vendredi 27 septembre 2013

"En marge des jours"

J'avais écrit un billet sur J.-B. Pontalis concernant son dernier ouvrage posthume "Marée basse, marée haute". J'avais même citer un passage pour montrer l'art d'écrire de ce psychanalyste-écrivain, disparu cette année. Il dirigeait aussi une collection à la lisière de l'autobiographie, collection attachante, originale, unique, "L'un et l'autre" chez Gallimard. Cette semaine, j'avais envie de retrouver ce grand compagnon de littérature et j'ai donc lu deux de ces récits : "Le songe de Monomopata" (2009), et "En marge des jours" (2002). Evidemment, en parcourant ces mini-textes qui composent les deux recueils, j'ai ressenti le même sentiment d'adhésion, d'empathie et d'admiration pour cet écrivain, mélangeant des considérations psychanalytiques à des notations quotidiennes, comme deux vies superposées, deux vies cumulées, deux vies pleinement vécues. Je ne peux absolument pas relater des faits, des sujets, des événements, tirés de ces ouvrages. Pas de fil narratif, pas de construction rigide, mais des fragments, des impressions, des anecdotes, des idées, des réflexions, des rêves surtout. Le premier récit évoque l'amitié, son rôle dans la société, ses différentes formes, mais J.-B. Pontalis n'écrit pas un document sociologique, il parle des ses propres amis, en particulier de Jean-Pierre Vernant. Il évoque ses premiers compagnons rencontrés dans ses premières lectures et raconte l'amitié comme un art d'être. Le deuxième ouvrage "En marge de jours" procure le même bonheur de lecture et je ne peux pas m'empêcher de vous citer un passage qui résume l'esprit et le style "Pontalis" : "Si c'était quand le corps commence à se déglinguer qu'on ressentait que l'âme n'a pas d'âge. Les deux perceptions vont de pair. La perception d'un corps diminué, malade, mortel s'accompagne du sentiment que notre "âme" ignore le temps qui passe, qu'en nous-même tous nos âges sont présents, se mêlent et ne font qu'un. L'impérissable, l'indestructible, à défaut de l'immortel, est comme appelé en contrepartie de la conscience devenue plus évidente qu'on a de son corps déclinant. Refus de la défaite." Il faut lire ou relire cet écrivain rare et subtil, que je ne cesse de découvrir au fil de ses nombreux recueils, tous édités dans la collection Folio, et à glisser dans sa bibliothèque comme des présences amicales...