mercredi 8 juin 2016

"On ne meurt pas de chagrin"

Ce texte autobiographique du philosophe biarrot, Frédéric Schiffter, m'a beaucoup intéressée. Je connais un peu son œuvre, qualifiée parfois de dilettante, de superficielle ou de décalée... J'aime bien les solitaires de la philosophie moderne qui font penser à des moralistes du XVIIIe siècle. Ils ne font pas partie d'une école de pensée ou d'une obédience quelconque. Il n'intervient pas dans les médias comme certains d'entre eux. Je me souviens de son "Sur le blabla et le chichi des philosophes", "Le charme des penseurs tristes", le "Dictionnaire de la philosophie" où l'essayiste se moque de son collègue Onfray qui se prend vraiment trop au sérieux. J'ai aussi une envie supplémentaire de lire Schiffter pour la bonne raison qu'il raconte sa ville d'adoption, Biarritz dont je suis originaire. Ce dernier ouvrage est une lettre qu'il adresse à son père, décédé brutalement en 1966 quand le petit Frédéric avait dix ans. Sa mère devient alors la "femme de sa vie". L'auteur évoque l'absence de ce père qu'il a, au fond, peu connu. Il tente de retrouver les traces ténues et mystérieuses de la figure paternelle. En prenant comme sujet principal la disparition de son géniteur, il raconte l'histoire familiale, la rencontre de ses parents, leur couple bancal, leur séparation et la fin de leur vie commune dans une France des années 60 et 70. Il nous dresse aussi un portrait attachant de sa personnalité, de ses amours comme de ses désamours... Il aime aussi le surf, ce qui est peu banal pour un philosophe. Mais à Biarritz, surfer et philosopher vont bien ensemble ! J'ai retrouvé avec plaisir le charme suranné de la Place Clémenceau, du magasin Biarritz-bonheur dans lequel j'ai vécu des moments cocasses avec ma mère, hélas, disparue. Je me sentais un peu chez moi dans cet ouvrage qui me rappelait tant ma jeunesse. Ce récit autobiographique n'est en aucun cas jalonné de concepts philosophiques, ni de vocabulaire spécialisé. Frédéric Schiffter a voulu démontrer que le chagrin peut être surmonté peut-être à l'aide de la philosophie. Il a survécu à la perte d'un père trop absent et à l'étouffement d'une mère trop présente... Je le connaissais plutôt ironique, voire cynique. Sa confession intime sur son passé familial reste sobre et pudique. Peut-être que je rencontrerai Frédéric Schiffter dans ma belle ville basque au sommet d'une vague sur sa planche un jour prochain...