lundi 1 octobre 2012

"Les désarçonnés"

Pascal Quignard signe son septième volume de l'ensemble "Dernier Royaume", oeuvre singulière, mystérieuse et fascinante. On peut lire chaque volume sans tenir compte de leur ordre de parution. Cet écrivain, le plus grand classique contemporain à mes yeux, nous transporte hors de notre temps actuel avec des anecdotes historiques sur ces "désarçonnés" de la vie, ceux qui tombent de leur cheval. Il évoque des figures littéraires comme Agrippa d'Aubigné, Montaigne, George Sand sans oublier une cohorte de personnages réels ou inventés dont on suit les aventures lors des batailles, des guerres, des querelles diverses et variées. Un livre de Pascal Quignard ne ressemble pas à un objet bien identifié dans le domaine de la littérature française. Il ferait plutôt partie du registre "contes et légendes" avec des zestes de philosophie, de morale, d'Histoire, un livre "quignardesque" si je peux me permettre de qualifier cet ensemble fragmentaire. Un article de Télérama, signé Natahlie Crom,  résumait bien l'ouvrage  : "de quoi la chute de cheval est-elle ici le nom ? Qu'elle soit réelle, mais aussi et plus souvent métaphorique, cette culbute , cette faillite désigne, pour Pascal Quignard, un événement essentiel, aussi radical qu'une conversion. Tomber à la renverse, c'est mourir pour renaître." Pascal Quignard dénonce l'amour des hommes pour l'autodestruction, les guerres, la cruauté, le vernis de la civilisation. Il ne reste plus que le retrait social, l'isolement voulu, la solitude vécue, le silence : une vie d'anachorète. Peut-être que cet état ressemble à ce dernier royaume nommé "le jadis". "Nous emportons avec nous lorsque nous crions pour la première fois dans le jour la perte d'un monde obscur, aphone, solitaire et liquide. Toujours ce lieu et ce silence seront dérobés." (citation tirée de "La barque silencieuse"). Je ne peux pas m'empêcher de citer aussi cette phrase concernant Freud : "Lumière où lire. Sigmund Freud disait que le recueillement autour d'un livre était la seule contribution positive qu'aient trouvée les hommes au processus redoutable de la civilisation.". Pascal Quignard n'oublie jamais dans aucun de ses livres de nous parler de la lecture, un acte vital qui, pour moi, nous aide à éviter le "désarçonnement" que nous pouvons tous subir, un jour, dans sa propre existence...