vendredi 20 novembre 2015

La Grande Librairie

J'ai, comme beaucoup de mes compatriotes, passé beaucoup de temps devant les médias car les images nous captent l'esprit avec une redoutable efficacité. Les faits parlent d'eux-mêmes et Paris, pour des causes atroces, est devenu le centre du monde. J'ai aussi lu la presse quotidienne qui m'informe mieux et approfondit ma vision du réel si complexe à comprendre aujourd'hui. J'ai vu dans Chambéry des témoignages et des bougies sur la Fontaine des Eléphants et ces marques de compassion pour les victimes, assassinées dans leur pleine jeunesse, m'ont impressionnée. Comme j'entendais rire des lycéens, je me suis approchée d'eux pour discuter, une démarche que je n'aurais pas pu entreprendre avant les événements. Ils m'ont dit qu'ils étaient tristes de vivre une époque aussi violente mais ils m'ont bien dit que "ces gens-là ne réussiront pas à les détourner de ce qu'ils aiment vivre" : se retrouver entre eux pour le plaisir, la légèreté, le bien vivre à la française. Ils devaient aller à un rassemblement pour rendre hommage aux victimes. Hier au soir, François Busnel a proposé une rencontre entre écrivains pour réfléchir sur ces tragiques événements. J'ai retrouvé Boualem Sansal qui a écrit un roman d'anticipation sur le totalitarisme djihadiste. Ce roman aurait été même écarté des grands prix littéraires (il a quand même obtenu le Prix de l'Académie française) pour éviter d'alimenter le pessimisme ambiant. Le prix Goncourt en la personne de Mathias Enard porte un message plus "heureux" en ces temps obscurs du terrorisme islamiste. Chaque invité devait choisir un mot pour qualifier les attentats de Paris : l'écrivain algérien a choisi le "silence", Boris Cyrulnik le mot "Un", un autre "cauchemar", une jeune romancière marocaine a pensé à "jeunesse". Cette émission a posé la question : "Que peut la littérature en ces temps sombres ?" Et c'est consolant et rassurant de voir que la fiction nous aide à comprendre la complexité du monde, de l'Autre, de la nuance, de la distance. Ils nous ont bien rappelé que les tueurs haïssent les livres car ils n'en lisent qu'un seul... Cela faisait du bien d'entendre parler de livres, de romans, de contes dans ce monde asphyxié en ce moment par des actualités d'une noirceur inouïe. Je vais suivre le conseil de François Busnel qui a conseillé Albert Camus et son livre d'une valeur universelle : "La Peste". Comment vivre maintenant avec cette peste, cette guerre asymétrique où les assaillants ne voudront jamais signer un traité de paix... Retournons à nos livres, à notre vie d'avant mais avec le cœur-chagrin...