford, décrit comme un monde sans pitié, cruel et pathétique. L'excellence intellectuelle ne se double pas toujours de l'excellence morale. Le personnage de l'amant secret, James, ira jusqu'au bout de cette relation sado-masochiste avec Mark et je ne donnerai pas la clé du roman pour vous donner envie de la découvrir...

vendredi 18 mai 2012

Voyage à Paris, suite

Quand j'ai traversé l'aile consacré à l'art antique de Rome, j'ai aperçu une vitrine où était exposé un codex d'un écolier romain. Un codex constitue la première forme du livre tel que l'on le connait aujourd'hui. Les Egyptiens, les Grecs et les Romains ont utilisé le rouleau de papyrus, puis le parchemin et le codex est arrivé à Rome. Le parchemin a traversé les siècles avant l'apparition du livre imprimé par Gutenberg. Quelle émotion pour moi de contempler ce codex âgé de deux mille ans ! La surveillante m'a même donné son accord pour que je le prenne en photo afin d'en conserver le souvenir. J'étais vraiment admirative devant ces tablettes en bois. Des exercices d'écriture étaient gravées à l'aide d'un stylet. Je voyais la main de cet enfant de Rome au-dessus de ces feuilles issues d'arbre couvertes de cire. Après la découverte de ce codex d'écolier romain, j'ai arpenté les salles consacrées à l'art égyptien avec l'exposition du "Livre des Morts", les statues de scribes, les calumets, les papyrus, les stèles gravées, tout un univers de l'écriture et de la pensée humaine... Je me sentais dans un monde privilégié où la civilisation naît grâce à l'écriture et à la transmission intellectuelle. Le Louvre est vraiment un des musées les plus riches au monde... Les livres m'accompagnent partout. Lors de mes balades à Saint-Michel, j'ai trouvé chez les bouquinistes des quais de la Seine, un Roland Barthes, "Incidences", deux ouvrages de l'éditeur Robert Morel que je collectionne, la "Célébration du fromage" et la "cuisine de l'ail" à des prix raisonnables (12 et 20 euros). Evidemment, j'ai acheté un guide du Louvre et une revue d'art sur le peintre vénitien Cima. J'aime conserver une trace de mes visites "muséales"... Paris reste malgré tout une ville du livre et de la culture, même si beaucoup de librairies ont disparu. De nouvelles s'installent et ainsi coule le fleuve de l'écriture dans une des plus belles villes du monde après... Venise !

jeudi 17 mai 2012

Voyage à Paris

Voyage rapide à Paris, deux jours, deux nuits et un maximum de balades et de visites culturelles. Je n'avais pas mis les pieds dans la capitale depuis au moins quinze ans... J'ai remarqué tout de suite la présence des vélos, très nombreux, des scooters, et aussi des voitures. Du bruit, beaucoup de bruit de circulation, un brouhaha incessant. Entre Venise et son silence-roi et Paris et son bruit fatigant, je préfère de loin le charme incomparable de la cité italienne. Evidemment, j'ai pris le métro qui, même le dimanche, est très fréquenté et nous étions tous serrés comme des sardines, expression populaire qui dit bien la cohabitation forcée. Les monuments n'ont pas changé de look : la Tour Effel, le Trocadéro, les ponts, les immeubles hausmanniens, le Centre Pompidou, etc. J'ai retrouvé avec plaisir les bouquinistes sur les quais, les librairies de livres d'occasion et même le marché du dimanche des livres anciens à Saint Michel. En deux jours, j'ai visité le Musée moderne de la ville de Paris dans le palais de Tokyo, le musée d'art moderne à Beaubourg et surtout une re-découverte du Louvre en quatre heures chrono le lundi matin. L'après-midi, balade dans le jardin du Luxembourg et visite de l'exposition d'un peintre vénitien, Cima. Quand on dispose de deux jours, il fallait "choisir" un parcours et j'ai concentré ces quelques heures à la peinture moderne et aux collections vraiment extraordinaires du Louvre, en arpentant deux ailes seulement, Denon et Richelieu, un concentré d'art que je n'avais pas fait depuis très longtemps. Malgré les milliers de visiteurs ce lundi, j'étais seule dans les salles de peinture flamande, hollandaise et du Nord de l'Europe. J'étais tranquille et admirative devant les Rembrandt, un Patinir, un Brueghel le Vieux, des natures mortes magnifiques... Il y avait une foule hystérique de touristes japonais devant la Joconde et la Vénus de Milo avec leurs multiples appareils de photographie. Avoir un souvenir de la Joconde à Paris comme un parfum Dior dans ses bagages... Et peu de monde aussi dans les nombreuses salles des Antiquités grecques et romaines. Je me suis retrouvée aussi devant le buste de César récupéré dans le Rhône en 2007 dans une exposition temporaire sur les découvertes récentes à Arles. Si vous allez à Paris, il faut vraiment se précipiter au Louvre pour voir cette exposition rare et originale. Je suppose qu'on la reverra dans son site originel dans le sud de la France. Je reviendrai sur la place des livres à Paris demain dans un nouveau billet.

jeudi 10 mai 2012

"Bilbao-New York-Bilbao

Ce roman, davantage un récit biographique, a été écrit par un écrivain basque, Kirmen Uribe, né à Ondarroa, petit port basque espagnol. Ce titre "Bilbao-New York-Bilbao" a attiré mon regard dans la librairie où je feuilletais les nouveautés. Ce premier roman a obtenu des prix littéraires en Espagne en 2008. Il m'est difficile de résumer un roman aussi atypique, aussi fragmenté, aussi original. Ce livre m'a particulièrement intéressée car je connais le Pays Basque côté Sud et j'ai retrouvé cette atmosphère maritime, propre à ce pays si mystérieux et si magique. Il évoque l'histoire des marins pêcheurs à travers les portraits de son père et de son grand père. Il raconte la vie rude et rustique qu'ils menaient, loin de leur famille. Ils s'embarquaient très loin des côtes à travers l'Océan Atlantique et en particulier vers l'Ecosse. Notre écrivain basque passe d'une recherche à une autre, tente de récréer la vie d'avant, ce passé aventureux des pêcheurs qui n'hésitaient pas à affronter les baleines... Ce roman biographique recèle des qualités incontestables en réconciliant la forme moderne de l'écriture avec un fond historique, sociologique et familial. Il utilise les messages électroniques, relate les rencontres avec des écrivains, évoque des rendez-vous avec des témoins de ce passé. Ce roman est un puzzle-mémoire fragmenté, opaque, une tentative réussie de rendre présent un passé à jamais disparu mais qui, grâce à la littérature, revient comme un boomerang dans la vie des lecteurs d'aujourd'hui... Un hommage de Kirmen Uribe à ses ancêtres pêcheurs basques et pour moi qui viens du Pays basque, un très grand plaisir de lecture.

mercredi 9 mai 2012

"Barbara"

Ce film n'est pas un hommage à la chanteuse Barbara. Il s'agit d'un film allemand de Christian Petzold qui raconte l'histoire d'une femme-médecin, Barbara Wolf, en Allemagne de l'Est avant la chute du Mur de Berlin. Elle a été récemmnent mutée dans un hôpital de province au bord de la mer après un séjour en prison à Berlin et elle est constamment surveillée par un agent de la Stasi. En fait, on la voit peu à peu écartelée entre son projet de fuite en Allemagne de l'Ouest (elle est aidée par son amant de l'Ouest) et son engagement professionnel à l'hôpital. Elle s'intègre peu à peu dans l'équipe médicale grâce à un collègue, un chirurgien exerçant son métier avec compassion et empathie. Elle vient en aide à une jeune fille qui s'est enfuie d'un camp de travail et cette relation va changer son destin programmé. Ce très beau film sur la vie d'une femme en Allemagne de l'Est dans les années 80 ne peut que toucher le spectateur. Le rythme lent, pesant, austère du film retrace bien la monotonie et l'ennui dens ce pays communiste, la RDA, le sentiment d'être espionné, l'enfermement derrière un mur, une atmosphère glaçante de pays totalitaire. Pourtant, Barbara va éprouver un amour naissant pour son collègue et elle permettra à la jeune fille de s'échapper, lui offrant définitivement sa place pour rejoindre l'Ouest. Classique dans la forme, ce film se déroule lentement jusqu'au renoncement final, geste sacrificiel magnifique pour sauver cette jeune fille du camp de travail. Le cinéma européen s'honore d'évoquer le poids de l'Histoire dans la vie des individus. Pendant deux heures, j'ai vécu en Allemagne de l'Est, et je vous assure que la liberté et la démocratie sont des valeurs précieuses et que l'on devrait savourer chaque jour...

mardi 8 mai 2012

Atelier d'écriture, "la table géante"

Vendredi dernier, j'ai participé à l'atelier d'écriture. La consigne consistait à élaborer un texte sous forme de poésie, si possible, en partant d'une photo montrant une table avec des convives dans un grand champ à la campagne. Mylène avait choisi un poème d'Apollinaire pour que chaque participante ressente une émotion "poétique". Nous avons noté dix mots chacune, puis nous avons tiré sept mots au sort avec l'obligation de les utiliser dans un texte. Voilà les mots tirés au sort : convivialité, repas de famille, voisins, gourmandises, parenthèses, hymne à la joie, se rencontrer. Et voici le texte que j'ai composé : "La table géante, Il n'y a que des voisins de ce quartier, toutes générations confondues. Ils se rencontrent enfin. La table est longue, très longue. La nappe est blanche, très blanche. Dans un chemin de campagne, loin du bruit, de la ville, de l'agitation. Une parenthèse paisible, un moment de convivialité aimable. Ils fêtent la gourmandise, la vraie gourmandise de vivre. En ces temps de solitude, de repli sur soi, de course à l'argent, ils osent se mettre autour d'une table. Du bon vin rouge dans les verres, de la charcuterie, des rôtis froids, des tartes aux fruits. Aujourd'hui, pas de portable qui sonne, pas de console qui couine, la parole circule, les regards s'enroulent, les oreilles écoutent. Ce jour de retrouvailles comme dans un repas de famille élargie pourrait devenir un cauchemar : Tiens, voici Nicole et son chien aboyeur de nuit, Tiens, voici le jeune Arthur et sa musique horrible, Tiens, voici pépé Jo et son avis sur tout, Tiens, voici Colette et sa jalousie perpétuelle. Chacun s'efforce de gommer ses tourments. Aujourd'hui, c'est le jour-soleil, le jour-bonheur, d'être ensemble. Oubli de soi et ouverture aux autres. Le retour d'un hymne à la joie, le retour d'un hymne à la vie. Peut-être..."

lundi 7 mai 2012

"Les vieux chats"

Je suis allée au cinéma hier pour patienter car il fallait attendre le nom du nouveau Président et j'avoue que ce résultat m'a bien fait plaisir bien que la gestion du pays dans cette crise demandera beaucoup de perspicacité et de courage... Donc, j'ai vu un film chilien, rare sur les écrans français, "los gatos viejos ou les vieux chats" de Sebastian Silva et Pedro Peirano. Une femme, Isadora, très âgée, commence à perdre la tête. Elle vit avec Enrique, son compagnon, dans un appartement bourgeois de Santiago de Chili. Sa fille Rosario lui rend visite et lui annonce qu'elle veut récupérer l'appartement, dont elle a hérité en partie. Cette fille revendique cet héritage comme une marque d'amour. Le film tourne autour de la relation mère-fille. La fille ne se sent pas aimer de sa mère et sa mère se méfie de sa fille prédatrice et quelque peu agitée. La relation de sa fille avec une compagne n'arrange rien à l'affaire. Pour aimer ce film, il faut apprécier les ambiances intimistes, les conflits familiaux, l'étude délicate du naufrage de la vieillesse, la perte de l'autonomie. La mère souffre d'absences récurrentes. Elle ne veut pas signer ce contrat pour vendre l'appartement. Mais une fugue va provoquer un changement d'attitude chez la mère qui va enfin comprendre sa fille en demande d'amour non assouvie. Il faut surtout saluer la performance formidable de l'actrice principale qui interprète à la perfection le désarroi d'une femme âgée et amoindrie face à son enfant adulte sans repères et qui, au lieu de prendre soin de cette fille malheureuse, préfère ses vieux chats, source d'amour et de quiétude...

dimanche 6 mai 2012

Revue de presse

En attendant le nom du Nouveau Président de la République, je feuillette les revues mensuelles de mai. Le Magazine littéraire propose un dossier très riche sur "le polar aujourd'hui" : Ellroy, Mankell, Meyer, Despentes, Manotti, etc. On retrouve les rubriques habituelles sur les nouveautés ainsi qu'un entretien avec Michael Connelly. La revue Lire a choisi d'évoquer la période du Moyen Age dans la littérature avec la liste des dix oeuvres incontournables et un article sur la fascination des romanciers pour cette époque. La revue Philosophie Magazine que j'achète en fonction des thèmes abordés a traité ce mois-ci d'un sujet sensible à mes yeux : "Les femmes sont-elles plus morales que les hommes ?". Le philosophe étudié ce mois-ci est Epictète. Je conseille aussi à tous les lycéens qui passent l'épreuve philosophique un hors-série de la revue Sciences Humaines avec le titre suivant : "La philosophie en quatre questions, Que puis-je connaître ? Que dois-je faire ? Que puis-je espèrer ? Qu'est-ce que l'homme ?". Ces temps d'élections présidentielles sont propices à la lecture de journaux et d'hebdos pour se forger une opinion même si je reste fondamentalement attachée aux valeurs républicaines et je crois que la gauche représente mieux les notions de liberté, d'égalité, de justice et de fraternité. Je pense à ma mère qui a toute sa vie voté à gauche pour les socialistes respectant unee tradition familiale car mon grand-père votait lui aussi socialiste et gaulliste (car il était sous-officier dans l'armée française et vouait un culte de militaire au Général). La soirée semble nous réserver la bonne nouvelle, celle de l'alternance politique. J'espère que les cinq ans à venir seront plus paisibles, plus simples, plus justes et plus fraternelles...

jeudi 3 mai 2012

Un petit livre à méditer

J'ai trouvé en librairie un tout petit livre (13,5x10) de Fabienne Yvert, "Y en a marre d'être pauvre" aux Editions des Petits Livres, maison inconnue à mes yeux. Comme je suis une lectrice curieuse et recherchant l'originalité, je l'ai acheté pour dix euros. C'est un petit cahier tout simple, tout modeste avec une écriture en encre rouge pour alerter le lecteur(trice) sur la pauvreté vécue au quotidien, mieux, la précarité existentielle. La fatigue de Fabienne Yvert est palpable dans le texte pour se maintenir économiquement en "vie". Elle relate à partir de toutes petites phrases, sa colère, ses difficultés financières, son combat sans fin pour survivre dans une société dure et impitoyable pour les "artistes", ceux qui ne se conforment pas au modèle social dominant du "marche ou crève" et qui résistent à l'ambiance de toujours plus d'argent au détriment d'un certain partage. Elle raconte avec pudeur et délicatesse son quotidien : "Toujours compter, regarder, surveiller, s'angoisser". Plus loin, elle parsème ses pages de maximes pleines d'esprit de lutte et d'espoir de vivre. Ce petit livre est un bréviaire de résistance de la part d'une insoumise. Encore une femme-courage comme Annie Ernaux dans mon billet de mercredi, un art du courage pour affronter les difficultés de la vie sur un plan financier. "Y en a marre" d'être pauvre en France surtout pour toutes les femmes seules et sans soutien familial. J'avais acquis il y a quelques mois un ouvrage de Fabienne Yvert, "Téléscopages", que je n'ai pas encore eu le temps de découvrir mais ce petit livre tout simple, sincère et authentique me conforte dans un élan de solidarité envers tous ceux et surtout toutes celles qui "rament" comme elle l'écrit. La sécurité matérielle devrait intégrer la liste des "droits de l'homme et du citoyen"... Mais, on est encore loin, très loin de cette utopie...

mercredi 2 mai 2012

Annie Ernaux, écrivaine engagée

J'ai remarqué la colère d'Annie Ernaux dans "Le Monde" du dimanche 29 avril, "1er-Mai, alerte à l'imposture". Son article intégré dans la rubrique Décryptages Débats me semble opportun pour cette fête du Premier Mai. Nous savons que notre Président a voulu célébrer le "vrai travail", sous-entendu, le travail des entrepreneurs, des commerçants, des salariés du privé, des professions libérales, de tous ceux qui ne sont pas des fonctionnaires parasites, des salariés syndiqués, des chômeurs paresseux, et de bien d'autres travailleurs de l'ombre... Je suis pourtant prudente en ce qui concerne les opinions politiques et même, j'essaie de comprendre l'angoisse des hommes et des femmes qui ont peur de tout perdre : leur pouvoir d'achat, leur identité nationale, leur travail à cause de la mondialisation et de la crise... Mais, là, stop, le premier Mai appartient à tous les travailleurs, du privé comme du public, des actifs comme des retraités... NS clive trop les Français et je cite Annie Ernaux : "Gourverner, c'est diviser. Depuis 2007, il n'a eu de cesse de créer, d'inventer, par son discours, deux catégories de citoyens, dont l'une est désignée comme responsable des problèmes de l'autre, qu'elle menace sourdement. Ces catégories sont mouvantes, mais toujours tranchées, Français/immigrés, travailleurs/assistés, gens honnêtes/délinquants, victimes...". On regrette aujourd'hui les valeurs humanistes de notre ancien Président... La fin de l'article nous éclaire encore plus sur le choix à faire dimanche : "Il faut casser cet imaginaire de suspicion et de haine qui empoisonne le pays, mais cela ne se fera qu'en engageant la lutte pour un partage des richesses, l'égalité dans l'éducation, l'accès aux soins, à la culture, des conditions de vie meilleures pour tous. Pour une République sociale." Quel dommage qu'Annie Ernaux ne se soit pas présentée aux présidentielles... Le premier Mai est un "lieu de mémoire" sacré pour les syndicats et tous les travailleurs y compris pour ceux qui voudraient bien travailler. Un article écrit par cette femme-courage vaut mille discours politiques. La littérature, représentée par Annie Ernaux, nous donne une leçon de démocratie et de générosité...