mercredi 16 octobre 2013

"Les renards pâles"

J'avais évoqué l'œuvre singulière de Yannick Haenel après avoir lu son récit autobiographie "Le sens du calme", dans la collection "Traits et portraits" au Mercure de France. Son roman "documenté" sur le résistant polonais "Jan Karski" avait touché un lectorat plus élargi à cause d'une polémique, lancée par Claude Lanzmann. Yannick Haenel utilise la littérature comme un art du "dérangement", du "dérèglement", un absolu, un horizon infini. Dans son dernier roman, le personnage récurrent, Jean Deichel, poursuit sa quête de la solitude extrême, de l'isolement social, de la marginalité physique et intellectuelle. Il vit dans sa voiture dans une rue de Paris, n'a aucun revenu, se lave dans les douches d'une piscine, lit gratuitement dans une bibliothèque et fréquente des sans-papiers, des SDF, des "sans-travail". Sa radicalité du "rien", du vide va peu à peu se transformer dans un "nous" des "laissés pour compte" de la société capitaliste, mondialiste et égoïste. Il évoque les "renards pâles", des divinités Dogons, qui servent d'emblème à la nouvelle révolution anarchiste qui mettra le feu à Paris. Ces Communards, les "Misérables" du XXIème siècle, portent un masque comme les Anonymous du Net. Ils veulent détruite la notion d'identité, d'appartenance, d'ancrage social. Le projet de Yannick Haenel dans cette théorisation d'une nouvelle révolution m'a laissée sceptique. J'avoue que ce roman, pourtant très soutenu par la presse, en particulier dans le Monde des livres du 23 août, provoque soit une adhésion enthousiasmante, soit un rejet total. J'ai essayé de comprendre sa démarche de "d'écrivain-militant anarcho-révolutionnaire"  mais je déclare forfait pour ce dernier opus de Yannik Haenel, malgré le style, malgré la critique souvent juste d'une société inhumaine...