jeudi 17 janvier 2019

Atelier Lectures, 4

Je reprends l'évocation des journaux intimes et récits autobiographiques avec Evelyne qui a relu le "Journal" d'Anne Frank. Ce témoignage unique sur la vie d'une adolescente confinée dans un minuscule appartement a conservé toute sa force littéraire et surtout humaine. En 1942, les Frank s'installent clandestinement dans l'annexe d'un immeuble. Ils sont arrêtés en 1944 sur dénonciation. Déportée à Auschwitz, puis à Bergen-Belsen. Anne Frank meurt du typhus en 1945, peu après sa sœur Margot. Son témoignage sur la vie quotidienne d'une famille juive dans la période nazie a marqué des générations de lecteurs(trices) et continue à émouvoir. A Amsterdam, le musée d'Anne Frank reçoit des visiteurs du monde entier et j'avais remarqué un silence religieux, solennel, respectueux quand nous montions les marches et traversions les petites pièces de l'appartement. Les jeunes qui, par groupes, défilaient dans l'appartement, ne plaisantaient pas, ne jouaient pas avec leurs smartphones… Ce journal restera à tout jamais dans notre mémoire. Odile a lu attentivement un autre journal intime, tenu par Hélène Berr, jeune juive parisienne. Elle commence à écrire en avril 1942 et décrit son quotidien d'étudiante à la Sorbonne, ses lectures, ses balades et sa vie amoureuse. Quand elle doit porter l'étoile jaune, sa vie bascule dans la peur. Elle raconte l'application des lois antijuives de Vichy, la peur des rafles et en 1944, elle est arrêtée. Elle meurt à Bergen-Belsen un an plus tard. Son journal constitue un document exceptionnel sur cette période tragique. Pendant cinquante ans, ce manuscrit était seulement un trésor familial. Consultée par les chercheurs au Mémorial de la Shoah, la famille a publié ce journal qui appartient dorénavant au patrimoine littéraire et à l'Histoire. Janelou a lu et beaucoup apprécié "Mémoire de fille" d'Annie Ernaux. L'écrivaine se souvient de l'été 1958, de sa première nuit avec un homme dans une colonie de vacances. Elle se souvient de sa jeunesse : "J'ai voulu l'oublier cette fille. L'oublier vraiment, c'est-à-dire ne plus avoir envie d'écrire sur elle. Ne plus penser que je dois écrire sur elle, son désir, sa folie, son idiotie et son orgueil, sa faim et son sang tari. Je n'y suis jamais parvenue". L'écrivaine s'appuie sur des souvenirs, des photos et des lettres à ses amies. Au fond, elle ne reconnaît pas cette jeune adolescente. Annie Ernaux ou l'écriture au scalpel, sans concession et sans fioritures. A lire sans tarder. La lecture implique une certaine solitude volontaire, l'atelier permet de nous retrouver autour des livres, des lectures partagées pour notre plus grand plaisir, du moins, je l'espère…