lundi 11 avril 2022

Venise, la Place San Marco

 Dès mon arrivée, j'ai revu le cœur de Venise avec l'affluence habituelle des touristes toujours très nombreux sur la place stratégique de San Marco. Une balade à Venise en plein air se transforme vite en parcours muséal entre le Palais des Doges, le Campanile, l'Horloge et la Basilique. Autour de moi, des statues sur les toits des monuments, le lion ailé de Saint Marc, les gondoles à quai et les pilots en bois. Un panorama grandiose et familier s'offre à tous les regards émerveillés. Il vaut mieux se retrouver tôt le matin ou tard le soir pour apprécier cette place car les touristes de passage s'éparpillent comme des pigeons quand tombe la nuit. Ma première visite du samedi s'est donc déroulée dans le Palais des Doges, de style gothique et Renaissance, construit en 1340 et achevé en 1366. Il faut absolument s'intéresser à l'histoire de la République vénitienne pour comprendre la puissance politique conquérante de la cité pendant des siècles. Les salles monumentales se traversent avec les yeux aux plafonds somptueusement décorés de fresques. Le tableau le plus remarquable a été peint par Le Tintoret, "Le Paradis". Une foule incroyable de personnages en état d'apesanteur s'étale sur une fresque murale de 25m sur 10m. On se croirait plus en enfer qu'au paradis et cette impression saisissante découle du nombre considérable des personnages illuminés par la foi. Mais, en pénétrant dans la "Sala dello Scrutinio", changement total de siècle avec Anselm Kiefer avec ses toiles gigantesques qui occupaient les parois de deux salles. L'installation est liée aux célébrations du 1600e anniversaire de la fondation de Venise. Le plasticien allemand a proposé ses œuvres sous l'égide d'un philosophe vénitien, Andrea Emo : "Ces écrits, lorsqu'ils seront brûlés, donneront enfin un peu de lumière". L'artiste allemand rappelle l'incendie qui a touché le Palais des Doges en 1577. Des livres brulés surgissent du premier tableau composé de tiges de bois sur un fond gris. Les autres tableaux monumentaux montrent le destin de Venise entre guerres et conquêtes, forces et fragilités, allégresse et angoisse, une métaphore de l'aventure humaine. J'ai tellement été subjuguée par cette exposition que je l'ai revue une deuxième fois pour décrypter les nombreux messages de l'artiste. L'art crépusculaire d'Anselm Kiefer se situe dans une dimension spirituelle et métaphysique qu'il est parfois difficile de comprendre. Après ces toiles saisissantes, j'ai traversé les prisons du Palais appelées les plombs. Casanova a été détenu dans cet endroit lugubre et s'évada de cet enfer. Quand je suis sortie du Palais des Doges, j'ai remarqué l'escalier avec deux statues géantes. Après tant de trésors artistiques, une balade dans le quartier San Marco a conduit mes pas vers des églises ouvertes. Et à Venise, les églises sont aussi des musées !