mardi 8 août 2017

"Eloge du risque"

Quand j'ai appris le décès accidentel de la psychanalyste, Anne Dufourmantelle, j'ai regretté de ne pas l'avoir lue avant sa disparition. J'ai trouvé trois de ses ouvrages à la médiathèque et j'ai commencé par "L'éloge du risque", paru dans la collection Manuels de Payot en 2011. Dans la notice nécrologique du Monde, j'ai appris qu'elle était née à Paris en 1964. Philosophe, romancière, psychanalyste, éditrice, elle était l'amie de Jacques Derrida et d'Avital Ronell. Analysée par Serge Leclaire et membre active du Cercle freudien, elle pratiquait son métier avec une empathie que tous ses patients évoquaient. Elisabeth Roudinesco écrit : "Cette chercheuse inlassable (...) faisait preuve d'une humanité exceptionnelle, attentive aux souffrances d'autrui et prête à se dévouer en toutes circonstances". Son "Eloge du risque" se lit très facilement sans jargon technique, ni style alambiqué. Il est question d'audace, de rupture, de survie et surtout de l'appropriation de son existence dans toutes ses dimensions : amoureuse, familiale, professionnelle, culturelle, etc. Je cite ses mots : "Risquer sa vie c'est d'abord, peut-être de ne pas mourir. Mourir de notre vivant, sous toutes les formes du renoncement, de la dépression blanche, du sacrifice". Elle  compare le risque au "kairos" grec, une notion très connue dans l'Antiquité, signifiant "saisir sa chance", prendre un risque, changer sa vie... Anne Dufourmantelle définit le risque comme le contraire de la névrose "dont la marque de fabrique est de prendre aux rets l'avenir de telle sorte qu'il façonne notre présent selon la matrice des expériences passées, ne laissant aucune place à l'effraction de l'inédit, au déplacement, même infime, qu'ouvre une ligne horizon." Avec une cinquantaine de chapitres très brefs, la philosophe-psychanalyste évoque des sujets d'un éclectisme évident. Je cite par exemple : "au risque d'être libre, au risque d'être triste, quitter la famille, au risque de l'inconnu, solitudes, rompre, que cessent nos tourments". Ce livre fourmille d'anecdotes littéraires, philosophiques, mythologiques, culturelles. Un vrai bonheur de lecture... Je vais l'acquérir pour le conserver dans ma bibliothèque car le lecteur peut y puiser un art de vivre, un art de penser, un art du risque... Je consacrerai dans mon blog quelques billets sur les ouvrages d'Anne Dufourmantelle que j'ai donc découverts cet été.