jeudi 29 novembre 2018

Rubrique cinéma

La Quinzaine du cinéma italien s'est terminée cette semaine, mais j'ai été empêchée d'assister à quelques séances à cause d'une perturbation saisonnière courante à cette période où j'ai enregistré un "choc thermique" à Besançon. A mon retour, je rapportais dans mes bagages un état grippal, une toux, une bronchite. Adieu les films italiens, mes balades, mes plaisirs de sortir. La maladie pas du tout grave empêche la poursuite d'une vie normale. Confinée dans ma maison, j'ai retrouvé après quelques jours brouillardeux l'extrême chance de m'adonner à mes passions de toujours : la lecture et la musique. Avant de sombrer dans cette hibernation forcée, je suis allée voir le dernier film de Paolo Sorrentino, "Silvio et les autres". Le réalisateur de la série "The Young Pope", et de "La Grande Bellezza" démarre son film avec un mouton dans une très belle propriété de Sardaigne. Ce mouton mystérieux et incongru porte un symbole fort que l'on découvre au fil du film. On plonge alors dans une ambiance euphorique quand apparaît Silvio, le Silvio Berlusconi, délirant, tonitruant, clownesque, un des épisodes les plus lamentables de la politique italienne. Ce film dresse une fresque des années "bunga-bunga" où régnaient la fête, la drogue, le sexe. Paolo Sorrentino montre le système qui structurait la cour de cet homme pathétique. Les intrigues circulent à un rythme infernal. L'acteur Tonio Servillo joue ce rôle à merveille en portant le masque d'un sourire triomphant qui ne fait plus rire sa femme. Les maîtresses du Cavaliere se succèdent dans cette vie d'oisif privilégié. Au fond, ce milliardaire des médias est devenu son propre metteur en scène pendant vingt ans en Italie. Il a propulsé la société consumériste où la publicité a pour objectif de "vider les cerveaux"... Son sourire éternel illusionnait ses fans et illustrait cette société du spectacle. Le film révèle aussi les failles de ce personnage flamboyant qui le rend plus humain comme sa solitude, entourée de tant de présences serviles autour de lui. Manifestement, Silvio Berlusconi a fasciné le réalisateur qui admirait sa vitalité jubilatoire et son optimisme béat. Il explique lui-même dans un article de Télérama : "Certains de ses comportements anormaux, d'une virilité parfois violente sont toujours des signes d'un malaise et d'une peur. Mon travail est de les pointer". Un très bon film, une comédie italienne aigre-douce.. 

mardi 27 novembre 2018

Gérard de Nerval

Une belle après-midi d'automne de novembre, je suis partie me balader à Aix-Les-Bains. Du petit port au grand port, j'ai traversé l'esplanade, l'allée magnifique des peupliers aux couleurs d'écureuils, des voiliers voguaient au loin et les mouettes virevoltaient allégrement devant moi. J'aime capter avec mon téléphone les mouvements de ces oiseaux dont j'admire la grâce et la vitalité. Je me rêve en mouette, libre et indocile, dans le ciel et sur le lac, symbole de la beauté naturelle. Ce spectacle me réjouit toujours quand une d'entre elles passe au dessus de ma tête comme une flèche blanche éblouissante. Je collectionne depuis longtemps des clichés sur ses oiseaux de mer et de lac, une manie qui s'est développée au cours de mes voyages, mouettes de Venise, de Copenhague, de Grèce, de ma Côte basque, et de bien d'autres rivages. A mi-chemin, je prends connaissance du contenu d'une cabine téléphonique transformée en bibliothèque gratuite. Je n'ai rien trouvé d'intéressant et je suis repartie bredouille. Ensuite, mes pas m'ont menée vers le Grand Port où cliquètent les mâts des voiliers. La vue devient encore plus majestueuse vers Brison-Saint-Innocent et Hautecombe. Une fois parvenue au Jardin Vagabond dont j'ai déjà parlé dans le blog, je me dirige vers ma deuxième cabane à livres. Je détaille tous les titres à la recherche de la pépite d'or livresque. Mais, constat fait, pas de bonne surprise. Aucun donateur n'a déposé un livre qui pourrait me plaire. Je repars vers la baie de Mémard et je retourne vers mon point d'ancrage, Par curiosité, je revisite ma première cabane. Je rencontre alors un monsieur avec deux livres à la main. Il me les montre : un guide des oiseaux et un livre sur le self-défense. Je les prends avec plaisir et je pense les donner à mon entourage. Quelle solidarité dans ces gestes entre les passionnés de lecture ! Cela me remplit d'optimisme envers l'humanité… Je redonne un coup d'œil par hasard dans la cabine et j'aperçois alors à ma grande surprise, mélangée à des ouvrages reliés ordinaires, ma pépite d'or : une Pléiade ! J'aime beaucoup ces ouvrages malgré leur prix car ils représentent la quintessence de la littérature mondiale. Et pas n'importe quelle Pléiade, j'avais dans mes mains le tome 2 des Œuvres de Nerval, édité en 1962 contenant "Le Voyage en Orient, "Lorely", "Les Illuminés" qui manquait à ma collection. Ma mère, elle aussi lectrice, m'avait offert le tome 1 quand j'étais étudiante à Pau. J'avais  "Les Filles du Feu" au programme et il me fallait cette édition commentée. J'adore ce type de coïncidence heureuse comme une espace temporel qui se boucle dans cet instant. Voila comment une balade agréable se termine en beauté avec ce don inhabituel. Qui est ce lecteur ou lectrice mystère qui dépose un tel livre dans cette cabane téléphonique ? Je ne le saurai jamais, mais je vois que la lecture rend généreux !  

lundi 26 novembre 2018

"Tous les hommes désirent naturellement savoir"

Nina Bouraoui a publié à la rentrée son dernier opus, "Tous les hommes désirent naturellement savoir". Je trouve dommage qu'elle n'ait obtenu aucune récompense littéraire mais les jurys ont préféré les auteurs hommes, un vrai record cette année. Evidemment, le talent prime d'abord et la parité féminin-masculin n'existe pas dans le monde de la littérature. Pourtant, la voix sensible, féminine, empathique de Nina Bouraoui commence à se faire entendre. Cette écrivaine évoque son homosexualité assumée dans ce livre au titre tiré chez l'antique philosophe Aristote. Les cours chapitres s'enchaînent avec une harmonie musicale et s'intitulent le "devenir", "se souvenir", "être", "savoir". Elle évoque son enfance algérienne, ses parents dont la mère bretonne ose défier sa famille et a le courage de se marier avec un étudiant algérien dans les années 60. Petite fille, elle se sentait singulière ne correspondant pas aux canons de la féminité qui régnait à cette époque. Elle assiste un jour au retour de sa mère, bouleversée par son agression dans la rue dans un pays non reconciliée. En 1981, Nina quitte l'Algérie pour rejoindre la France. La répression religieuse s'installe pendant dix ans et ses parents anticipent leur départ. Accueillies par ses grands-parents à Rennes, Nina et sa sœur terminent leur scolarité et avec son bac en poche, elle part faire ses études à Paris et fréquente une boite de nuit où elle espère rencontrer l'amour de sa vie, une femme. Mais, elle observe aussi dans ce milieu interlope les ravages de l'alcool, les envies de suicide, la cruauté des amours malheureuses, le malaise de cette identité difficile à porter. Surtout, l'auteur vit une double différence avec ses origines algériennes et son orientation sexuelle. Dans les années 90, on était encore très loin du mariage pour tous. Elle raconte avec émotion sa rencontre avec Julia qui pourtant se joue d'elle. Elle découvre un univers féminin complexe où le mensonge peut régner comme partout. Dans ce récit autobiographique d'une poésie sensuelle, l'écrivaine avoue son amour pour les mots, la littérature et ce combat quotidien l'aide à surmonter les obstacles de sa différence sexuelle. Quel dommage que cet ouvrage lumineux et courageux n'ait pas obtenu le prix Médicis ! Trop féminin, trop sensible, pas assez violent et pourtant, elle évoque les violences de l'Algérie, du racisme, de l'homophobie qui ont eu de l'influence dans sa vie de femme. Il faut découvrir son œuvre singulière et ce livre publié chez Lattès confirme son parcours de combattante pour révéler avec clarté et audace que la différence peut se vivre aussi comme une richesse existentielle.   

mercredi 21 novembre 2018

"Idiss"

Je regarde régulièrement la Grande Librairie, émission littéraire de grande qualité, animée par François Busnel. La semaine dernière, il avait invité Robert Badinter, ministre de la justice de 1981 à 1986, et Président du Conseil Constitutionnel de 1986 à 1995. Tout le monde se souvient de sa plaidoirie pour l'abolition de la peine de mort. Cet homme remarquable, âgé aujourd'hui de 90 ans, était reçu par François Busnel pour évoquer la publication de son ouvrage sur Idiss, sa grand-mère maternelle. Tout au long de l'émission, Robert Badinter a retenu son émotion avec difficulté quand il évoquait la figure émouvante de cette femme, née en Bessarabie en 1863 dans le Yiddishland. Ce monde juif, disparu à tout jamais avec la Shoah, ressurgit dans ce livre intimiste. Sa grand-mère a vécu dans la misère, l'oppression, l'antisémitisme, les pogroms et elle fuit son pays pour s'installer à Paris en 1912. A cette époque, la capitale française représentait le symbole de la liberté, de la culture et surtout de la tolérance. La République offrait un foyer pour tous ces immigrés juifs venus de l'Est. Idiss était analphabète, parlait le yiddish et pourtant, se sentait bien intégrée. Son petit-fils admire profondément cette femme d'une bonté exceptionnelle. Elle se marie avec amour, fait de la contrebande, donne naissance à deux garçons et une fille. Robert Badinter raconte la vie de sa famille : les frasques de ses oncles, le mariage de ses parents, la réussite commerciale dans les fourrures. Les souvenirs de son enfance forment une fresque sociale et historique dans la France des années 30 et 40. Un leitmotiv revient souvent sous la plume de l'auteur : ses grands-parents et ses parents lui ont montré l'exemple, une attitude dans la vie imprégné de courage, du sens de l'effort, de l'amour de la culture. L'auteur a déclaré dans l'émission : "J'ai eu des gens bien comme mes parents".  Alors que la société française leur avait permis de vivre normalement sans subir l'antisémitisme, la guerre de 39 se profile, la famille d'Idiss se sépare de peur des rafles à Paris. Robert Badinter et son frère échapperont à la déportation et c'est à Cognin qu'ils se cacheront. Idiss reste à Paris mais mourra d'un cancer.  A travers Idiss, Robert Badinter rend hommage à ses parents, à sa culture d'origine, (une Atlantide disparue). Malgré l'horreur des événements concernant la situation des Juifs en France, Robert Badinter constate les faits, témoigne sans émotion, décrit son monde familial dans l'univers glaçant du nazisme et du pétainisme. Idiss ne devait pas tomber dans l'oubli et grâce à son petit-fils, elle vivra dans nos mémoires. Un beau portrait émouvant, un témoignage historique, un livre indispensable pour comprendre les dégâts de l'antisémitisme.  

mardi 20 novembre 2018

Atelier Lectures, 3

Au programme des lectures "conseillées", j'avais proposé la découverte de quelques romans nordiques en choisissant deux écrivains par pays : le Danemark, la Norvège, la Suède, la Finlande et l'Islande. Pour le Danemark, Karen Blixen et Jens Christian Grondahl s'imposaient. Deux lectrices, Dany et Marie-Christine, ont donné des avis négatifs sur la légendaire Karen Blixen, la fascinante femme de "La ferme africaine". Elles ont essayé de lire "Le festin de Babette", mais la magie blixenoise n'a pas surgi au fil des pages : style vieillot, histoire ennuyeuse, personnages falots. Peut-être que la réputation de cette écrivaine dépasse son œuvre littéraire datée. Dommage pour l'écrivaine danoise… Par contre, Jens Christian Grondahl a conquis deux autres amies lectrices, Pascale et Janelou, qui ont beaucoup apprécié "Les Portes de fer", un roman bilan, le bilan d'une vie. Le narrateur raconte sa jeunesse, ses relations amoureuses, sa paternité, ses amitiés. Un beau récit intime d'une lucidité élégante par un grand écrivain danois. Pour la Finlande, nous avons évoqué un auteur très connu qui vient de disparaître, Arto Paasilinna et son roman,  "Le meunier hurlant". Dans un petit village du Nord de la Finlande, Gunnar, le meunier possède un défaut singulier : il hurle à la lune dès qu'il est contrarié. Son comportement gêne les villageois qui veulent l'envoyer à l'asile. Mais, notre meunier veut se battre pour rester libre. Un écrivain finlandais très original à découvrir. Janine a beaucoup aimé la saga de l'Islandaise, Kristin Marja Baldursdottir, "Karitas, l'esquisse d'un rêve". Karitas vit dans sa ferme familiale et dessine comme son père le lui a appris. Une mystérieuse artiste révèle son talent et l'envoie à Copenhague pour sa formation d'artiste. Ce destin d'une femme artiste se déroule au début du XXe siècle et montre la solidarité de la vie sociale. Une belle fresque islandaise. Evelyne a choisi Jon Kalman Stefansson, "Entre ciel et terre". Dans le milieu des pêcheurs à la morue, un jeune garçon orphelin intègre un équipage et rencontre un marin poète qui adore Milton. Quand le marin meurt de froid car il a oublié sa vareuse, le jeune garçon veut rapporter le recueil de poèmes à son propriétaire. Ce roman d'éducation ressemble aussi à un hymne aux mots et je cite l'écrivain : "Certains mots sont probablement aptes à changer le monde, ils ont le pouvoir de nous consoler et de sécher nos larmes. Certains mots sont des balles de fusil, d'autres des notes de violon". Il faut lire ce très beau roman. Pour terminer l'évocation des romans littéraires venus de Scandinavie, Véronique a bien aimé l'écrivaine norvégienne, Herbjorg Wassmo, et son livre "Un long chemin". Pendant l'hiver 1944, sous l'Occupation allemande, une famille fuit pour gagner la Suède. Cette traversée périlleuse montre les horreurs de la guerre. Sur les dix romans nordiques, cinq titres ont donc retenu l'attention bienveillante des lectrices. Rien ne vaut la littérature pour connaître l'âme profonde d'un pays. En décembre, l'atelier Lectures se penchera sur Philip Roth, le grand écrivain américain, disparu en mai dernier. 

vendredi 16 novembre 2018

Atelier Lectures, 2

Je poursuis l'évocation des coups de cœur avec Mylène (et je partage ce choix) : celui du récit de Robert Badinter sur sa grand-mère, "Idiss". Le portrait de cette femme courage, venue de la Bessarabie, est tracé avec une sincérité émouvante de la part de cet homme si respectueux qui, à l'âge de quatre-vingt dix ans, raconte son enfance et son adolescence dans une France accueillante des années 20. Idiss vivra toujours au sein de sa famille à Paris jusqu'à sa mort. Pour échapper à la déportation des Juifs, sa fille et et ses petits-fils (dont Robert Badinter) quitteront Idiss et Paris pour se réfugier en province. Cette séparation tragique assombrira la fin de sa vie. Je reviendrai sur ce livre dans mon blog tellement il me semble important aujourd'hui. Sylvie a retenu le récit autobiographique d'Edouard Louis, "Pour en finir avec Eddy Bellegueule". Cet ouvrage coup de poing peut déranger ou enthousiasmer les lecteurs(trices). L'auteur dénonce sa famille homophobe, la misère sociale et intellectuelle et revendique hautement sa liberté de vivre sa différence sexuelle. Pascale a recommandé la lecture d'un auteur soudanais, Abdelaziz Baraka Sakin, "Le Messie du Darfour", publié chez Zulma. Le personnage féminin, Abderahman, porte un prénom masculin et veut se venger des terribles milices Janjawids. Avec son mari, elle décide de passer à l'acte. Cette épopée dans un pays en plein chaos révèle une situation historique inextricable. L'auteur a obtenu l'asile politique en Autriche. Marie-Christine a évoqué le roman autofictif d'Eric Fottorino, "Questions à mon père", publié en 2010 chez Gallimard. Dans cet ouvrage, l'auteur va à la rencontre de son père biologique, Juif marocain, qui ne l'a pas élevé. Il découvre la vérité sur cette famille inconnue du Maroc et se met à reconnaître ce père mystérieux. Un récit émouvant et très bien écrit. Evelyne a redécouvert Louis Pergaud, écrivain bien oublié aujourd'hui. Franc-comtois, il croque les paysans dans ce recueil de nouvelles, "Les Rustiques". Evelyne, pourtant savoyarde de cœur, n'a jamais oublié ses racines franc-comtoises. La suite sur les romans nordiques, la semaine prochaine.  

jeudi 15 novembre 2018

Atelier Lectures, 1

Cet après-midi, nous étions toutes réunies pour partager nos lectures du mois. J'ai évoqué les prix littéraires de l'automne en mettant l'accent sur un très bon Goncourt, le roman de Nicolas Mathieu, "Les enfants après eux", édité chez Actes Sud. Je me suis réjouie du Femina pour "Le Lambeau" de Philippe Lançon qui aurait dû recevoir l'ensemble des prix… J'ai aussi remarqué l'attribution du prix Femina essai pour Elizabeth de Fontenay, "Gaspard de la Nuit" sur son frère malade. Je n'ai pas recommandé la lecture du prix Médicis avec "Idiotie" de Pierre Guyotat, un écrivain d'avant-garde, très peu lu et seulement apprécié des grands spécialistes d'une littérature confidentielle parisienne. Les coups de cœur ont démarré avec Geneviève qui a déniché un recueil de douze nouvelles d'Irène Nemirovsky. Elle a été étonnée par la modernité du style cinématographique, les portraits de femmes fragiles et ces textes teintés d'ironie ont été publiés en 1942 avant que l'écrivaine ne soit déportée à Auschwitz. Danièle a rencontré Charles Juliet et René Frégni lors d'une conférence à la librairie Garin. Elle nous a présenté le livre de René Fregni, "Je me souviens de tous mes rêves", publié en Folio. Au fil de descriptions évocatrices, l'écrivain qui vit à Manosque entraîne les lecteurs(trices) dans des promenades en Provence quand les touristes sont partis. Une belle écriture qui rend hommage à cette douce province. Odile a beaucoup aimé le roman de Philippe Lemaître, "Au revoir, là-haut", prix Goncourt en 2013. Cet ouvrage évoque les gueules cassées de la Guerre 14/18 tentant de survivre dans un monde qui ne veut plus d'eux. Nous avons commenté ce beau roman adapté au cinéma et qui continue à séduire de très nombreux lecteurs(trices). Agnès a évoqué le livre de Véronique Olmi, "Bakhita", une femme exceptionnelle, qui fut captive, domestique, religieuse et sainte. Ce grand succès de librairie avait obtenu le prix Fnac en 2017. Véronique a beaucoup apprécié "Les huit montagnes" de Paolo Cogneti, publié l'année dernière. Cette belle histoire d'amitié entre Pietro, l'enfant de la ville, et Bruno, l'enfant de la montagne, se déroule dans un cadre enchanteur au cœur du Val d'Aoste. Quelques coups de cœur ont déjà été mentionnés lors des ateliers des années précédentes mais, cela permet aussi de ne pas les oublier trop vite.  La suite, demain.  

mardi 13 novembre 2018

Rubrique cinéma

J'ai repris le chemin du cinéma vendredi dernier pour aller voir un film de la réalisatrice italienne, Alice Rohrwacher, "Heureux comme Lazzaro". Ce film avait obtenu le prix du scénario à Cannes en 2018.  Lazzaro, un petit paysan d'une bonté naturelle, vit au milieu d'une communauté à l'écart du monde. Une marquise gère ce domaine, une plantation de tabac, dans ce hameau, nommé Inviolata, perdu dans la montagne. Un pont qui le reliait à la vallée a été détruit et jamais reconstruit. La trentaine de paysans exploités comme des serfs du Moyen Age, abuse à leur tour du gentil Lazzaro qui travaille comme un forçat sans jamais se plaindre. Un été, Lazzaro rencontre le fils de la Marquise de Luna, Tancrède. Ce fils s'insurge contre sa mère esclavagiste qui n'a que du mépris pour ces paysans. Il se refugie dans la montagne avec l'aide de Lazzaro. Les autorités débusquent ce hameau hors du temps et conduisent les paysans en ville. La Marquise est arrêtée et emprisonnée. Dans la débâcle, le jeune Lazzaro tombe dans un ravin en allant voir Tancrède. Le film prend alors une tournure fantastique quand le jeune paysan se réveille quelques années plus tard. Il repart vers la propriété de la Marquise où des voleurs sont en train de la piller. Il se met à les aider et comme il comprend que tout a changé, il part avec eux en ville. Il retrouve dans un faubourg misérable ses anciens compagnons du hameau, devenus des marginaux, tous vieillis, usés, s'adonnant à la mendicité. Lazzaro s'intègre naïvement au groupe et quand il rencontre en ville Tancrède, évidemment changé, il se sent toujours proche de lui. Il comprend lors d'une visite chez lui qu'il est ruiné par sa banque. Lazzaro se rend donc dans une banque tout seul et le film s'arrête sur une image que je ne dévoilerai pas. Ce film évoque l'innocence à travers le personnage du "Saint idiot" qui ne peut envisager le mal, la méchanceté, la noirceur. Lazare, revenu des morts, rencontre des morts-vivants, ses compagnons d'infortune. Alice Rohrwacher considère Lazzaro comme "un ange de l'histoire" qui "veille, insondable, sur les vaincus et les damnés de la terre sans pouvoir soulager un tant soit peu leur fardeau". Un beau film, allégorique et mystique. 

lundi 12 novembre 2018

"Elsa, mon amour"

Quand des écrivains évoquent des écrivains, je me sens tout de suite attirée par cette démarche de reconnaissance, de gratitude, valeurs de plus en plus rares de nos jours. Simonetta Greggio a écrit un roman biographique sur la "divine" Elsa Morante (1912-1985) qu'elle idolâtre. Dans un article du Monde des Livres, paru en octobre dernier, l'écrivaine déclare avec humour que le monde se divise en deux : "ceux qui idolâtrent Elsa Morante et ceux qui ne la connaissent pas". Elle construit son livre en donnant la parole à l'écrivaine italienne, une femme libre et audacieuse, mêlant sa vie à celle d'Alberto Moravia (1907-1990). La vie culturelle de l'Italie des années 70 défile dans cette biographie romanesque. Elsa Morante côtoyait les intellectuels de cette époque : Visconti, Pasolini, Pavese, Rosselini  qui font des apparitions brèves mais intenses dans la vie d'Elsa Morante. Quand le livre commence, Elsa a soixante dix sept ans. Elle raconte son enfance difficile entre une mère enseignante dévoreuse et un père absent. Sa vocation d'écrivain nait très tôt (à onze ans !) et deviendra son destin unique. Simonetta Greggio scande cette passion d'écrire tout au long du récit : "La joie et la beauté, voilées de mes ciels lourds de pluie. Seul écrire est plus fort que vivre. Yeux fermés, je me souviens. J'écris". Plus loin, l'auteur ajoute : "Pourquoi croit-on que les écrivains écrivent, si ce n'est pour prêter leur voix à ceux qui n'en ont pas, ou qui n'en ont plus ?". Ainsi, Elsa Morane a écrit pour les "perdants" de la vie, comme on dirait aujourd'hui. Les gagnants ne l'intéressaient pas et quand elle se saisit d'un personnage comme dans "L'île d'Arturo" (1963), c'est une jeune adolescent en proie à ses tourments de famille et à son identité. Le roman, "La Storia" (1977) évoque le destin d'une femme, Ida, violée par un soldat allemand à Rome pendant la guerre. Cette fresque historique et sociale d'une Italie en proie au fascisme, à la collaboration au nazisme montre l'absurdité de l'Histoire dans les destins des "gens de peu". Simonetta Greggio aborde l'œuvre romanesque de l'écrivaine italienne pour inciter les lecteurs(trices) à lire ou relire ces romans inoubliables. J'ai lu Elsa Morante dans les années 70 et 80 et depuis ce temps là, je n'ai plus ouvert un roman d'Elsa Morante. Simonetta Greggio m'a vraiment montré le chemin des retrouvailles avec cette grande dame de la littérature italienne… Un beau roman poétique et bien documenté, un des meilleurs livres de la rentrée et pour ceux et celles qui aiment l'Italie, une lecture indispensable...

jeudi 8 novembre 2018

"Forêt obscure"

Nicole Krauss, écrivaine américaine, signe son troisième roman, "Forêt obscure", après "L'histoire de l'amour" en 2006 et "La Grande Maison" en 2011. Cette jeune femme fait partie des auteurs les plus remarqués de la nouvelle génération aux Etats-Unis. Comme son titre l'indique, lire ce roman prend la forme d'une aventure littéraire peu commune, comme une marche vive à l'intérieur de cette forêt de mots. Le lecteur(trice) peut s'égarer dans ce texte subtil et opaque, un labyrinthe fascinant, mais, il suffit d'arpenter avec énergie ces sentiers pentus pour apprécier l'originalité de ce roman.  Deux personnages dominent le récit : un dénommé Epstein, un riche avocat américain, et la narratrice, une romancière en panne d'inspiration. Les chapitres s'entrecroisent selon les destins de ces deux protagonistes à la recherche de leur destin. Un lieu géographique les réunit : l'hôtel du Hilton à Tel-Aviv en Israël. La narratrice, écrivaine de "renommée internationale" constate qu'elle a perdu le goût d'écrire, de composer un texte et cette sécheresse romanesque s'accompagne d'une rupture annoncée avec son mari. Epstein, l'avocat richissime, abandonne sa famille à New York et dilapide sa fortune car il se lasse de cette possession matérielle. Partir en Israël symbolise une nouvelle vie spirituelle. Il s'intéresse à la mystique juive et se rapproche d'un rabbin. Il veut planter des milliers d'arbre (encore le thème de la forêt) à la mémoire de ses parents. Les deux personnages venus tous les deux des Etats-Unis, s'interrogent sur leur identité juive, une identité vécue différemment en Israël. La narratrice est reçue par un professeur d'université qui lui révèle un secret incroyable : Kafka aurait fui en Israël pour mener une seconde vie en tant que jardinier. Elle récupère une valise d'inédits de l'écrivain pragois et part sur ses traces avec l'aide de ce mystérieux professeur. Nicole Krauss évoque la notion de "multivers", non plus univers unique, mais multiple. L'identité pour l'écrivaine ressemble à un monde fluctuant, mouvant, changeant. La forêt "psychique" où chacun peut se reconnaître, symbolise une renaissance, une "contrevie" (Philip Roth), une paix intérieure, difficile à conquérir. La revue Transfuge a publié un interview de Nicole Krauss où elle explique sa démarche : "Les deux personnages cherchent un lieu de communion, un lieu de renouvellement d'eux-mêmes". Ce roman atypique et ambitieux représente un défi de lecture mais une fois que l'on franchit le cap, quel beau roman, étrange et merveilleux ! 

mercredi 7 novembre 2018

Mon escapade en Côte basque, 5

Comme je suis une "fan" de quelques séries de qualité, j'ai fait un détour à trente kilomètres de Bilbao sur la côte de la province de Biscaye. Ce lieu mythique, "Gastelugatxe", est une petite île appartenant à la commune de Bermeo. Un pont la relie au continent et au sommet de cet ouvrage, trône l'ermitage de Saint Jean Baptiste qui date du Xe siècle. Des scènes de Game of Thrones (saison 7) ont été tournées dans ce lieu incroyable et unique. Cette série culte, spectaculaire et visionnaire, est connue du monde entier et une foule compacte visite ce lieu tout l'été. Il faut même s'inscrire pour arpenter les deux cent quarante marches qui montent vers l'ermitage. En fin octobre, les touristes se font plus rares et j'en ai croisé encore quelques uns sur le chemin. J'avoue que le paysage laisse sans voix : la côte abrupte crée des tunnels, des grottes et des arches. D'autres rochers escarpés hébergent des oiseaux marins. Le cap Matxitxako se devine au loin. L'ermitage au bout de ce pont et des marches surplombe le Golfe de Gascogne. Au sommet de la falaise, il existe une tradition sympathique : il faut sonner la cloche trois fois et faire un vœu. J'ai descendu le chemin vers l'ermitage et j'ai admiré le panorama grandiose de Gastelugatxe mais quand je suis arrivée devant le pont, j'ai renoncé à grimper car il fallait que je remonte le sentier très abrupt que je venais de descendre. Je n'ai pas une âme de grimpeuse invétérée (sauf dans les sites archéologiques !). Ce coin du Pays basque espagnol est encore épargné du tourisme de masse et j'aime beaucoup ces paysages sauvages et authentiques d'une rugosité propre à la fierté affirmée des Basques. Le jour de mon départ, j'ai terminé mon escapade à Biarritz avant de prendre l'avion à Parme. J'ai donc amassé dans mon esprit des belles images de mon pays : le Phare et sa vue magique sur la ville, la Grande plage désertée, le Rocher de la Vierge, la Côte des Basques. J'avais le cœur un peu nostalgique quand j'ai survolé ma terre basque, mais, j'emportais sa douceur de vivre, la beauté de ses paysages, la vitalité de ses vagues océanes, les saveurs de ses traditions, la chaleur familiale…

mardi 6 novembre 2018

Mon escapade en Côte basque, 4

J'ai découvert à Bilbao une artiste portugaise d'exception, Joana Vasconcelos. Depuis le 29 juin, cette plasticienne a investi le musée car dès que l'on pénètre dans le hall, une pieuvre géante en tissu brodé envahit l'espace depuis le sommet du bâtiment et enserre les piliers avec ses tentacules. Cette rencontre inédite capte notre attention d'une façon particulièrement ludique. Cette artiste peu connue du grand public a exposé au Palais de Versailles et à la Biennale de Venise. J'ai eu beaucoup de chance de voir cette exposition originale, baroque, surréaliste, humoristique et loufoque. Les pièces exposées bougent, font du bruit, s'illuminent. Chaque œuvre délivre des messages que le visiteur doit décrypter à sa façon. L'artiste travaille avec une équipe de collaborateurs dans son atelier de Lisbonne. Elle utilise des matériaux de la vie quotidienne qu'elle transforme en œuvre d'art. Des fers à repasser deviennent des robots ménagers ; des dizaines de téléphones forment une sculpture sur la communication impossible ; des Tampax suspendus au plafond constituent un luminaire gigantesque ; un hélicoptère se retrouve habillé comme une danseuse de cabaret ; une burka repose sur  le sol et une grue pourrait la soulever ; des miroirs composent un masque de Venise ; des casseroles et des faitouts se transforment en escarpins argentés. Tout est gigantesque et ces installations-transformations intriguent, étonnent, fascinent : un festival de facéties, de trouvailles et de messages sur la féminité, l'enfermement des femmes, leur soumission volontaire ou subie (la burka, symbole de leur esclavage). Le monde de Joana Vasconcelos est coloré, joyeux, insolent, insolite et cocasse. Ces montages exigent la participation active du public et j'ai remarqué l'engouement des visiteurs, en particulier de nombreux enfants adhéraient et s'amusaient de ces installations remarquables. En sortant sur l'esplanade, un immense cop portugais de l'artiste portugaise me saluait avec ironie. Le musée expose aussi des sculptures dans ses alentours : tulipes de Jeff Koons, le chien Puppy en fleurs, l'araignée géante de Louise Bourgeois, et d'autres encore. Quel musée, incontournable, inoubliable et une découverte heureuse, Joana Vasconcelos !

lundi 5 novembre 2018

Mon escapade en Côte basque, 3

Je poursuis l'évocation des expositions au Musée Guggenheim avec la magnifique rétrospective consacrée à Alberto Giacometti. J'aime particulièrement ce peintre-sculpteur (1901-1966) qui fait partie de mon Panthéon personnel, aux côtés de Braque, Morandi, Chirico, Van Gogh, Kupka, et ma sublime Vieira Da Silva, pour citer quelques uns de mes contemporains du XXe siècle. La liste s'allongerait si j'ajoutais les artistes depuis les Grecs anciens… L'exposition de Bilbao présente un ensemble de deux cents pièces provenant de la Fondation Giacometti de Paris. Elle était à Londres en 2017 et la voilà à Bilbao, près de chez moi à Anglet. Toutes les périodes de l'artiste suisse sont représentées : cubiste, surréaliste, figurative. Tableaux, sculptures, dessins forment un panorama unique et complet sur son œuvre. La disposition des pièces constitue une mise en scène esthétique très appréciable. Je citerai les chefs d'œuvre les plus emblématiques : "L'Homme qui marche", "Femmes de Venise", "Le nez", "Le chat", etc. Giacometti me semble le plus littéraire des artistes car ses œuvres évoquent la solitude humaine, l'angoisse, le rêve, l'absurde. L'existentialisme et le surréalisme l'ont profondément influencé. Il a écrit cette belle phrase qui résume sa démarche : "Voir, comprendre le monde, le sentir intensément et élargir au maximum notre capacité d'exploration". Ses amis s'appelaient René Char, Francis Ponge, Jean Genet, Jean-Paul Sartre. J'apprécie aussi qu'il se soit inspiré des Etrusques dans la dimension de ses sculptures. Dans un entretien en 1958, le sculpteur évoque sa passion de l'art grec : "Dans l'art grec, ce qui m'arrête, c'est ce qui me semble le plus vrai par rapport au monde extérieur. Il y a des choses qui me touchent, me passionnent à la même mesure. Une tête de cyclade par exemple sur laquelle il y a juste le nez, me semble une des têtes les plus ressemblantes". L'art visionnaire du sculpteur s'enracine donc dans les époques les plus anciennes, et comme j'aime particulièrement l'art cycladique, je ne pouvais qu'apprécier cette très belle exposition qui se terminera en février 2019.

vendredi 2 novembre 2018

Mon escapade en Côte basque, 2

J'ai consacré une bonne journée à Bilbao, cette cité basque au caractère bien affirmé. Il existe dans cette belle métropole un musée magnifique, le Guggenheim,  que je visite une fois par an. J'effectue ce pélerinage culturel à une heure trente minutes de Biarritz avec un plaisir gourmand. En cette fin d'année, j'ai eu de la chance ! Trois expositions temporaires et la collection permanente m'ont permis de passer quelques heures au contact de l'art moderne et contemporain. Quand j'ai aperçu le bâtiment du musée, une véritable œuvre d'art, une sculpture gigantesque en titane et en verre, toute argentée et aux formes chaotiques, je me mets déjà en pause "admiration"... La première exposition vient du Guggenheim de New York. Le legs Thannhauser, "De Van Gogh à Picasso", réunit les plus grands peintres de l'Impressionnisme et du Postimpressionnisme : Manet, Degas, Cézanne, Picasso, Van Gogh, Le Douanier Rousseau, Renoir, Braque. J'ai surtout aimé le seul Van Gogh, "Montagnes à Saint Rémy" et un Picasso, "La femme endormie". Cette exposition dure jusqu'en mars 2019. Ensuite, j'ai revisité la collection permanente du musée dont la salle consacrée à un de mes artistes préférés : Anselm Kiefer. Dans ce lieu circulaire, trois immenses toiles absorbent l'attention des visiteurs et je voulais absolument me replonger dans "les ordres de la nuit", une toile métaphysique, qui montre l'artiste, couché sur une terre-écorce et au dessus de lui, un ciel étoilé, l'infini selon l'artiste allemand tourmenté par les horreurs du nazisme. Anselm Kiefer se met en scène sur ses toiles de cinq mètres de haut. Le monde de cet artiste incomparable et provocateur inquiète, interroge, bouscule les certitudes. L'art sert à briser le confort intellectuel et je l'ai vérifié avec les tableaux de Basquiat, Warhol, Klein, Rothko, Chillida. Un panorama essentiel des plus grands artistes du XXe. Une salle, une des plus emblématiques du musée, expose "la Matière du temps",  sept sculptures monumentales de Richard Serra. Quand on pénètre dans ces spirales métalliques, on éprouve la sensation vertigineuse du temps et de l'espace. Ce musée, un univers fantastique… 

jeudi 1 novembre 2018

Mon escapade en Côte basque, 1

Dès que j'ai atterri à Biarritz, j'ai humé l'air marin et je me suis dirigée vers l'océan comme si un aimant m'attirait irrésistiblement. Arrivée à la Chambre d'amour, mon coin préféré en Côte basque, j'ai aperçu mes chères vagues se déroulant éternellement sur le sable dans un fracas musical digne des plus grands compositeurs. Devant mes yeux toujours éblouis et jamais blasés, j'aime observer attentivement ce spectacle océanique quelque soit le temps qu'il fait. Ce mardi, le soleil automnal dorait les falaises environnantes, les plages et les digues. Autour de moi, touristes et autochtones se mélangeaient avec gentillesse et en toute tranquillité. Chacun de nous avait envie de cette parenthèse déambulatoire en bord de mer. Les surfeurs offraient un ballet tonique, rythmé par les cris des mouettes et quand l'un d'entre eux s'élançait sur sa planche, j'espérais qu'il chevauche deux à trois vagues pour défier l'océan. J'ai revu avec intérêt les sculptures de la Biennale d'art contemporain dont celle d'Anne Wenzer, la Pieta, en glaise grise, face au phare de Biarritz. Cette manifestation culturelle de très grande qualité honore la ville d'Anglet et offre ainsi aux visiteurs du site, un panorama de l'art contemporain, souvent décrié, critiqué, ignoré, marginalisé. Je me suis toujours intéressée aux artistes vivants qui me troublent, m'enchantent et me questionnent. Le matin, je pars marcher le long de la promenade de la Chambre d'amour à la Barre où j'aperçois l'Adour qui se jette dans la mer. Ces quelques kilomètres me permettent d'admirer ce panorama grandiose. Les plages se succèdent avec leur personnalité : les Sables d'or, Marinella, les Corsaires, la Madrague, les Dunes, les Cavaliers. Je les connais toutes par cœur et j'ai souvent goûté le sel de leurs vagues, la puissance de leurs remous, leurs courants dangereux depuis mon enfance. Parfois, les paysages autour de soi se banalisent et notre attention diminue. Mais, dans mon petit coin de paradis basque, les couleurs, les odeurs, les formes s'intensifient, imprègnent ma mémoire sensuelle et même si je les ai vus des centaines de fois, cet espace océanique provoque un choc esthétique à la façon du syndrome de Stendhal devant une œuvre d'art en Italie. Mon émotion reste intacte quand je me retrouve devant "mon" Océan atlantique, une véritable œuvre d'art de Dame Nature...