mardi 31 décembre 2019

Notre vieux monde

En cette fin d'année 2019, nous vivons au rythme de la guerre civique ou civile : qui aura le dernier mot dans cette histoire des retraites ? J'ai l'impression que le chef des cheminots et ouvriers s'appelle Philippix Martinix, baptisé par ses copains, l'Astérix du XXIe siècle. Ce Gaulois réfractaire se bat pour conserver ses droits acquis de longue date. Le monde nouveau ne le concerne pas. César, son ennemi personnel, chantre de la mondialisation heureuse et décontractée, veut poursuivre son chemin vers une société libérale et individualiste. Le "tous pour tous" contre "le chacun pour soi", le local contre le global. Deux visions du monde s'affrontent depuis l'élection du monarque éclairé et choisi démocratiquement. Une lutte de classes, une lutte d'âges, une lutte sans fin. Que puis-je conseiller comme lectures à ces deux stars des médias ? Je commencerai pas Monsieur le Président, un lecteur pourtant averti. Je lui offrirai tout Dickens, "Les Misérables" de Victor Hugo, un Karl Marx, Jules Vallès, Emile Zola. Il faut qu'il comprenne qu'il existe en France et ailleurs des gens modestes qui malgré leur travail, éprouvent quelques difficultés à finir leur fin du mois… Lui, évidemment, n'a pas ce souci en tête comme son cher ami du Nord, chargé du dossier des retraites. Mais si la réforme était vraiment juste et équitable pour les agriculteurs, les femmes, les étudiants, on devrait voir ces catégories défiler dans la rue avec des pancartes dithyrambiques : vive les points pour ma retraite ! A bas les vilains cégétistes ! Mais, silence… Pour Philippix, comment le convaincre qu'il n'existe plus de classes sociales ? Une mission impossible. Je ne vois aucun écrivain dont l'œuvre pourrait changer sa vision du monde. Notre pays souffre d'un manque d'idées. Je lis en ce moment un ouvrage de Bruno Latour au titre évocateur, "Où atterrir ? Comment s'orienter en politique". Le philosophe constate le vide intellectuel des partis politiques :  de droite et de gauche et du centre et des extrêmes. Les élites, les classes dirigeantes, les gagnants de la mondialisation se moquent des inégalités et du réchauffement climatique. Les autres sont de plus en plus dans les camps des réactionnaires, des perdants, des archaïques, des nostalgiques du XXe… Cette fin d'année sonne le glas des solutions traditionnelles. Astérix et César ne se réconcilieront jamais. La Gaule et l'Empire romain ont disparu… Pourquoi pas nous aussi ? N'oublions pas que les civilisations meurent… En ces temps où les mots collapsologie et effondrement se lisent de plus en plus dans la presse, il paraît que nous allons tous disparaître vers 2030... En attendant, prenons du bon temps, lisons un maximum de très bons livres, prenons le train quand ils rouleront de nouveau, promenons-nous dans les bois pour écouter les oiseaux encore vivants, regardons encore le soleil qui ne nous brûle pas encore les yeux, dégustons encore de bons petits plats faits maison, essayons de sauvegarder notre si beau vieux monde !