mardi 25 octobre 2022

"Le monde d'hier, souvenirs d'un Européen", Stefan Zweig, 1

 Dans chacune de mes escapades, j'emporte dans ma valise un livre accompagnateur. Pour Vienne, j'ai choisi "Le monde d'hier" de Stefan Zweig. J'avais aussi lu un beau livre sur lui qui retrace sa vie dans cette capitale si riche culturellement. Mon séjour s'est trouvé ainsi rythmé par les phrases de cet ample autobiographie intellectuelle et historique. L'écrivain autrichien entame la rédaction de ce texte en 1934 quand, face à la montée du nazisme, il s'enfuit en Angleterre. Plus tard, il s'exile au Brésil et poursuit sa démarche autobiographique sans documentation, ni papiers personnels. Il poste le manuscrit à son éditeur un jour avant son suicide. Sa jeune épouse l'accompagne dans sa mort. Considéré comme son testament littéraire, "Le monde d'hier" révèle un monde d'avant 1914, assez insouciant, stable, paisible, traditionnel à l'apogée de sa civilisation. Témoin direct d'une Vienne en effervescence intellectuelle, il fréquente Freud, Verhaeren, Rilke et Valéry. Romain Rolland devient son ami de référence. Il décrit aussi l'effondrement des monarchies entre les deux guerres. A cette époque, le progrès technique change la société avec la voiture, le téléphone, l'électricité. Parfois, il revient sur sa propre famille car son père, originaire de Moravie, établit sa fortune dans une usine de textile. Sa mère, d'origine italienne, appartient à la bonne bourgeoisie juive cosmopolite. L'éducation exemplaire de l'écrivain en littérature, en musique et en langues étrangères prépare le jeune Stefan à une carrière littéraire, encouragée par ses parents. La vie culturelle de Vienne n'avait aucun secret pour lui et il fréquentait assidument les théâtres, les salles d'opéra, les bibliothèques et les cafés. Cette appétence incessante pour la culture se lit à chaque page et cet idéal quasi platonicien, il le vivra avec une intensité communicative. Son Europe resplendit et brille de tous ces feux avant l'Apocalypse nazi. Il parle plusieurs langues, maîtrise le grec et le latin, se sent citoyen du monde et il aime par-dessus tout la littérature. Son dernier livre offre une mosaïque extraordinaire d'histoires intimes et d'événements historiques. Il évoque l'éducation trop corsetée des lycées et la méfiance des adultes envers la jeunesse. Ami de Freud, l'auteur parle avec franchise de la sexualité, un sujet tabou dans la société autrichienne. Il sait déjà que les frustrations entraînent de graves dysfonctionnements dans les comportements humains. La modernité de Zweig se développe amplement dans ses œuvres qui, à la naissance du nazisme dès les années 30 ont été brûlées dans des autodafés en Allemagne ainsi que celles de Freud. Jeune étudiant, il poursuit des études de philosophie mais sa grande "affaire", c'est l'écriture et la publication de ses poèmes dans une revue littéraire. (La suite, demain)