samedi 23 février 2013

Rubrique cinéma

Hier, j'ai regardé les Césars du cinéma français sur Canal Plus et j'ai surtout attendu les attributions du meilleur scénario, du meilleur acteur, de la meilleure actrice et du meilleur film. Le verdict correspondait à mon pronostic : "Amour" de Haneke que j'avais vu dès sa sortie. J'en garde un souvenir fort, même après des mois, car il touche un domaine souvent tabou dans notre société : le vieillissiment, la fin de vie, la maladie handicapante et la mort. Ces sujets difficiles et douloureux ont donc été recompensés à travers le film "Amour" car, au-delà de l'histoire dramatique du couple, formé par Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva, le film raconte aussi la force de l'amour dans la fidélité jusqu'au dernier terme. J'ai lu dans Le Monde de jeudi, un article sur Emmanuelle Riva, qui, a 86 ans, est une femme mille fois plus vivante, intelligente et belle que tous les actrices jeunes que nous voyons au cinéma. Ses origines modestes (un père ouvrier italien), sa propre modestie naturelle, sa discrétion légendaire en font une comédienne exceptionnelle. Elle n'a "commis" aucune faute de goût dans sa carrière en interprétant en particulier Duras dans "Hiroshima, mon amour" et Mauriac dans "Thérèse Desqueyroux". Mon admiration pour elle repose sur son goût pour la littérature adaptée au cinéma. Hier soir, le milieu du cinéma a enfin mis à l'honneur un film grave et austère et des comédiens au sommet de leur art... Et, je suis aussi très satisfaite du César obtenu par "Les Invisibles", film documentaire. passionnant sur la façon de vivre son homosexualité dans une France des années 60 à aujourd'hui. J'aime le cinéma qui donne de l'émotion : ces deux films reconnus et primés m'ont procuré ce sentiment ...

vendredi 22 février 2013

Club de lecture, deuxième partie

La deuxième partie était réservée aux livres tirés au sort en janvier. Geneviève a apprécié l'atmosphère "scandinave" de la "La véranda aveugle", premier tome d'une trilogie de Herbjorg Wasmo, et "La vie aux aguets" de William Boyd, roman d'espionnage, très prenant. Sylvie-Anne a dévoré "Luz ou le temps sauvage" d'Elsa Osorio,  récit poignant qui traite d'un sujet douloureux sur le vol des enfants adoptés par des militaires de la dictature en Argentine. Nicole a "démoli" le dernier "Les solidarités mystérieuses" de Pascal Quignard, à mon grand désespoir. J'étais même étonnée par son rejet concernant la mièvrerie de l'histoire, le style pauvre, les clichés, etc. Je pense que Pascal Quignard peut attirer l'antipathie de certains lecteurs ou l'adhésion inconditionnelle. Dommage de se priver d'une voix singulière et unique dans notre monde littéraire... Notre amie sans pitié pour Quignard a tout de même beaucoup apprécié le livre d'Emmanuel Carrère, "Roman russe". Jeanine a découvert "Le cœur est un chasseur solitaire" de Carson Mac Cullers qu'elle a très bien résumé en présentant les deux amis inséparables, l'un sourd et muet, l'autre obèse, entourés de personnages dont la solitude fait penser aux personnages du peintre réaliste Hopper. Danièle a aimé le belle écriture et l'intrigue du "Merle bleu" de Michèle Gazier. Line n'a pas lu "Des phrases courtes, ma chérie" de Pierrette Fleutiaux, ouvrage difficile sur la maladie d'Alzheimer. Elle a préféré découvrir "Pierres de mémoire" de Katie O'Riordan, écrivaine irlandaise de talent. Evelyne avait tiré au sort un très bon  Mankell, "Les Chaussures italiennes", qui ne fait pas partie de sa veine policière. Sylvie avait un avis mitigé sur "Vengeances" de Philippe Djian qu'elle a quand même terminé. Voilà pour les avis des lectrices du club concernant les livres que j'avais sélectionnés. Quelquefois, la "pioche" tombe à pic, quelquefois, la "pioche" tombe à plat... Heureusement que la lecture n'est pas un chemin droit et lisse. Il faut de temps en temps escalader des pentes escarpées pour rencontrer un écrivain ou un livre qui deviendra une révélation bienfaitrice...

"Portraits de femmes"

Philippe Sollers revient à l'autobiographie, mais une autobiographie uniquement consacrée aux femmes de sa vie. Dès la première page du récit, il emploie son style percutant et ironique pour définir la condition humaine du côté des hommes et reprend la célèbre formule de Simone de Beauvoir : "on ne naît pas homme, on le devient". Le modèle masculin impose lui aussi des devoirs contraignants  et une conformité sclérosante. Homme ou femme, Philippe Sollers se place d'emblée dans "l'inévidence": rien n'est évident, tout est infiniment complexe. Il commence à nous parler de sa mère, "une femme de beaucoup d'esprit", sa sœur Laure, tourmentée et malheureuse, Eugenia, sa première maîtresse et employée de maison (ils ont quinze ans de différence). Il évoque avec respect et émotion son grand amour, Dominique Rolin, "mélodieuse et rieuse". Leur complicité littéraire a duré de longues années et ils se retrouvaient à Venise pour vivre leur relation clandestine. Parallèlement, il vit avec sa femme, Julia Kristeva, écrivaine, intellectuelle et psychanalyste à qui il voue une admiration sans bornes. Il nomme ses alliées, ses femmes, de "pivotales". Il avoue son "donjuanisme" congénital mais il le décrit avec élégance et panache, en rendant un hommage permanent à toutes les femmes à la recherche de l'amour. Celles qu'il a aimées, ses compagnes, il les qualifie "d'artistes de la vie, de femmes-miracles"... Ce récit est à un journal intime d'un homme qui dit sa vérité et son amour inconditionnel des femmes ! Il m'a aussi donné envie de découvrir Dominique Rolin, sa compagne écrivaine, et Julia Kristeva, son épouse "officielle", dont on ne connaît pas sa conception du couple... La littérature peut tout dire, surtout l'intimité d'un homme, qui ne tient aucun compte de la "morale" traditionnelle et corsetée" et vit sa liberté dans toutes ses dimensions.

jeudi 21 février 2013

Club de lecture, première partie

Ce mardi 19 février, nous étions une bonne dizaine de participantes toujours aussi motivées et actives pour le grand, l'immense plaisir de lire. La première partie était consacrée aux coups de coeur. J'ai pris quelques notes rapides et certainement incomplètes et insatisfaisantes pour les membres du club. Nicole a choisi le grand succès de librairie, "La vérité sur l'affaire Harry Quebert" de Joël Dicker, signalant qu'elle ne l'a pas lâché, tellement le suspense était intense. Sylvie-Anne a proposé "Le premier homme" de Camus, son dernier ouvrage posthume quasiment autobiographique et qui éclaire l'homme Camus, toujours aussi moderne et contemporain. Danièle nous a lu un beau passage d'un texte d'une écrivaine jeunesse sur le rôle de la lecture dans un opuscule de l'Ecole des Loisirs, "Lire est le propre de l'homme". Isabelle s'est souvenue de la trilogie de Noëlle Chatelet : "La femme aux coquelicots", "La dame en bleu", "La petite fille aux tournesols". Sylvie a lu "Les chutes" de J.C. Oates, et elle a relevé des descriptions très poétiques sur la couleur des yeux des personnages, une attention particulière à l'écriture de cette écrivaine américaine, obsédée par la violence de la société américaine. Evelyne a relu un livre de sa bibliothèque, paru en 1889, un classique,  "Trois hommes dans un bateau" de Jérôme K. Jérôme, écrivain anglais cocasse et loufoque. Line a beaucoup apprécié "La couleur des sentiments" de Kathryn Stockett, un livre sur le racisme dans les années 30 aux Etats-Unis. Mylène a été bouleversée par le dernier roman de Jeanne Benameur, "Profanes", qui parle de vieillesse, de fin de vie, un sujet difficile mais essentiel. Françoise nous a conseillé trois coups de coeur qui l'ont marquée : "Lame de fond" de Linda Lé,  "Certaines n'avaient jamais vu la mer" de Julie Otsuka et "La porte" de Magda Szabo, prix Femina 2004. Voilà quelques idées de lecture pour les vacances d'hiver !

mardi 19 février 2013

"A nous deux, Paris !"

Tout le monde connaît cette phrase célèbre de Balzac, lancée par le jeune et ambitieux Rastignac dans le "Père Goriot" : "A nous deux, Paris !". Benoît Duteurtre a repris ce slogan pour le titre de son roman, paru chez Fayard en 2012. L'histoire se passe en 1980 à Paris dans ces années de libération collective quand la gauche est arrivée au pouvoir. Jérôme est un jeune provincial de Rouen qui ne rêve qu'à Paris. Il s'y installe grâce à une grand-mère propriétaire d'un studio qui veut bien favoriser son petit-fils plus amoureux des arts que des mathématiques. Jérôme se prend pour un musicien original, tendance "funky"... Il va intégrer les boîtes de nuit sur "piston" pour approcher ce monde de brouillard, une ambiance de fumée "canabisienne" et de drague, portes d'entrée incontournables pour devenir un jeune parisien branché et marginal. Il rencontre une chanteuse insupportable de bêtise et de snobisme qui squatte son studio. Il décrit cette dérive des corps et des âmes avec une musique de fond très rock melting-pot... Ce roman de jeunesse décrit un Paris des marges, une capitale nocturne de la musique des caves, des rencontres sexuelles faciles et des ambitions artistiques démesurées et forcément décevantes. Pour ma part, je n'ai pas reconnu mon Paris des années 80, bien plus classique que celui de Benoît Duteurtre mais je partage sa fascination pour la découverte d'une des plus belles villes du monde. Ces déambulations paresseuses dans des quartiers (transformés aujourd'hui) comme le quartier des Halles et de Beaubourg, ces remarques sur le mythe de la montée à Paris, toute son excitation sur cette vie nouvelle et libre, beaucoup de "provinciaux" l'ont vécu et le retrouvent dans ce livre "générationnel". L'écrivain propose deux épilogues : le personnage meurt du Sida ou il devient un musicien reconnu. Je préfère le deuxième destin pour Jérôme... Mais, si vous aimez notre capitale, souvent agaçante pour les provinciaux, mais fascinante pour vivre sa liberté, ce roman vous plaira...

lundi 18 février 2013

Rubrique cinéma

Dès que je remarque dans le programme de ma salle de cinéma préférée, une comédie italienne, je suis presque toujours assurée de voir un film à l'atmosphère "made in Italy", avec une recette savoureuse, liée au pays lui-même, à sa légendaire empathie et son humour décapant. Le film en question se nomme "Scialla !" traduit pauvrement en français : "Joue-la cool !". Réalisé par Francisco Bruni, ce film raconte l'histoire de Bruno, le personnage principal, écrivain-alimentaire de biographies populaires (stars porno, footballeurs, etc). Il a renoncé à l'enseignement et donne des cours particuliers à des élèves en grandes difficultés. Sa galère quotidienne le rend, non pas aigri, mais plutôt philosophe dans le ton doux-amer et fataliste. Une mère d'un garçon de 15 ans à qui le professeur donne des cours, lui avoue qu'il est le père de cet enfant, conçu lors d'une nuit d'amour unique, quinze ans auparavant. Elle lui demande d'héberger l'adolescent pour occuper un poste au Mali. Il choisit le silence et cache donc sa paternité à Luca qui vient s'installer chez lui. Le mot "Scialla" convient parfaitement à Luca, cancre à l'école, flambeur avec les copains, inéduqué et inapte aux contraintes sociales et familiales. L'apprentissage de la vie peut démarrer pour Luca grâce à la présence intelligente et cultivé de son ami le professeur, son père clandestin.  Cette comédie possède une grâce certaine et repose sur la confrontation loufoque entre un fils sans repères et un père sans fils. Tout peut encore arriver dans la vie d'un adolescent à la dérive... Le rôle de l'étude et de la connaissance ne peut qu'être bénéfique pour une vie meilleure. Tel est le message de ce film touchant et sensible sur l'adolescence, un passage difficile et délicat que le réalisateur raconte avec humour et optimisme...

vendredi 15 février 2013

"Adèle et moi"

Ce roman de Julie Wolkenstein est une belle histoire de mémoire familiale, puisée dans les confins du passé, un passé que l'écrivaine va utiliser et ré-inventer pour le plus grand plaisir du lecteur(trice). Elle va exploiter des archives qu'elle trouve à la mort de son père. Ces ancêtres, des "étrangers" pour elle, vont nourrir ce roman qui se focalise sur la figure emblématique d'Adèle, son arrière-grand-mère. Son enquête sur la vie de cette femme démarre en 1870. La France rentrait en guerre et elle a dix ans et demi. Adèle sera marquée par cette fuite de Paris car elle va construire plus tard une maison de vacances sur la Côte normande, à Saint-Pair. Julie Wolkenstein séjourne dans cette maison, située  sur une falaise, face à la mer et ce lieu devient le lien ombilical de Julie avec cette arrière-grand mère inconnue. Elle écrit : "Je commence à voir en elle une sorte de bienfaitrice, une femme à qui me lient des hasards génétiques sans valeur à mes yeux, mais sans qui je serais radicalement différente." Adèle va se marier avec un homme dont elle est vraiment amoureuse... Sa vie conjugale va donc être réussie et elle donnera naissance à deux filles et deux garçons. Julie Wolkenstein décrit avec une intériorité psychologique les sentiments d'Adèle quand elle perdra son fils cadet à la Guerre de 14 et sa fille infirmière partie soigner les soldats. L'enquête sur Adèle progresse au fil de la lecture des archives familiales et à la fin des 593 pages, Julie Wolkenstein nous livre le secret de famille sur l'origine de la fortune familiale. Ce roman n'est pas un livre de plus sur le thème sur-exploité des ancêtres. Julie Wolkenstein raconte avec une délicatesse sensuelle l'ancrage vital d'Adèle pour ce paysage marin et cette belle maison de famille. Adèle s'éteindra en 1941. Un belle déclaration d'amour pour une arrière grand-mère, une enquête socio-historique sur un mode de vie dans une France bourgeoise qui cachait bien ses secrets...

jeudi 14 février 2013

Revue de presse

En ce mois de février, j'ai retenu trois revues : Lire, Philosophie magazine et Transfuge. Lire nous propose un dossier sur le bonheur, un sujet pas très original et même trop traité dans la presse. Un bibliographie propose les "livres qui rendent heureux". Quelques écrivains nous donnent aussi leur choix comme Françoise Héritier, Robert Misrahi, Alexandre Jollien. Le lecteur(trice) peut grapiller quelques idées "heureuses" pour vérifier la portée d'un tel dossier. Christian Bobin est longuement interrogé sur l'art du bonheur. On retrouve les articles sur les nouveautés de janvier, très souvent positives et la revue ne prend pas assez de risques pour griffer quelques romans qui ne tiendront par leurs promesses... La revue Transfuge nous offre un dossier pertinent sur le snobisme en littérature, une littérature à contre-courant en évoquant les attitudes élitistes de Charles Dantzig et de Simon Liberati. La rubrique cinéma est toujours exhaustive dans la revue et je retrouve avec plaisir les critiques des films qu'il ne faut pas manquer. La revue Philosophie magazine aborde la question : "Y a-t-il un pilote dans l'Histoire ?". Cette interrogation est suivie d'un article conséquent sur le multiculturalisme, d'un portrait de Judith Butler et d'un dossier sur Platon. Je conseille cette revue de philosophie très abordable pour tous ceux qui aiment s'informer sur cette "matière", la philosophie, si abstraite et pourtant si essentielle à mes yeux pour comprendre le monde et la vie... Je n'ai pas acheté ce mois-ci la revue Le Magazine littéraire qui a consacré son dossier central sur Tennessee Williams, un dramaturge américain que je ne connais que par sa réputation quelque peu sulfureuse...

mardi 12 février 2013

Rubrique cinéma

J'avais envie de me distraire en allant voir "Tu honoreras ta mère et ta mère" de Brigitte Rouan avec Nicole Garcia. Jo, interprétée par Nicole Garcia, débarque en Grèce avec son fils aîné pour organiser un festival de théâtre. Cette tradition incontournable lui permet de retrouver aussi ses trois autres fils. Le festival est annulé pour cause de crise, l'argent ayant été consacré au "tout à l'égout". Jo, femme volontaire et optimiste, ne renonce pas et décide de se lancer dans une expérience théâtrale qui ne "coûte quasi rien". Elle squatte une maison en bord de mer, monte son mini spectacle avec sa tribu loufoque. Ses fils se retrouvent mais le film montre bien les mésententes, les malentendus, les fêlures familiales. Sur un ton de comédie à l'italienne, la famille se déchire avec cris, bousculades, événements indésirables : le séjour tourne au vinaigre. L'aîné des garçons joue au chef protecteur, le second flambe l'argent, le troisième joue le mal-aimé maladroit, et le cadet aventurier arrive en hélicoptère. Jo les aime trop et en fait, les étouffe. Elle le comprendra en les quittant pour qu'ils se mettent enfin à grandir... Nicole Garcia est ultra-présente, sans cesse en mouvement, en demande. Elle désire être au centre de la tribu, souveraine et autoritaire. Les dialogues, les situations, les relations, tout se mêle avec allégresse pour offrir une comédie légère et parfois sérieuse sur la "famille" avec ses bonheurs et ses contrariétés. Il ne faut surtout pas oublier l'environnement magique d'une île grecque, ses paysages marins, ses collines herbeuses et son vent omniprésent. Un vrai plaisir cinématographique...

lundi 11 février 2013

Le Livre de poche fête ses 60 ans

Né en 1953, le Livre de poche fête ses 60 ans. Je suis presque, à deux ans près, de la même année et j'avoue que cet objet culturel m'a accompagnée pendant plus de 50 ans au minimum... Cette révolution "médiatique", due en grande partie à l'éditeur de la Librairie Hachette, Henri Filipacchi, mérite notre plus grande gratitude. Avec plus de 2000 auteurs, 5200 titres et 1 milliard d'exemplaires vendus, les catalogues se sont aussi enrichis de diverses collections : Livre de poche, Folio, Presses Pocket, Points-Seuil, Marabout, 10/18, Que sais-je ?, etc. Grâce à cette miniaturisation, le lecteur(trice) pouvait "prendre l'air" avec son poche et voyager léger... Les amateurs du livre de poche forment une communauté :  qui n'a pas tenu un poche dans ses mains dans le cours de sa vie ? Dans mes divers appartements, ils ont décoré les murs avec leurs couleurs chatoyantes pour les uns, austères pour les autres. Je les ai transportés dans des cartons. Je les ai vendus ou donnés. Quand le "poche" se prend pour un classique, un documentaire, un roman contemporain, un policier, un recueil poétique, il permet de découvrir le vaste monde de la littérature, de la philosophie, de l'histoire et tant d'autres sujets grâce à son prix abordable, à la portée de tous. J'ai conservé les premiers poches longtemps, puis j'ai aussi été infidèle dès que mes finances m'ont permis d'acquérir des beaux livres, des Pléiades et des livres en format broché. Notre génération a lu tout Camus, Sartre, Beauvoir, Giono, Hemingway, Colette, et tant d'autres en... poche ! On se souvient avec plaisir des couvertures de ces premiers livres de poche : de véritables enluminures... Ce petit objet de papier, si simple et si modeste, nous a cultivé(es), nous a nourri(es), nous a élévé(es), a servi d'éducateur populaire dans le sens noble du terme. Quand on part en train, ou en avion, ou en voiture, on emporte un "poche" à qui je souhaite encore des dizaines d'années supplémentaires, en fait, une vie éternelle...

jeudi 7 février 2013

Merci, Madame Taubira

En général, j'évite d'évoquer la vie politique française dans mon blog consacré aux livres et à la littérature. Mais, je ne peux pas résister à le faire tellement la personnalité exceptionnelle de Christiane Taubira m'a procuré un vrai bonheur, rare et précieux. Je veux lui rendre hommage en composant un texte-admiration. Cette femme défend une cause indiscutable, celle de l'égalité entre tous les citoyens et par conséquent, elle milite pour tous les droits des "minorités". Les homosexuel(les) réclament depuis des années les mêmes droits que les hétérosexuel(les)  et le "mariage pour tous" va enfin gommer les injustices subies par les familles homoparentales. Pourtant, les résistances à une société moderne, tolérante et juste, sont représentées par des centaines de milliers de Français rétrogrades et homophobes... Le mariage pour tous n'enlève rien aux "hétéros", pourquoi tant de haine et d'intolérance ? Christiane Taubira est devenue notre Simone Weil des années 70. J'admire son courage, sa détermination, son charisme et aussi, son amour de la... poésie. Je regarde les débats sur LCP et quand j'ai vu Christiane Taubira citer des vers du poète guyanais, Léon-Gontran Delmas, j'étais sous le charme. Il faut vraiment signaler cet événement : une femme politique "poétise" l'Assemblée nationale, plus habituée aux articles du Code civil, aux invectives des uns contre les autres et aux joutes orales souvent violentes. Je l'ai vue déclamer à la fin de sa présentation de la loi, ce vers : "L'acte que nous avons à accomplir est beau comme une rose dont la Tour Eiffel assiégée à l'aube voit s'épanouir enfin les pétales". Quel souffle, quelle audace, bravo et merci, Madame Taubira, vous représentez l'honneur de la politique humaniste et généreuse... La poésie dans l'hémicycle, une idée neuve et rafraîchissante !

mardi 5 février 2013

"La Déesse des petites victoires"

Ce roman de Yannick Grannec fait partie de la catégorie "Premiers romans" et pour un premier essai dans la littérature, je pense que cette écrivaine (Yannick, prénom ambigu), a beaucoup, beaucoup de talent et de "culot"... Vous vous rendez compte : elle nous parle de... mathématiques ! Il fallait oser aborder, dans le filon romanesque, un sujet aussi aride, aussi austère que les maths ! Elle a réussi son pari en nous offrant une "saga" couvrant le XXème siècle en exploitant la vie de Kurt Gödel, un savant quelque peu perturbé par son propre génie. Anna Roth est une jeune documentaliste qui travaille à l'Université de Princeton en 1980. Son directeur lui confie une mission délicate : essayer de convaincre la veuve de Kurt Gödel de léguer les archives de son mari à l'Université. Notre documentaliste un peu déprimée par une vie amoureuse proche du néant, rencontre Adèle, la femme du  mathématicien. Adèle va raconter son histoire avec Kurt, leur rencontre à Vienne dans les années 30. Elle est danseuse de cabaret et lui, un étudiant sérieux et très ennuyeux. La famille de Kurt désapprouve leur liaison insolite. Mais, ils s'aiment malgré leurs différences. Ils seront obligés de fuir le nazisme et vivront aux Etats-Unis. Le lecteur(trice) assiste alors à des joutes sur les mathématiques que l'on est libre aussi de lire ou de ne pas lire sans que le fil du roman ne se perde. Ce premier roman possède des qualités rares pour cette catégorie : un style alerte, une histoire originale, un sujet intrépide, de l'humour, et surtout deux femmes complices dont l'une, la doyenne, raconte une vie de sacrifice pour un homme génial mais insupportable... Les archives seront-elles sauvées par Anna ? Si vous lisez ce très bon premier roman, vous le saurez...

lundi 4 février 2013

"Jan Karski"

Je poursuis ma connaissance de l'oeuvre de Yannik Haenel en découvrant "Jan Karski", écrit en 2009 et paru chez Gallimard dans la collection très littéraire, "L'Infini". Ce roman est surtout un récit autobiographique dans sa première partie. Yannick Haenel se saisit d'un homme réel, Jan Karski et nous relate sa vie extraordinaire de citoyen polonais dans une période historique elle aussi extraordinaire. Nous sommes en 1942 à Varsovie. La Pologne est envahie par les Nazis et dévastée aussi par les Soviétiques. Jan Karski devient un "messager" de la Résistance polonaise auprès de son gouvernement en exil à Londres. Sa vie va basculer quand deux hommes le font entrer clandestinement dans le ghetto afin qu'il prévienne le monde "libre" que l'extermination des Juifs est bien une réalité. Jan Karski va découvrir des scènes terrifiantes dans le ghetto. Il va traverser l'Europe en guerre, informe les Anglais et finit par rencontrer Roosevelt, le Président américain. Les deux premiers chapitres relatent cette expérience et la rupture intervient au troisième quand le récit passe de "il" à "je". La force du livre réside dans cette reprise du point de vue littéraire à la première personne. La première phrase de la partie 3 démarre ainsi "On a laissé faire l'extermination des Juifs. Personne n'a essayé de l'arrêter, personne n'a voulu essayer". Jan Karski a témoigné dans le film de Jacques Lanzmann, "Shoah". Yannick Haenel imagine la vie de cet homme à partir de cette indifférence face à l'extermination des Juifs. Ce roman documentaire a obtenu le prix Interallié et celui de la Fnac. Le lire aussi, beaucoup plus tard qu'à sa parution, éloigne les polémiques entre Claude Lanzmann, des historiens et l'écrivain. Il est ensuite intéressant d'aller voir les critiques de l'époque pour se renseigner sur ce pari littéraire de Yannick Haenel : a-t-on le droit d'utiliser la fiction pour rendre encore plus réelle, la réalité historique ? Vaste question... .

vendredi 1 février 2013

Rubrique cinéma

"Zero Dark Thirty" de Kathrin Bigelow raconte la traque de Ben Laden, le terroriste le plus dangereux de la planète. C'est rare que j'aille voir ce style de film américain. Mais, les critiques assez élogieuses m'ont influencée pour me déplacer dans une salle obscure. Pas une minute de répit, pas un temps mort, la réalisatrice ne nous offre pas un film spectacle, un film commercial de bas étage. Bien au contraire, ce film ressemble à un documentaire sur la CIA et ses méthodes de travail. La torture est montrée au début du film à Guantanamo et l'agent n'obtient rien du terroriste djihadiste, soldat fanatisé et mortifère. J'ai surtout retenu l'engagement total de deux femmes de la CIA qui mènent une enquête minutieuse sur le réseau terroriste d'Al Quaida au Pakistan et en Afghanistan. Les attentats se succèdent et nous rappellent cette guerre horrible et moyennageuse. Maya, une agent de la CIA, joue un rôle majeur dans la traque "administrative et pointilleuse" de Ben Laden. Elle n'a pas de vie personnelle, se montre totalement obsédée pour le retrouver. On voit la complexité des agences publiques, la difficulté de communication entre les politiques et les agents,  le découragement des uns, l'obstination des autres. Ces 150 minutes cinématographiques sont d'un réalisme sans concession, et l'expédition du groupe de soldats au Pakistan pour éliminer Ben Laden cloue le spectateur dans son fauteuil. François Forestier du Nouvel Obs termine son article ainsi : "Son film montre la nuit, la terrible nuit des hommes". Dans cette longue nuit, le véritable héros du film s'appelle Maya, une héroïne des temps modernes, simple, efficace, qui se bat contre sa hiérarchie pour traquer l'ennemi obscurantiste de toutes les démocraties laïques et républicaines. Enfin, des femmes pour sauver le monde, c'est nouveau, me semble-t-il... et cela ne fait que commencer !