mardi 4 octobre 2016

Escapade à Lisbonne, 3

Après avoir livré mes premières impressions sur Lisbonne, j'ai envie d'évoquer mes visites les plus réussies concernant la planète "Livres" car on ne se débarrasse pas de ces passions dans les voyages... J'ai réservé la journée de lundi à Mafra, tous les musées étant fermés le lundi. Pourquoi Mafra ? Cette petite ville à 35 kilomètres de Lisbonne possède un des plus grands monastères baroques du Portugal, édifié par le roi Joao 1er en 1717 : il voulait concurrencer l'Escurial, proche de Madrid. Ma première étape "livresque" se trouvait à la fin de la visite quand je me suis retrouvée devant la bibliothèque de Mafra, une des plus belles d'Europe. En tant qu'ancienne bibliothécaire, je rêve de connaître les plus belles bibliothèques européennes et après avoir vu celles de Coimbra, Vienne, Florence, Amsterdam, de l'Escurial, j'ai vécu un moment d'émerveillement devant tant de beauté architecturale dans des tons d'ivoire et de blanc magnifiques. On ne pouvait pas s'avancer à l'intérieur mais derrière le cordon de sécurité, j'ai admiré les livres reliés (plus de 40 000 ouvrages),  la galerie du premier étage, les fenêtres en hauteur illuminant l'espace. J'ai ressenti une quiétude latente, un silence recueilli et un respect naturel devant ce site unique, lieu de connaissance et de savoir où je me suis retrouvée quasi seule avec la gardienne... On imaginait les moines dans ce lieu décryptant les ouvrages en grec, en latin, recopiant les manuscrits, dessinant les enluminures dans les livres religieux. Toute une ambiance qui m'a rappelé "Le nom de la Rose" d'Umberto Eco. Je ne décrirai pas les nombreuses salles du monastère et du palais dont l'hospice des moines, lieu imprégné d'austérité et de gravité. Je cumule ainsi les visites de bibliothèque, de la plus patrimoniale à Mafra à la plus originale à LXFactory, un quartier des docks à Lisbonne. Le contraste frappant entre un palais-monastère austère et un quartier de docks  complètement en friches, tagué à outrance, alternatif et bobo, marque mon voyage temporel du XVIIIe au XXIe siècle. La librairie "Ler divagar" ou "prendre son temps pour lire" nous invite dès le seuil à un vertige spacial quand on remarque les hauteurs de rayonnages d'une trentaine de mètres. Les livres dessinent un espace géométrique extrêmement coloré, digne des tableaux de Vieira da Silva. Une bicyclette blanche est suspendue au plafond et des tables nous attendent pour feuilleter les milliers d'ouvrages dans tous les domaines. Ce lieu vaste et ludique est une ancienne imprimerie ! Une visite inattendue pour cette librairie atypique d'une originalité folle. Les guides ne la mentionnent pas à part le Routard. J'ai aussi apprécié les librairies anciennes dans le Chiado dont la mythique de la rue Garrett, la librairie Bertrand, fondée au XVIIIe siècle. Les librairies et les églises à Lisbonne ont deux points communs : le silence et l'ombre, deux privilèges dans une ville en pleine effervescence touristique sous un soleil de plomb...