lundi 24 juillet 2023

"Le Fanal bleu", Colette

 Je profite de la pause estivale pour me balader dans les lignes de mes écrivains préférés : des chemins de mots à l'ombre ! J'ai saisi dans ma bibliothèque le tome 4 de Colette car j'aime me retrouver dans son monde, une France disparue, décrite dans une prose inimitable et poétique. L'écrivaine était une gourmande dans tous les domaines et dans chaque page, je devine un amour inconditionnel et farouche de la vie. J'ai donc découvert "Le Fanal bleu", son dernier texte, écrit entre 1947 et 1949. Tous les événements racontés dans cet essai autobiographique se situent après 1946. "Le Fanal bleu" ressemble à un testament moral, un bilan lucide d'une existence consacrée à la littérature. De Genève à Paris, du Beaujolais à Grasse, elle relate ses escapades et ses rencontres dont celles avec Jean Cocteau. Et comme dans chaque livre de Colette, apparaissent les chats et les chiens qu'elle adorait, des évocations sur son quotidien, sur le jardin du Palais Royal, sur son entourage immédiat. Elle évoque avec un courage particulier sa vieillesse et ses infirmités. Un grand chapitre est réservé à Marguerite Moreno, sa grande amie intime. Ce journal un peu décousu, un peu désordonné sur des anecdotes de sa vie possède un charme désuet et nostalgique. Elle avoue ses propres faiblesses physiques étant handicapée pour marcher et pour se déplacer. Mais, avec sa force vitale, elle relativise ses douleurs diverses dues à l'âge et se résigne, avec une dose magnifique de sagesse, son propre déclin inévitable. Comme elle est "confinée" dans son appartement du Palais Royal en raison de sa santé précaire, elle s'entoure autour de son bureau divan, de tous les cadeaux qu'elle reçoit, des centaines de lettres, des visites de ses fidèles et surtout de ses papiers précieux sur lesquelles elle compose cet hymne à la vie. Même la douleur, elle veut la dompter : "Surtout, j'ai la douleur, cette douleur toujours jeune, active, inspiratrice d'étonnement, de colère, de rythme, de défi, la douleur qui espère la trêve mais qui ne prévoit pas la fin de la vie, heureusement, j'ai la douleur". Dans un autre passage, elle définit son quotidien ainsi : "Choisir, noter ce qui fut marquant, garder l'insolite, éliminer le banal, ce n'est pas mon affaire, puisque la plupart du temps, c'est l'ordinaire qui me pique et me vivifie". Vivifiante Colette ! Lire cet été quelques uns de ses livres que je n'ai pas lus encore me procure un plaisir anticipé et je savoure par avance toutes ces heures de lecture ensoleillée.