mardi 7 avril 2020

Présence animalière

Samedi, j'ai vécu un moment de joie inattendue dans ma petite balade de santé quotidienne où je ne croise quasiment personne. Dans un champ, situé au bord de la rue Saint-Ombre, se devinait une forme blanche, comme un oiseau bien connu de ma part : une aigrette ! Elle s'était donc égarée dans mon quartier et déambulait près des chevaux. Je l'ai observée quelques minutes. Elle s'est envolée et s'est posée encore plus près de moi. Je l'ai reconnue : c'était mon aigrette des Mottets qui devait s'ennuyer toute seule dans son étang. Un événement rare car voler aussi loin du lac (10 kilomètres) me semble un heureux hasard. J'accepte mon confinement avec philosophie par peur d'attraper ce virus et de le passer aux autres. Ma nostalgie s'est ravivée en rencontrant cet oiseau que je remarque souvent dans les roselières du Viviers du Lac. Ah, ce lac qui est si près de moi et si loin aussi… L'aigrette voulait me saluer et avouait que les humains lui manquaient. Le regard sur les animaux a un peu changé ces temps-ci. Dans le jardin, j'ai remarqué le retour des merles, des pies et de quelques moineaux sans oublier les papillons et les lézards. Les chats traversent le jardin avec leur morgue habituelle. La vie animale reprend ses droits et on a même aperçu un sanglier à Barcelone, des biches et des cerfs dans des contrées urbaines. Je lis régulièrement le journal tonique de confinement d'Eric Chevillard, "Sine die" dans le journal, "Le Monde". Ses propos cocasses, farfelus et souvent bien sentis arrivent à me faire sourire. Il faut savoir de temps en temps prendre du recul devant cette bombe sanitaire imprévue. Il écrit dans sa dixième rubrique : "C'est l'homme à présent qui se fait remarquer par son absence. La poussée des sèves et des racines irrésistiblement ébranle nos constructions les plus arrogantes. Hier, l'Arc de triomphe s'est couché. La Joconde est coiffée d'une couronne de liseron". Les herbes folles commencent à envahir nos petites rues. La nature reprend ses droits. J'ai vu Venise vidée de ses habitants et les cygnes sont revenus glissant sur une eau transparente. Je pense à tous ces paysages urbains et naturels qui, depuis l'arrivée du virus, ont perdu la présence des habitants et des touristes. Si les plages, les montagnes, les fleuves, les rivières pouvaient parler, ces lieux nous remercieraient de les avoir un peu désertés pour quelques jours, pour leur permettre de souffler, de retrouver leur identité d'origine, un retour aux sources. Cela ne va pas durer et les humains reviendront vite envahir sans modération ces espaces naturels. Mais allons-nous retenir cette leçon : la promiscuité s'avère dangereuse ? Quand je pense à ces gigantesques métropoles d'Asie, aux capitales européennes comme Londres ou Paris, la vie confinée doit être éprouvante. Ce sacré virus, issu de ce fameux pangolin, marié à une chauve-souris, paralyse le monde depuis un bon mois, décime des milliers de victimes, provoque un effondrement économique. Et Jean-Jacques Rousseau nous disait que la nature est bonne ! Gaïa, notre belle planète, lasse des attaques incessantes de l'homme prédateur, nous a peut-être envoyé une alerte, une semonce. Je retiens la leçon : arrêtons d'abord de manger du pangolin assez indigeste ! Puis, arrêtons de fréquenter des gares, des aéroports, des paquebots géants, des stades, des fêtes populaires, des messes, des salles de spectacles, des rues bondées, des magasins géants, des manifestations (la CGT va déprimer !). Ou alors, portons des masques, oui des masques. Pratiques, faciles mais introuvables. La situation se complique. Qu'allons nous devenir ?