jeudi 2 juillet 2020

"Les femmes de"

Catarina Bonvicini vient de publier son quatrième roman, "Les femmes de" chez Gallimard dans la collection "Du Monde entier". Sept femmes de 16 à 89 ans se réunissent pour le repas de Noël. Elles attendent leur Vittorio qui tarde à venir. Le repas démarre sans lui. Toutes ces femmes aiment cet homme invisible : sa mère, sa sœur, ses deux femmes (l'ancienne et l'actuelle), ses deux filles (des deux mères différentes), sa toute dernière jeune maîtresse. Un message arrive sur le portable de la grand-mère : "Excusez-moi. J'ai besoin de prendre une année sabbatique loin de mon travail et de ma vie". Sa disparition subite et brutale reste incompréhensible aux yeux de ces femmes qui l'adulent peut-être un peu trop. Les sept protagonistes se relaient pour raconter leur lien avec Vittorio. Ses deux filles très différentes règlent leurs comptes. L'une est chauffeur de taxi et vit une existence marginale. La cadette ne pense qu'à flirter avec ses copains. La sœur de Vittorio se plaint sans cesse car son mari s'est suicidé. L'ex-femme, romancière comme lui, tient un journal. C'est grâce à elle qu'il a connu le succès littéraire. La mère de Vittorio monologue à voix haute pour critiquer ses belles-filles. Elle est elle-même une architecte d'intérieur et crée des meubles très design. La jeune maîtresse se demande ce qu'elle fait dans cette réunion familiale. Elle résume la situation des conquêtes féminines de Vittorio : "Ada l'a épousé quand il n'était qu'un étudiant, Cristina le lui a volé dès qu'il est devenu célèbre et tu l'as récupéré quand il est tombé en disgrâce". Une année passe après cette soirée de Noël et revoilà notre Vittorio qui prend enfin la parole pour dévoiler sa vérité. Cette comédie bourgeoise, italienne et milanaise se lit avec un grand plaisir. L'écrivaine travaille chaque point de vue des personnages et ce roman choral donne une image ironique d'une société soumise aux clichés. Chacune d'entre elles retrouve une certaine autonomie et Vittorio va pouvoir enfin vivre librement. Je ne dévoilerai pas la raison de son escapade… Ce roman élégant, d'une italianité délicieuse, se joue de l'hypocrisie et du mensonge… Une comédie mordante à découvrir.