mardi 11 septembre 2018

Eloge des marque-pages

J'ai arrêté depuis longtemps de collectionner des objets divers. J'avais commencé dans les années 90 une collection d'encriers anciens, sympathiques et symboliques outils d'écriture à la plume. J'en ai conservé quelques uns, les plus beaux, que j'ai déposés sur les rayonnages de ma bibliothèque. J'ai compris que ce style d'objets allait prendre trop de place dans ma petite maison. Déjà, les livres prennent leurs aises chez moi et je leur donne une priorité absolue. J'ai donc commencé à m'intéresser à un compagnon utile des livres : le marque-page. Cet objet possède à mes yeux un nombre indéniable de qualités : sa légèreté (sauf s'il est en plomb), sa dimension (il ne dépasse pas quinze à vingt centimètres), sa texture agréable (papier ou autres), son utilité (pour marquer la lecture), ses citations, son élégance, sa discrétion. Depuis que je lis, j'ai toujours utilisé un marque-page car il ne faut pas blesser un livre en lui cornant les feuilles. J'en possède donc une bonne centaine rangée dans un tiroir selon leur typologie. Le matériau le plus courant utilisé est le papier cartonné, solide et indéchirable. Mais, il m'est arrivé d'acquérir dans mes escapades des supports originaux : métal, cuir, tissu, magnet et même en bois. Une amie m'a récemment offert un marque-page en bois, fabriqué en France, sur lequel sont gravés des mots relevant de la lecture : poème, rêver, lire, découvrir, roman, etc. Ma mère, connaissant ma passion des livres m'avait offert deux marque-pages brodés de sa main. Je les conserve précieusement comme si elle me tenait toujours compagnie. J'ai aussi un marque-page en cuir qui a voyagé d'Oxford à Chambéry après un séjour linguistique de mon fils quand il avait quatorze ans. En fait, ces objets ne sont pas seulement des marque-pages, mais, à mes yeux, je pourrais les nommer des marque-mémoires, des marques du passé, des marques de mes émotions, des petits cailloux en papier d'un parcours au milieu des livres. Dès que je visite un musée, je repars avec des marque-pages sur des tableaux ou des sculptures. J'ai ainsi une collection d'art et quel plaisir d'en utiliser un avec Caravage, Brueghel, Morandi, etc. A Lisbonne, j'ai trouvé le portrait de Pessoa. A Athènes, j'ai acheté une série des philosophes grecs avec des citations. Je débusque ces petits trésors modestes dans mes escapades et je les glisse dans ma valise sans aucun souci… Je change ces bouts de papier dans mon livre du moment selon mon humeur du jour. Au fait, j'ai encore de la place dans la maison pour les collectionner et heureusement, car je ne vais jamais me passer de ce plaisir simple et peu couteux : former un bataillon de marque-pages pour mes lectures d'aujourd'hui et de demain et aussi en offrir à tout mon entourage !