jeudi 23 juillet 2020

"La vie mensongère des adultes"

Tous les "aficionados(as)" d'Elena Ferrante attendaient avec impatience son nouveau roman. "La vie mensongère des adultes" est enfin sorti chez Gallimard en juin. Evidemment, il faut un peu oublier sa fabuleuse saga en quatre volumes, "L'amie prodigieuse" qui restera un grand souvenir dans mes lectures des années 2010. La série inspirée du roman relance le succès planétaire d'Elena Ferrante. Quand j'ai ouvert la première page, la magie "ferrantaise" a opéré : "Deux ans avant qu'il ne quitte la maison, mon père déclara à ma mère que j'étais très laide". Giovanna entend cette parole paternelle à l'âge de douze ans. Elle vit dans un quartier situé sur les hauteurs de Naples. Ses parents, un couple de professeurs, l'élèvent avec amour, l'éduquent à merveille et la rendent heureuse. Une enfance choyée. Pourtant, un grain de sable va enrayer cette existence pacifique et sereine. Avec cette conversation qu'elle intercepte, il est question d'une tante à la réputation maléfique car son père a osé la comparer à elle. Bouleversée par cette révélation, Giovanna veut connaître cette tante qui est fâchée avec son père. La tante Zia Vittoria, "alliance parfaite de la laideur et du Mal", a toujours provoqué un malaise proche de la peur. Les parents de Giovanna ont rompu tout lien avec elle et sont stupéfaits quand leur fille décide de retrouver cette tante maudite qui habite un des quartiers les plus pauvres de Naples. Dans cette partie de la ville, Giovanna découvre un milieu social bien plus remuant que l'univers feutré de ses parents. Leur rencontre va provoquer quelques belles étincelles entre amour et haine. La petite Giovanna comprend aussi que son père a trompé sa femme avec sa meilleure amie et sa mère finira par se lier avec le mari trompé. Le titre du roman évoque cette dimension mensongère de la vie des adultes et dans le passé, les liens de sa tante et de son père reposent sur une malentendu mensonger. Giovanna observe avec une certaine perversité les relations amoureuses et amicales et elle est même tentée de s'immiscer dans un couple formé par une de ses cousines. Le monde des adultes ne lui semble pas un monde sincère et authentique. L'hypocrisie, la violence et la jalousie détériorent les relations familiales. Elena Ferrante conserve dans son dernier roman sa verve habituelle, son style vivifiant, un talent pour décrire des personnages féminins inénarrables et aussi la présence de Naples, ville volcanique par définition. Un vrai régal de lecture dans ce portrait d'une adolescente incandescente même si les critiques ont émis certaines réserves. J'ai succombé au charme napolitain qui est distillé par toutes les pages de son livre.