lundi 7 novembre 2016

Giorgio Morandi, peintre du silence

J'ai vu les œuvres de Giorgio Morandi (1890-1964) dans plusieurs musées européens dont ceux de Milan et de Bologne. Il est facile de reconnaître un Morandi dès que l'on pénètre dans une salle comme cela m'est arrivé à Lisbonne dans le musée d'art moderne. La nature morte est un genre artistique peu exploité au XXe siècle et pourtant, elle n'a jamais disparu des créations picturales. Giorgio Morandi a voué sa vie d'artiste à la nature morte même s'il a peint aussi quelques paysages. J'ai trouvé en furetant les tables des nouveautés à la librairie Garin un ouvrage sur le peintre de Bologne : "Giorgio Morandi, les jours et les heures" de Bruno Smolarz aux éditions Arléa. Je voulais en savoir plus sur ce peintre que j'ai découvert grâce à Philippe Jaccottet dans son livre "Le bol du pèlerin", édité chez La Dogana en 2001. Il faut parfois des années pour rencontrer un écrivain, un poète, un compositeur, un peintre et quand la découverte a lieu, il reste à approfondir le lien que l'on établit avec l'artiste en question. Bruno Smolarz n'a pas composé une biographie précise, avec des repères chronologiques, des événements, des anecdotes diverses. Il rend un hommage à Giorgio Morandi tout en nuances, tout en douceur, en décrivant la vie du peintre comme il décrirait un tableau. Le critique analyse l'œuvre sans employer un jargon technique. Bien au contraire, il donne à voir la vie simple de ce peintre dans une maison à Bologne, entouré de sa mère et de ses sœurs. Il était tout à son atelier et ne se mêlait ni de politique, ni de la société. Cette discrétion, voire cet effacement, ce retrait se retrouvent dans son art de peindre. Peindre des bouteilles, des pichets, des bols dans une mise en scène d'une sobriété palpable et géométrique parfaite relève d'une ascèse quasi métaphysique. Le critique remarque l'absence d'éléments que l'on trouve dans les natures mortes traditionnelles : des fruits, des légumes, des objets culturels, etc. Je cite Bruno Smolarz : "La peinture de Morandi s'inscrit dans la vibration d'un instant qui a peut-être commencé avec une lenteur d'éternité, il y a longtemps, si longtemps qu'il est difficile de déterminer quand elle a commencé, et l'on sait déjà qu'elle durera, pour nous, autant que l'on contemplera le tableau et, bien sûr, au-delà, tant que le tableau existera". L'observation d'une toile de Morandi ressemble à un acte de méditation silencieuse dans un monde tumultueux et bruyant...