jeudi 28 mai 2015

"Fugue d'hiver"

Je viens de terminer "Fugue d'hiver" de l'écrivain norvégien, Ketil Bjornstad, publié chez Lattès en 2014. Mais pour lire ce roman, il vaut mieux commencer par  "La Société des Jeunes Pianistes", puis continuer avec "L'appel de la rivière" car le personnage central s'appelle Aksel Vinding, que l'on suit dans les trois textes. Si on aime les grandes sagas romanesques, venues de la Scandinavie, et si, en plus, on voue une passion pour la musique classique, alors cette suite en trois volumes intéressera cette catégorie de lecteurs.  Dans le premier tome, le jeune homme appartient à un groupe d'adolescents, futurs pianistes professionnels. Ils vivent à Oslo en 1960. Un seul obtiendra le Graal en remportant le concours très sélectif du "Jeune Maestro". Dans le deuxième volume, le jeune pianiste est désespéré car il a perdu son grand amour, Anja Skoog. Il doute de lui même et cette crise existentielle prend fin quand il tombe amoureux de la mère d'Anja, Marianne... Dans le troisième volume,  Aksel Vinding se retrouve seul car Marianne s'est suicidée. Il se sent coupable et remet sa carrière en question. Il sombre dans l'alcool, n'arrive plus à exercer son métier de pianiste. Il saisit une chance de rebondir en s'exilant dans la Norvège du Nord. La rencontre avec la sœur de Marianne va provoquer un séisme dans sa vie. Son destin est lié à cette famille tragique. Anja, Marianne, Sigrun représentent-elles en fait le même idéal féminin ? Va-t-il enfin trouver l'amour, son inspiration musicale, son talent artistique ? Ce personnage très torturé et complexe n'attire pas d'emblée la sympathie, mais l'auteur n'a pas voulu écrire un conte de fées magique, une opérette ridicule, une comédie musicale insipide. Il nous raconte le destin tourmenté d'un jeune homme indécis, cynique et égocentrique... Mais il se rachète grâce à sa passion romantique pour Rachmaninov, Chopin, Brahms et le piano... Une bonne saga pour l'été avec le côté rafraîchissant du Nord de la Norvège.
 

mercredi 27 mai 2015

Rubrique cinéma

Le film allemand,  "Le Labyrinthe du silence", du réalisateur Giulio Ricciarelli pose une question essentielle sur la justice humaine et l'impunité des criminels. En 1958,  à Francfort, le peuple allemand veut reconstruire le pays et retrouver la normalisation. Le passé nazi commence à s'estomper pour nombre d'entre eux et certains jeunes ne connaissent même pas l'horreur de l'holocauste et la réalité atroce des camps de concentration dont un des plus impitoyables, Auschwitz. Un jeune procureur,  Fritz Bauer, prend conscience par l'intermédiaire d'un journaliste que des centaines de nazis ont été réintégrés dans l'administration. Il décide de faire juger ces nazis pour la première fois sur le sol allemand. Mais il se heurte à l'opposition de la hiérarchie judiciaire. Il a tout de même, le soutien du procureur général lui demandant de rechercher des preuves pour arrêter les responsables d'Auschwitz. Le film retrace des faits historiques et le procureur en question a bel et bien existé. Il passe quelques années à lire des kilos de dossiers pour retrouver les traces des anciens nazis. Il auditionne des centaines de témoignages des victimes du camp. Il traque tout particulièrement l'immonde médecin du camp, Mengele, réfugié en Argentine et revenant régulièrement dans son pays sans être inquiété. Le jeune procureur est tenté de renoncer car il subit des pressions, des agressions, mais, sa passion de la justice l'emporte grâce à son  obstination, son combat, sa détermination, son courage. Le journaliste, Thomas Gnielka, l'accompagne dans sa démarche et quand ils décident de visiter le camp de concentration en Pologne, le journaliste avoue qu'il était soldat dans ce camp. Fritz Bauer a organisé en 1963, le procès d'Auschwitz où furent condamnés une vingtaine de nazis.  Les témoignages des rescapés sont montrés avec une sobriété pour éviter le pathos mais on a du mal à retenir ses larmes. Dans un article du journal "Le Monde", le critique évoque un film "historiquement irréprochable, à la fois émouvant et digne", un film-témoignage, un film sur la vérité, la justice, la mémoire historique, un film qui rappelle que le nazisme a été "la plus grande catastrophe de l'humanité" et qu'il ne faut jamais l'oublier...

mardi 26 mai 2015

"La traversée des plaisirs"

Patrick Roegiers est un écrivain belge de langue française. Il n'est pas connu du public mais son œuvre s'inspire de la photographie, car il a publié des monographies sur Diane Arbus, Lartigue, Doisneau, etc. Il a écrit aussi quelques romans dont "Le bonheur des Belges" en 2012. Je suis tombée par hasard sur son dernier ouvrage, "La traversée des plaisirs", édité chez Grasset en 2014. Je l'ai lu "d'une seule traite" tellement l'enthousiasme de l'écrivain pour la littérature et les livres s'avère communicative. J'éprouve une tendresse particulière pour les écrivains qui lisent, qui dévorent les textes de leurs confrères (hommes et femmes), qui ne vivent que pour leur drôle de passion : écrire, écrire et toujours écrire. Je suis persuadée que l'on ne devient pas écrivain si l'on n'est pas un grand lecteur... Ecrire et lire, deux actes similaires et la culture littéraire d'un auteur nourrit totalement son œuvre. J'ai rencontré un jour dans une bibliothèque, un peintre qui exposait ses tableaux abstraits. Quand je lui ai posé la question de ses influences "picturales", il m'a répondu qu'il ne connaissait pas les peintres d'hier et d'aujourd'hui... Je suis restée sans voix. Patrick Roegiers évoque sa reconnaissance éternelle à la littérature française, aux livres et aux écrivains. Comme il a décidé de ranger sa bibliothèque, il délivre des anecdotes drôles sur les raisons d'écrire, les maladies qui frappent les écrivains, leur taille physique, leurs goûts culinaires, leurs chambres, leur mort, leurs manies et bien d'autres sujets. Ce texte hétéroclite, ludique et éclectique va ravir les amoureux du monde littéraire, des livres et des mots. La méthode de Patrick Roegiers, l'élaboration de listes loufoques, donne à cet ouvrage un côté "Perec" qu'il admire en tout premier lieu. Dans la deuxième partie du livre, il dresse le portrait de neuf grands auteurs   : Perec, Beckett, Céline, Dubillard, Leiris, Barthes, Michaux, Robbe-Grillet, Claude Simon. Un hommage vivant, vibrant, rafraichissant. J'ai surtout retenu le portrait de Georges Perec, un de mes écrivains préférés qui a écrit cette phrase lapidaire : "Ecrire, c'est essayer désespérément de retenir quelque chose".

vendredi 22 mai 2015

Rubrique cinéma

Le film d'Emmanuelle Bercot, "La tête haute" mérite vraiment le détour. En ces temps un peu frais de la fin mai, aller au cinéma semble une belle alternative au mauvais tempo du printemps. J'aime bien le cinéma à caractère social, économique et politique et "La tête haute" correspond tout à fait à cette catégorie. Pas d'esthétisme gratuit, pas de grand spectacle, pas de luxe, aucun personnage de rêve, un sujet dur et âpre, le spectateur reste pourtant accroché tout au long de ce long métrage qui raconte la vie difficile, voire insupportable de Malony, un garçon de Dunkerque, à la dérive. Les premières images résument l'objectif de la réalisatrice. La juge pour enfants, interprétée par Catherine Deneuve, reçoit la mère adolescente et infantile de Malony et d'emblée, cette jeune maman, dépassée par sa maternité anarchique et inconsciente, abandonne son garçon qu'elle ne veut plus élever. Cet enfant perdu n'a pas de père, n'a aucune référence familiale solide et aimante. On le retrouve adolescent, dix ans plus tard et la spirale de la violence démarre à un rythme infernal. Le jeune comédien, Rod Paradot, à fleur de peau, interprète à merveille, le type de l'adolescent bouillonnant, nerveux, contracté, noué, toujours animé d'une rage autodestructrice. Il vole des voitures et agresse les conductrices. La juge pour enfants montre une patience incroyable devant ce garçon sauvage et inéducable. Elle le place dans un centre fermé où les bagarres, les conflits, les relations entre les jeunes délinquants sont leur seule forme de communication. Ils ne parlent pas, ils se battent pour régler leurs problèmes. L'éducateur, joué par Benoît Magimel, encadre Malony, le calme, le soutient, devient son deuxième référent solide après la juge. La mère aussi immature que son fils, donne une image déplorable de la pauvreté matérielle, de la misère intellectuelle et de l'amour-haine qu'elle ressent envers ses enfants. Malony ne reçoit rien en héritage... Et ce n'est pas étonnant que le manque de repères l'empêche de grandir "normalement". Il commence à murir quand il rencontre une jeune fille, touchée par le mal être du garçon. Cette relation amoureuse et un projet professionnel vont peut-être lui apporter enfin un ancrage apaisé dans la réalité. L'immense patience et la belle générosité des deux adultes représentant la justice et l'état, apportent les seules notes optimistes et chaleureuses dans ce film sombre et traversé par la violence de Malony, l'immaturité de sa mère, la misère d'une frange de la société française. Un film coup de poing comme le "Mommy" de Xavier Dolan. A voir, évidemment...

mardi 19 mai 2015

Atelier d'écriture

Mylène nous a proposé un exercice gourmand ce mardi matin. Elle a lu un texte de Colette, extrait de "Prisons et paradis" où elle décrivait un repas marocain. Il fallait donc écrire un souvenir culinaire. Voici mon texte :
"Au menu,
Pour découvrir un pays, il ne suffit pas d'arpenter les rues, les places, les jardins, les musées, les églises. Il ne suffit pas d'emprunter les bus, le métro, le train, le bateau pour partager le quotidien des habitants. Il ne suffit pas de lire des guides. Il suffit de goûter les spécialités culinaires car l'identité profonde d'un pays, c'est une symphonie de sensations gustatives. A Porto, j'ai repéré un petit restaurant, fréquenté par des authentiques autochtones. La tactique pour choisir un plat consiste à observer le contenu des assiettes déposées sur les tables. J'ai donc choisi une "dourada" grillée. Vingt minutes plus tard, le serveur me présenta le plat. Dans une assiette ovale, se tenait ma dorade entière grillée, argentée, entourée d'un côté, par des pommes de terre aplaties, cuites au four, d'un jaune doré pigmenté de taches noires, et de l'autre côté, par un mélange de légumes verts composée de carottes et de courgettes en cubes, d'oignons hachés et de lamelles de chou vert. Une apothéose de couleurs, de saveurs, d'odeurs. La fraîcheur croquante de la verdure, le goût maritime et salé de la dorade, l'odeur de terre humide des pommes de terre enchantaient mon palais. Un fil d'or s'étalait dans l'assiette : la divine et antique huile d'olive ensoleillait le plat où la mer, la terre, le ciel composaient un fado gourmand et enfin réconciliée avec la vie. Une simplicité totale et une richesse incomparable. J'avais l'impression de savourer un petit morceau du pays, le Portugal. Après avoir goûté ma dorade grillée, j'ai terminé le repas par un millefeuille aux fraises et à la chantilly, une vraie merveille... Et j'ai bu un vin blanc du Douro, indispensable pour augmenter le plaisir de la table. Si vous partez cet été à Porto, choisissez ce menu, vous ne serez pas déçu...
 

lundi 18 mai 2015

"Pour Isabel"

Je viens de terminer un roman posthume d'Antonio Tabucchi, "Pour Isabel". Cet écrivain italien m'a toujours fascinée. Toscan de naissance (il est né à Pise en 1943), il est aussi devenu portugais pour sa passion de Fernando Pessoa et il est mort à Lisbonne en 2012. Gallimard édite aujourd'hui un nouveau Tabucchi car l'écrivain conservait ce manuscrit sans vouloir le publier de son vivant. Il a commencé "Pour Isabel" en 1991 et le termine cinq ans plus tard. Le personnage central, Isabel, n'apparaît jamais comme une protagoniste active. Les chapitres sont intitulés : premier cercle, deuxième cercle jusqu'au neuvième cercle et cette construction révèle la démarche géométrique, constituée en cercles comme un mandala. Pour cerner cette femme mystérieuse, disparue sans laisser de traces, le narrateur, Tadeus,  poursuit sa quête à la recherche de témoins qui pourraient expliquer cette fuite brutale. Isabel militait contre la dictature fasciste de Salazar dans les années 60. Tadeus interroge une amie d'enfance, une vieille nounou, un gardien de prison, un saxophoniste, un prêtre. Chaque témoin délivre une information capitale qui permet au narrateur de reconstituer le destin d'Isabel comme un puzzle. Cette quête le conduit à Lisbonne, à Macao, en Suisse, à Naples. Il apprend donc par bribes, le caractère rebelle et révolutionnaire de la jeune femme, son emprisonnement, son amour pour deux hommes. Son suicide est évoqué pour brouiller les pistes. Plus le narrateur engrange des informations, plus l'image d'Isabel s'éloigne et devient un fantasme. Au fond, l'écrivain semble nous dire que "l'important, c'est de chercher. Peu importe qu'on trouve ou qu'on ne trouva pas". J'ai retrouvé, dans ce dernier roman, l'univers de cet écrivain si subtil. Il définit son projet ainsi : "Obsessions privées, regrets personnels que le temps érode mais ne transforme pas, comme l'eau d'un fleuve émousse ses galets, fantaisies incongrues et inadéquations au réel, tels sont les principaux moteurs de ce livre". "Pour Isabel" est un roman sur la mémoire, une mémoire flottante, surréelle, fantasmatique et peut-être que cette femme restera à tout jamais dans son aura de mystère pour le lecteur(trice) et pour l'écrivain lui-même...

jeudi 14 mai 2015

"La clarinette"

En mars, j'avais choisi Vassilis Alexakis dans le cadre de mon atelier de lectures et l'avis des lectrices était mitigé sur son œuvre. J'avais regretté qu'elles passent ainsi à côté d'un écrivain vraiment original et atypique dans la littérature française. Dans son dernier ouvrage, "La clarinette", j'ai retrouvé l'univers d'Alexakis, un univers bigarré, cosmopolite, bi-culturel dans le binôme que forme dans sa vie la Grèce, son pays natal et la France, son pays vital. Les thèmes de son livre autobiographique s'entremêlent, s'entrechoquent, se lient et de délient dans un désordre qui peut dérouter mais  l'écriture, les histoires, les anecdotes sont toutes reliés à un fil conducteur du récit,  la relation d'amitié entre lui et son éditeur, Jean-Marc Roberts. Cet ami, écrivain reconnu aussi, se meurt d'un cancer des poumons. Le narrateur l'interpelle en le tutoyant et lui raconte ses séjours en Grèce, la Grèce d'aujourd'hui. L'écrivain relate ses allers retours constants entre les deux pays, mais il a pris une grande décision : il quitte Paris pour Athènes. Il se souvient alors de tous les lieux qu'il veut revoir avant de partir : des places, des rues, des librairies, etc. A Athènes, il vit dans un quartier populaire, près du Mont Lycabette et il observe la crise sans précédent que traversent ses compatriotes depuis des années. Il évoque les SDF abattus, les étrangers invisibles, les magasins fermés, les tags envahissants, le moral en berne des habitants, leur courage et leur dignité. Côté Paris, il dresse le portrait attachant de Jean-Marc Roberts, son fidèle ami de toujours, qui se bat avec une élégance rare contre le cancer dont il ne sortira pas vainqueur. Dans un très bon article du Magazine Littéraire, le critique évoque "les lumières de l'endeuillé" car entre la maladie de son ami éditeur et la crise grecque, entre ses deux chagrins, l'écrivain greco-français n'oublie pas de manier l'humour, l'ironie, la tendresse et l'amour de la vie, même si les épreuves s'accumulent pour lui. Un livre lumineux, un bel hommage à Jean-Marc Roberts, à Paris et à Athènes...

mercredi 13 mai 2015

"Epicure en Corrèze"

J'ai  lu avec intérêt et sans aucune difficulté "Epicure en Corrèze" de Marcel Conche, édité chez Stock. Agé de 92 ans,  Marcel Conche est de nos plus grands philosophes d'aujourd'hui. Son œuvre abondante porte sur Montaigne, Lucrèce, Pyrrhon, Epicure, Héraclite, Anaximandre, Parménide. Il écrit sur la Mort, le Temps, le Destin, la Morale, la Nature, l'Amour, la Liberté... Il n'oublie pas la littérature en évoquant Homère, et compose un journal intime qu'il nomme "étrange" depuis 2006. Dans son dernier opus, "Epicure en Corrèze", il revient sur son passé et sur son "métier" de philosophe. Il vit aujourd'hui dans sa maison natale en Corrèze et, avec un humour délicieux, prône une vie simple, près de la nature. Il conseille la limitation de nos besoins en plaidant le bon sens et  conseille d'éliminer de notre quotidien : le four à micro-ondes, la télévision, le smartphone, le lave-vaisselle, le tourisme polluant... Ces conseils d'un philosophe, adepte de la décroissance, peuvent étonner le lecteur(trice) mais il adopte les préceptes d'Epicure en renonçant à tout ce qui n'est pas essentiel. Il se définit comme un fils de paysan, conservant cette modestie tout au long de sa vie. Il raconte son enfance à la campagne dans une France rurale disparue aujourd'hui. Jeune homme, il obtient l'agrégation de philosophie et devient professeur. Il évoque son mariage heureux avec une femme plus âgée que lui (15 ans de différence).   Dans cette autobiographie-bilan, Marcel Conche développe  le concept de Nature au sens philosophique du terme, un matérialisme paradoxalement métaphysique... Et puis, à mon grand plaisir, il cite des philosophes grecs, en particulier Epicure dans l'exergue : "Nous sommes nés une fois, il n'est pas possible de vivre deux fois, et il faut n'être plus pour l'éternité : toi pourtant, qui n'es pas de demain, tu ajournes la joie ; la vie périt par le délai, et chacun de nous meurt affamé". A la fin de l'ouvrage, Il écrit l'éloge de la maturité, de la vieillesse, du travail intellectuel qu'il n'a jamais délaissé. Bernard Pivot, dans le JDD, qualifie ce livre de "simple, délicieux, d'une tranquille sérénité, une familière leçon de sagesse".  En ces temps turbulents de tension sociale, de tyrannie de l'immédiateté médiatique, il est bon de retrouver un ancien, un sage, un philosophe, une "belle personne". Cela devient de plus en plus rare... 

lundi 11 mai 2015

Rubrique cinéma

En ce moment, peu de films me tentent et quand je me décide pour en voir un, il a disparu des programmes... La semaine dernière, j'ai quand même franchi les portes du Forum pour le dernier Wim Wenders, "Every thing will be fine", coproduit par trois pays : l'Allemagne, la Grande-Bretagne et la France, avec Charlotte Gainsbourg, Marie-Josée Croze et James Franco. Ce film étrange, parfois lent, se déroule au Canada, en hiver. Le personnage central, Tomas, est un écrivain en mal d'inspiration. Il se perd dans la campagne toute blanche de neige et percute avec sa voiture, une luge. En descendant de sa voiture, il aperçoit un petit garçon qui n'est pas blessé. Quand il porte l'enfant sur ses épaules et le présente à sa mère, le drame éclate. En fait, le petit garçon était accompagné de son frère... L'un est sauvé, l'autre n'a pas survécu. Cet accident plonge la mère, interprétée par Charlotte Gainsbourg, dans un désespoir proche de la folie. Tomas se sent coupable d'avoir provoqué cet accident mortel. Cet événement tragique transforme sa vie. Il rompt avec sa compagne qui rêve d'avoir une famille, commence à boire et pense au suicide. Mais, l'écriture d'un roman va le sauver de cette descente aux enfers et il commence à connaître le succès. Il vit dans une belle maison, a refait sa vie avec une femme divorcée ayant une petite fille. Tout va mieux pour lui. Il semble avoir oublié cet accident. Mais, un jour, tout rebascule dans sa vie... Il revient sur le lieu de l'accident et noue avec la mère de l'enfant une relation particulière. Leur passé commun, la perte de l'enfant, crée un lien mystérieux entre eux. Ils ressentent une culpabilité insurmontable et ils se confient enfin en évoquant la mort de l'enfant. Elle souffre d'avoir été négligente et lui, se rend compte de l'extrême solitude de cette femme dépressive. Leur rencontre, après une dizaine d'années, ravive ce drame et provoque des changements dans leur vie. Je ne dévoilerai pas la fin de ce film... Wim Wenders nous parle de chagrin, de la culpabilité, de l'absurdité du destin, mais aussi, de pardon, de résilience, de retour à la vie...

jeudi 7 mai 2015

"Portrait craché"

Jean-Claude Pirotte, avant de mourir d'un cancer en 2014, a écrit un texte autobiographique d'une émotion retenue. Le titre du livre, "Portrait craché" rappelle l'infirmité dont il souffrait dès la première phrase : "La paralysie faciale a déformé ses traits." L'auteur parle de lui à la troisième personne pour créer une distance ironique entre lui et son double malade. Poète, écrivain, peintre, il a toujours vécu pour la littérature et pour les livres. Son œuvre s'inscrit dans un mouvement "clandestin" littéraire et ses frères en écriture se nomment Georges Perros, Henri Thomas, Valérie Larbaud, André Dhôtel, etc. Pirotte ne figure pas dans les listes des best-sellers, la vente de ses livres dépasse rarement le millier d'exemplaires, mais, il a pour moi une très grande importance et peu importe s'il est peu connu du grand public. De temps en temps, il faut délaisser les auteurs à succès pour découvrir les authentiques amoureux du langage et de la littérature.  Dès les premières lignes, il parle de sa maladie, le cancer et il continue pourtant à savourer son tabac... Il affronte avec un courage philosophique la fin de sa vie, se sachant condamné. Il écrit : "La vie n'est qu'une longue attente du rien". Il a déménagé pour vivre près d'un hôpital et il est parti, le cœur brisé, sans sa bibliothèque. Son texte est un hommage magnifique aux livres et aux écrivains qui l'ont accompagné tout au long de son existence. Il évoque ses passions de toujours : Nerval, Joubert, Montaigne, Bachelard, Arland, entre autres. Je cite ce passage: "Ce sont, depuis l'enfance, les livres qui lui ont assuré la vie".  Plus loin, il ajoute : "Aussi physiquement diminué, soit-il, l'univers de la lecture ne cesse de s'ouvrir à lui, ménageant en dépit des avanies de destin les portes dérobées d'une intime jouissance." Malgré sa détresse morale et sa souffrance physique, il a gardé sa foi entière dans la littérature, "Le livre survivra à l'humanité moribonde. (...) Lieu commun des réprouvés, le livre scintille encore, en ce temps de barbarie exponentielle". Dans ce testament autobiographique,  Jean-Claude Pirotte raconte avec une sincérité poignante sa fin douloureuse dans la lumière des livres.

mercredi 6 mai 2015

Atelier de lectures, 2

La deuxième partie de l'atelier était consacrée à deux femmes écrivains : Michèle Lesbre et Maylis de Kerangal, deux planètes différentes, singulières et attachantes. La première est née en 39, a publié une bonne quinzaine de romans chez Sabine Wespieser depuis 1991 dont son dernier "Chemins" cette année. Il est assez périlleux de résumer chacun de ses livres. De "Boléro" au "Canapé rouge", du "Lac immense et blanc" à "La petite trotteuse", elle poursuit la même quête du temps retrouvé à la façon d'un Patrick Modiano, ou de Marcel Proust. Ses romans ressemblent à la musique de chambre, intimiste, délicate, nostalgique. Des duos, des trios, des quatuors, toutes ces formes musicales se retrouvent dans son œuvre subtile avec le fil conducteur de la nostalgie, de la saudade, ce sentiment du temps perdu, du passé évaporé, des regrets, des souvenirs flous, opaques.  La narratrice de ses opus musicaux hante les gares, occupe des maisons en solitaire, rencontre des gens avec empathie, se souvient des amours anciennes, évoque souvent des écrivains fétiches, des films culte. Cette écriture impressionniste peut dérouter mais, pour lire Michèle Lesbre,  il faut se laisser aller sans analyser mot à mot le sens de sa pensée. Il faut arpenter sa prose comme des chemins de campagne, qui conduisent peut-être nulle part mais qui soulignent la singularité d'une œuvre palpitante et émouvante. Certaines lectrices ont aimé, d'autres étaient déçues par cette œuvre labyrinthique. Les romans de Maylis de Kerangal dont le génial "Réparer les vivants" attirent l'admiration des lectrices même si la lecture demande une certaine tension, une attention soutenue.  Son style unique d'une beauté rare, la construction de l'histoire, les sujets choisis (autour d'un chantier de pont, sur la transplantation cardiaque, sur une corniche, dans un train de Russie) forment une œuvre originale et forte. Dans "Corniche Kennedy", paru en 2008, l'écrivain raconte l'histoire d'une bande de jeunes à Marseille qui se jettent dans l'eau en frôlant le danger. Cette audace transgressive insupporte les autorités municipales et les jeunes sont mis sous surveillance. Je cite cet extrait pour montrer le style "Kérangal" : "Les petits cons de la corniche. La bande. On ne sait pas les nommer autrement. Leur corps est incisif, leur âge dilaté entre treize et dix-sept, et c'est un seul et même âge, celui de la conquête : on détourne la joue du baiser maternel, on crache dans la soupe, on déserte la maison". Daniel Pennac dans la revue Lire définit ainsi le roman "Réparer les vivants" : "C'est un livre extraordinaire dont l'écriture relève de la pure sensation. Son style est une nouveauté totale, avec une langue qui sait être extrêmement précise et particulièrement évocatrice." Michèle Lesbre et Maylis de Kerangal ont un public solide et fidèle malgré leur discrétion médiatique exemplaire. L'une utilise le roman pour raconter un passé perdu, l'autre manie la plume comme un scalpel pour ciseler un présent intense. Mon objectif dans l'atelier a peut-être été atteint quand les écrivains que je choisis, sont lus et appréciés... 

mardi 5 mai 2015

Atelier de lectures, 1

Nous étions neuf lectrices dans cet avant-dernier atelier de lectures de la saison 2014-2015. Nous avons démarré la séance avec les coups de cœur. Janelou a en eu un vrai,  qui est aussi un véritable coup de poing en découvrant "Le Chagrin" de Lionel Duroy, un roman autobiographique ayant déjà rencontré un grand succès auprès du public. L'écrivain règle ses comptes avec ses parents, ses frères et ses sœurs, mais on ne se débarrasse pas facilement de sa famille, lieu où toute vie d'adulte se structure et se définit. Un grand roman "autofictionnel" à lire pour découvrir cette saga comico-tragique des relations familiales. Janelou a aussi présenté "Hans et Rudolf" de Thomas Harding, un ouvrage sur la double éducation d'un jeune juif, Hans, et d'un jeune allemand,  Rudolf, qui devient un chef nazi. Véronique a choisi un documentaire très bien fait pour mieux connaître la campagne, "La nature en bord de chemin" et le roman de Rufin, "Le collier rouge" déjà commenté dans l'atelier. Marie-Christine a aimé "Rien ne s'oppose à la nuit" de Delphine de Vigan, un roman-enquête autobiographique sur le suicide de sa mère. Un livre "coup de poing" comme celui de Lionel Duroy dans une thématique semblable et universelle : les secrets de famille... Dany a aussi découvert un des plus grands succès de l'année 2014 : "L'amour et les forêts" d'Eric Reinhardt, un roman terrible sur la vie d'une femme, renonçant à son identité pour se fondre dans une vie de couple où le mari joue le rôle de l'ogre dévoreur, monstrueux dans son harcèlement. Un livre fort et dérangeant. Sylvie a lu avec beaucoup de plaisir, "Les oreilles de Buster" de la romancière suédoise, Maria Ernestam. Eva, 56 ans, écrit son journal intime où elle avoue qu'elle veut tuer sa mère. Enfant, elle s'exerce sur son chien Buster dont elle garde les oreilles... Va-t-elle passer à l'acte ? Il faut lire ce roman singulier pour découvrir la vérité sur Eva. Danièle a présenté avec conviction l'autobiographie du grand écrivain cosmique et baroque, Gabriel Garcia Marquez, "Vivre pour la raconter", parue en poche. L'écrivain colombien raconte avec sa faconde habituelle, son enfance, son pays, ses parents, ses lectures et les fondements de sa future vie d'écrivain. Un livre essentiel dans l'œuvre de ce géant de la littérature. Mylène a voulu parler de théâtre avec un grand coup de cœur pour la pièce de théâtre de Wadji Mouawad, "Incendies" qu'elle a vue à Cognin. Un grand texte sur les dégâts de la guerre au Liban et le message du dramaturge qu'elle a retenu : "Si tu veux t'en sortir dans la vie, il faut apprendre à lire, à écrire, à compter, à parler et à penser". Elle a évoqué le dernier Régine Detambel sur "Les livres prennent soin de vous", hommage formidable sur les livres qui font du bien. Des offres de lecture à saisir, voilà tous ces coups de cœur de la première partie de l'atelier...

lundi 4 mai 2015

Escapade à Aveiro, 5

Deuxième sortie à Aveiro, la veille de mon départ : j'ai repris le train pour découvrir cette station balnéaire à 60 kilomètres de Porto. Cette petite ville, à huit kilomètres de l'océan, possède une gare couverte de fresques d'azulejos. Ces images en céramique raconte l'histoire de la cité, les marais salants, la pêche, un art de vivre en bord de mer. J'ai aperçu la bibliothèque municipale et je suis rentrée pour la visiter. Installée dans une belle villa des années 20, elle a un charme fou car les colonnes portent des citations littéraires, des photos d'écrivains couvrent les murs, des fauteuils parsement l'espace, et les rayonnages de livres sont disposés sur des estrades : un lieu confortable, convivial et ouvert sur l'extérieur. L'existence des bibliothèques publiques partout en Europe (et ailleurs) reste encore (et pour toujours, je l'espère) un acquis indispensable pour la culture et l'éducation. J'aime rentrer dans toutes les "niches" des livres même si je ne comprends la langue du pays. La réputation d'Aveiro repose sur la présence de canaux, traversant la ville à l'aide de bateaux en bois très colorés, les "moliceiros", voués au tourisme aujourd'hui. J'ai donc effectué la balade tranquille sur l'eau pour voir le village des pêcheurs. Après la gare couverte d'azulejos, les canaux, la bibliothèque, j'ai visité un tout petit musée sur l'art nouveau des années 20, une église pleine de merveilles baroques et surtout le musée d'Aveiro, situé dans un ancien couvent du XVe siècle. J'ai découvert la première salle où trône le tombeau de Santa Joana, une princesse portugaise ayant renoncé à sa condition pour entrer dans les ordres. Ce musée présente une église d'une exubérance baroque, un cloître Renaissance s'ouvrant sur plusieurs chapelles, un réfectoire, la salle capitulaire. Le musée abrite aussi une collection d'art sacré où l'on retrouve des Christ en croix, des statues expressives, torturées par la foi, des angelots, des portraits de saints, etc. Quand j'arpentais les espaces de ce musée-couvent, j'imaginais la vie de ces religieuses dont Joana, leur quotidien étant scandée par un rituel sacré et silencieux. En retournant à Porto, j'ai remarqué la présence de jeunes dans le train car Aveiro est aussi une ville universitaire, pôle d'excellence dans les nouvelles technologies avec ses 6000 étudiants. J'ai regretté de ne avoir vu le bord de l'océan, mais les mouettes des canaux signalaient la présence de la mer près de la ville. Dans mon escapade portugaise, j'ai oublié de mentionner la présence de l'océan à Porto que j'ai rejoint tous les deux jours en tramway pour respirer l'air du large, me balader sur la promenade en bois tout au long des plages, me ressourcer avec les vagues danseuses et écumeuses, chercher des coquillages sur le sable, m'accorder des moments maritimes, hors de la ville, une alternance idéale entre les découvertes citadines et la nature océanique... Porto et son fleuve, Coimbra et son université, Aveiro et ses marais salants, un petit bout du Portugal, une mosaïque dans tous les sens du terme : des Portugais formidablement énergiques, dignes et empathiques,  un fleuve à échelle humaine, des églises magnifiant la foi chrétienne, des vignes qui donnent des vins savoureux (dont le Porto), des azulejos qui illuminent les murs, un pays émouvant et attachant... J'y retournerai, évidemment...
 

samedi 2 mai 2015

Escapade à Porto, 4

Après la très belle étape à Coimbra, retour sur Porto. Cette ville ne s'appréhende pas en deux jours... Comme il existe un grand nombre d'églises baroques, j'ai poursuivi mes visites en les découvrant les unes après les autres dans des quartiers où peu de touristes s'aventurent, se concentrant sur les quais de la Ribeira, avec ses terrasses de bar, ses étalages de souvenirs et les vendeurs de promenade en bateau sur le Douro. Je crois que le vrai Porto se situe dans les rues très étroites avec des immeubles rénovés et aussi abandonnés par les habitants, noircis par l'humidité et l'ombre. J'ai appris que Porto avait perdu 30 % de sa population. Beaucoup de jeunes partent travailler en France, en Allemagne et en Angleterre. Certains portuans ont préféré le confort des appartements en banlieue, très bien desservie par le métro. Il reste donc beaucoup d'anciens à Porto, ce qui donne aussi à la ville une tranquillité sereine, une convivialité appréciable car j'ai souvent entamé des conversations avec certains d'entre eux quand ils parlaient un peu en français. Un grand plan de rénovation s'est mis en place depuis cinq ans pour sauver les vieux immeubles en ruines. De rue en rue, il faut lever les yeux pour cibler des détails infimes : des décorations en azulejos, des statues religieuses, des balcons en fer forgé, des terrasses-jardins, des façades art nouveau des magasins. Et toujours les mouettes dans le ciel, comme des signatures vivantes avec leurs plumes blanches et leur bec jaune... Un matin, je me suis dirigée vers une librairie ancienne et quand j'ai poussé les portes, je me trouvais dans un cabinet de curiosités, rempli de livres mais aussi d'objets d'écriture, de musique, dans des vitrines au milieu du magasin. J'ai demandé des ouvrages sur le grec ancien et le libraire m'a entraînée dans le sous-sol, une vraie caverne, où s'entassaient des milliers de livres. La majorité étaient de langue portugaise mais pour mon grand plaisir, j'ai découvert le dictionnaire grec-français de Bailly, édition 1901, et "La pensée grecque" de Léon Robin, édition 1925. Je suis repartie avec ses deux ouvrages en me demandant comment ils avaient atterri dans cet endroit... Le dictionnaire appartenait à une certaine Maria Da Graça Bessa. Qui était cette femme qui apprenait le grec ancien au début du siècle ? Je ne le saurai jamais. Dès que j'aperçois une librairie ancienne, j'aime me plonger dans cette ambiance de chercheur d'or. Porto recèle des pépites qu'il faut dénicher, hors des sentiers battus et rien ne vaut cette déambulation hasardeuse dans les rues labyrinthiques. Il ne faut pas quand même bouder les clichés touristiques : j'ai pris le bateau rabelo pour me balader sous les ponts de Porto, j'ai pris le téléphérique et le funiculaire pour admirer le paysage urbain. J'ai utilisé le tram, le train, le bus, le taxi. Et c'est dans les transports urbains que l'on devine la vie quotidienne des citadins.  Je ne prends jamais le car à touristes, trop facile à mes yeux pour découvrir une ville qui se... mérite !

vendredi 1 mai 2015

Escapade à Coimbra, 3

Dans ma décision d'escapade à Porto, je voulais réaliser un de mes rêves : visiter une des plus anciennes bibliothèques du monde, la bibliothèque Jaonina de Coimbra. Située à une centaine de kilomètres de Porto, j'ai pris le train, le "Pendular", une sorte de TGV portugais. J'ai voyagé dans un confort appréciable, journaux et boissons servis avec le sourire et gratuitement... Arrivée à Coimbra, j'ai littéralement crapahuté à travers des rues en pente pour atteindre le célèbre site universitaire situé sur les hauteurs, le vrai cœur de la cité, crée en 1308 et étant la seule université du pays jusqu'en 1911 ! Quand j'ai pénétré dans la cour, j'ai senti le parfum des siècles d'étude, de savoir, d'intelligence... Dominant la vallée et le fleuve Mondego, j'ai visité la salle des examens, la chapelle Sao Miguel avec son orgue baroque de 1733. J'avais un rendez-vous précis pour la Joanina à 13h car le guide fait pénétrer dans l'enceinte du bâtiment une cinquantaine de visiteurs.  Et à ce moment-là, quand je suis rentrée dans la première salle, j'ai vécu un moment rare d'émotion esthétique que l'on surnomme le syndrome de Stendhal... J'avais vu des photos de la bibliothèque, mais il manque l'odeur du papier, la chaleur du mobilier, les dimensions, les détails, la hauteur du plafond, les couleurs chatoyantes... Un paradis pour les amoureux des livres ! Offerte par le Roi Jao V en 1717, grâce aux diamants du Brésil, le Routard la surnomme la TGBB, la Très Grande Bibliothèque Baroque : trois grandes salles aux murs couverts de 6O OOO livres anciens, des rayonnages en bois du Brésil et des boiseries sculptées, laquées de vert, de rouge, de noir et d'or. Une galerie court sur tous les murs pour mieux atteindre les ouvrages. J'imaginais les générations de chercheurs, de lecteurs, d'étudiants dans cet espace magique, ce temple du savoir, cette église des connaissances, des "Lumières. Je devenais la bibliothécaire attitrée, en train de cataloguer un incunable et je me projetais dans ce passé mythique du l'histoire des livres quand ces objets si précieux détenaient la plus haute importance et suscitaient le plus grand respect. Cette bibliothèque, joyau de l'art baroque, écrin du savoir humain, ne pouvait qu'enchanter une ancienne bibliothécaire !  Ensuite,  j'ai visité le musée Machado de Castro dont le crytoportique romain constitue son originalité. Et comme dans tout le Portugal, deux cathédrales méritaient le détour avec le faste baroque attendu. J'ai croisé une étudiante en cape noire, l'habit traditionnel des jeunes inscrits à l'université... Coimbra, une étape indispensable pour admirer cette vieille, très vieille université, impressionnante par sa grandeur physique, fascinante par sa dimension intellectuelle et universelle. Un grand moment dans mon escapade portugaise.