jeudi 18 juillet 2019

"Un été avec Paul Valéry"

Chaque exemplaire de la collection "Un été avec" devient un rendez-vous bien sympathique une fois par an. Cette publication est tirée d'une série d'émissions diffusées sur France Inter. Plusieurs volumes ont été proposés à la rencontre de Montaigne, Proust, Baudelaire, Hugo, Machiavel, Homère. Cette année, c'est au tour de Paul Valéry, raconté par Régis Debray. Quand il était prisonnier dans une geôle en Bolivie, il y a cinquante ans, il se souvenait de quelques vers du "Cimetière marin" : "Un morceau de langue française, que je ne pratiquais plus guère. Etrange remontée de sève." Paul Valéry intimide généralement les lecteurs(trices) et demeure encore aujourd'hui un écrivain peu connu du grand public malgré son immense réputation littéraire. Pas un titre ne viendrait à la mémoire des amateurs à part ses poèmes et son "Monsieur Teste". Pourtant, cet Académicien, "du genre noble et barbant", couvert d'honneurs, penseur hybride, philosophe sans titre,  n'intéresse pas le biographe. Il choisit surtout le côté "lanceur d'alerte" avec son essai sur le monde de son époque, "Regards sur le monde actuel", publié en 1931 qui devrait être inscrit comme lecture obligatoire à tous les futurs énarques. Il propose un anti-portrait en jouant sur la dualité de Paul Valéry, oscillant entre l'aspect marmoréen de sa vie officielle littéraire et le côté frondeur de sa vie privée. Ce petit livre révèle des épisodes de sa vie amoureuse en particulier avec Catherine Pozzi et Jeanne Loviton. Antidreyfusard dans sa jeunesse, il fit l'éloge d'Henri Bergson pendant l'Occupation. Jean Moulin avait songé à Paul Valéry pour devenir Président de la République. Il aura des funérailles nationales, ordonnées par le Général de Gaulle. Ce "pur esprit" aimait le sport, la natation surtout et vouait un culte à la mer Méditerranée, lui, le natif de Sète. Régis Debray le définit ainsi : "Il sut rendre l'abstrait velouté et l'idée pure sensuelle et sensorielle". Un bel hommage écrit d'une façon vive et piquante. Il donne envie de découvrir ses poèmes et surtout ses essais. Je me souviens de ma visite au cimetière de Sète il y a de nombreuses années. Un monsieur m'avait demandé s'il pouvait me renseigner. Je lui ai dit que je cherchais la tombe de Paul Valéry mais, il ne connaissait pas ce "défunt"... J'ai fini par trouver sa tombe et sur la pierre sont inscrits ces vers : "La mer, la mer toujours recommencée/ O récompense après une pensée/ Qu'un long regard sur le calme des dieux".