vendredi 6 mai 2016

Hommage à Imre Kertesz et à Jim Harrison

Ces deux écrivains n'ont rien en commun, seule leur disparition les unit dans l'au-delà. Imre Kertész était l'un des derniers survivants d'Auschwitz. L'écrivain hongrois avait obtenu le prix Nobel de littérature en 2002 et cette récompense prestigieuse avait permis à de nombreux lecteurs de découvrir cette œuvre essentielle pour appréhender la condition concentrationnaire. Son récit autobiographique, "Etre sans destin", publié en 1998, relate son expérience, à l'âge de quinze ans, de sa vie dans un camp nazi. Il a mis une dizaine d'années pour écrire ce chef d'œuvre qui marquera des générations de lecteurs comme l'inoubliable "Si c'est un homme" de Primo Lévi. Dans l'article nécrologique du journal "Le Monde", Florence Noiville écrit : "A travers tous ses livres, tous traduits chez Actes Sud, dont "Kaddish pour l'enfant qui ne naîtra pas", "Le Refus", "Journal de galère", "Le Chercheur de traces", l'écrivain se présentait comme quelqu'un qui, du nazisme au stalinisme, aura accumulé suffisamment de savoir intime sur la dictature, pour la traduire en une expérience créatrice". L'écriture, pour cet écrivain majeur du XXe siècle, est aussi "un acte de résistance profondément éthique". Il avait lui-même dit : "Je peux dire peut-être que, cinquante après, j'ai donné forme à l'horreur que l'Allemagne a déversée sur le monde (...) que je l'ai rendue aux Allemands sous forme d'art". Il faut donc lire Imre Kertész, un témoin extraordinaire de la Shoah et un humaniste pour qui la littérature était sa planche de salut. Quant à Jim Harrison, j'avais aimé son roman culte, "Dalva", qui relatait la vie d'une jeune femme, qui a 16 ans, tombe amoureuse d'un  homme Sioux dont elle a un enfant qu'elle doit abandonner. Ce roman "typiquement" américain a lancé cet écrivain publié chez Bourgois. Beaucoup de lecteurs connaissaient son physique de bucheron de l'Ouest américain, son goût très prononcé pour le très bon vin rouge du Luberon, pour le grand air et les vastes espaces. Cet écrivain sensuel, original, puissant transmettait une énergie en le lisant. Deux écrivains nous ont quittés récemment et comme je les avais rencontrés à travers leurs livres, je tenais à leur rendre hommage. Heureusement, ils sont vivants grâce à la littérature.