lundi 20 avril 2020

"Contagions"

La lecture sur papier demeure encore une pratique majoritaire. Nos chers livres, au format antique des  anciens "codex", sont nés au temps de Gutenberg en 1450, avec les caractères imprimés. Ce Gutenberg est un de mes découvreurs préférés et sans lui, je me demande ce que je serais devenue… Parfois, je m'imagine cet inventeur de génie qui reviendrait sur notre Terre en 2020. Il serait éberlué de constater que nous pouvons vivre désormais sans les blocs de papier imprimé. Je lui tendrais une tablette d'un format confortable et je lui montrerais un texte téléchargé. Cette lecture virtuelle le passionnerait et il ne pourrait plus s'en passer. Ce matin, je lisais des articles sur un blog littéraire, Diacritik, évoquant un livre que les Editions du Seuil offraient en accès libre à cause du confinement. J'ai sauté sur l'occasion. Il s'agit de "Contagions" de Paolo Giordano, docteur en physique théorique et écrivain mondialement connu. Il compose son texte-manifeste en mars quand l'Italie commence à subir les premiers ravages du coronavirus. Il écrit : "Je ne veux pas passer à côté de ce que l'épidémie nous dévoile de nous-mêmes. Une fois la peur surmontée, les idées volatiles s'évanouiront en un instant". Son livre invite le lecteur à réfléchir sur ce temps qu'il nomme "anomalie" : "Nous devons apprendre à vivre dans cette anomalie, à trouver des raisons de l'accueillir qui ne soient pas uniquement la peur de mourir". Le virus en menaçant la communauté humaine nous signale aussi que "Nous sommes l'espèce la plus envahissante d'un fragile et superbe écosystème". Paolo Giordano résume sa pensée dans un article de Télérama : "La contagion actuelle est à la mesure de notre monde d'aujourd'hui : interconnectée, inextricable. Le trafic aérien permet aux virus de coloniser beaucoup plus vite des terres très lointaines". Plus loin, il affirme :"Cette épidémie dévoile les dysfonctionnements et les maladies de nos sociétés. Toutes ces choses (les privilèges, l'écologie) remontent à la surface. Elles ont toujours été là, bien sûr, mais elles sont désormais évidentes et proches". Son texte d'une richesse lumineuse constitue un patchwork de réflexions biographiques, mathématiques, littéraires et environnementales. Son message semble inviter le lecteur(trice) à comprendre en particulier "au paradoxe de notre époque : alors que la réalité devient de plus en plus complexe, nous devenons de plus en plus réfractaires à la complexité". Cet essai d'une cinquantaine de pages propose une lecture vivifiante. L'écrivain est convaincu que "l'échafaudage de la civilisation est un château de cartes", mais malgré cette fragilité et ce danger d'effondrement, il nous exhorte à vivre ces moments de cette façon : "Enseigne-nous à bien compter nos jours pour que nous donnions de la valeur à nos jours". Il faut se procurer ce texte et l'acheter plus tard en librairie quand nous serons enfin libres de nos mouvements. En Allemagne, les librairies ont ouvert aujourd'hui... Quel dommage qu'elles ne soient pas restées ouvertes ! Le livre est une marchandise essentielle à mes yeux... On se rattrapera plus tard !