vendredi 1 novembre 2019

"Par les routes"

Sylvain Prudhomme, jeune écrivain français, compose avec son "Par les routes", une fugue musicale autour de trois personnages : le narrateur, Sacha, Marie et son compagnon, l'autostoppeur. Sacha quitte Paris pour s'installer dans une ville du sud, où vit aussi un ami mythique avec lequel il a parcouru les routes de France quand ils étaient jeunes. Les voilà tous les trois dans la quarantaine et à cet âge-là, tout peut se rejouer. Marie travaille chez elle comme traductrice de l'italien et particulièrement de Marco Lodoli. La jeune femme accepte les lubies de son autostoppeur qui part de temps en temps sur les routes, son métier d'autoentrepreneur lui permettant de s'absenter régulièrement. Sacha traverse une crise existentielle : "A V., je comptais mener une vie plus calme. Ramassée. Studieuse. Je rêvais de repos. De lumière. D'une existence plus vraie. Je rêvais d'élan. De fluidité. D'un livre qui viendrait d'un coup, en quelques semaines à peine". Sacha loue un petit studio comme au temps de ses études. Un redémarrage régénérant. Il retrouve un cousin qui habite la petite ville et surtout il contacte son ancien ami qu'il n'a pas vu depuis vingt ans. Celui-ci lui présente sa compagne, Marie, et son fils Agustin. Tout se passe dans une parfaite harmonie. Son ami lui raconte alors sa quête obsessionnelle de partir sur les routes. Il photographie les hommes et les femmes qui ont la gentillesse de le prendre en autostop. Cette soif de rencontres hasardeuses le passionne et des bouts de vie se déroulent au fil du texte. Peu à peu, des liens affectifs entre Sacha et Marie se tissent à cause des absences répétées de l'autostoppeur (il n'a pas de prénom dans le roman). L'autostoppeur envoie des cartes postales de tous les lieux visités mais, un jour, il ne donne plus de nouvelles. Marie finit par perdre sa sérénité et s'interroge sur ce trio amoureux. L'autostoppeur semble sacrifier sa vie de famille pour sa passion de la liberté qui commence à se conjuguer difficilement avec la patience de Marie et les attentes de son fils. Le narrateur, peu à peu, remplace son ami auprès du petit garçon et surtout auprès de Marie. L'autostoppeur va-t-il revenir au sein de son foyer ?  Je ne dévoilerai pas la fin de ce roman subtil à l'écriture finement ciselée dans une simplicité trompeuse. Le vagabondage sur les routes, loin du confort familial, montre le malaise, le mal être du personnage. L'un se libère des liens pour fuir le réel, l'autre au contraire noue des liens pour s'ancrer dans le réel, des jumeaux complémentaires qui, peut-être, ne sont qu'un seul personnage. Ce très bon roman au charme certain mériterait d'obtenir un prix littéraire, pari tenu…