jeudi 3 janvier 2013

"Un héros"

Règlement de compte en famille : voilà le résumé du "roman" de Félicité Herzog, une autobiographie romancée terrifiante par son contenu sans aucune concession. L'amour familial, la solidarité, l'empathie ne font pas partie du vocabulaire de Félicité Herzog. Ce livre bouscule le lecteur(trice), ne le ménage pas, le met souvent mal à l'aise mais c'est le rôle de la littérature, des mots, du langage, de favoriser cette libération de la parole, de la pensée, du ressenti. Notre écrivaine possède un talent hors du commun pour nous camper dans un paysage français du siècle passé des personnages détestables : son père en tout premier plan. Pour sa fille issue d'un premier mariage, son père est un menteur, imposteur, séducteur addict au sexe. Elle évoque donc l'alpiniste, héros des années 50, à l'assaut de l'Annapurna, Maurice Herzog, décédé en décembre. L'homme mène deux vies :  l'une officielle, en tant que Ministre du Général de Gaulle, l'autre privé, en père absent, indifférent, non aimant, un homme complexe et secret. Pourtant, le héros du livre n'est pas le père, personnage ampoulé et orgueilleux, abordé dans la première partie du livre. Félicité Herzog rend surtout un hommage d'amour fraternel pour son frère Laurent, fragile, perdu, pris dans la toile glauque des troubles de la personnalité. Il finira par de plus supporter son état et se suicidera. Ce livre, malgré le destin fracassé de Laurent, ressemble à une longue confession douloureuse suivie d'une phase d' apaisement dû à l'écriture de ce  récit  minéral, froid, désert. J'ai rarement lu un témoignage aussi dense, aussi dur sur une famille française issue d'un milieu ultra-privilégié de la grande, très grande aristocratie française...