mardi 6 février 2018

"Gratitude"

Charles Juliet vient d'écrire le tome IX de son journal qui couvre les années 2004-2008. Dès les premiers mots du journal, l'écrivain invite son lecteur à partager ses pensées intimes, sa vie intérieure, ses rencontres, ses amitiés avec beaucoup d'artistes, ses voyages. Il rentre de Nouvelle-Zélande à cette époque et retrouve son village de Jujurieux dans l'Ain : "A Wellington, l'être s'épandait, se diffusait, se perdait dans de vastes espaces. Ici, j'ai aimé ce voile qui me cachait la campagne, m'invitait au repli, aux errances intérieures". Son journal parle de ses rêveries, de ses promenades à la campagne, de son sentiment de paix qu'il vit aujourd'hui alors que, dans sa jeunesse, ses tourments et ses angoisses le maintenaient dans une souffrance réelle. Dans ces années de maturité, Charles Juliet s'est réconcilié avec lui-même et se préoccupe en priorité des autres. Il évoque souvent ses nombreuses rencontres avec ses lecteurs qui semblent lui vouer une admiration légitime. Le diariste n'oublie pas les inconnus qui vivent des situations difficiles, qui subissent des maladies graves, des deuils, des pertes irréparables. Le fracas du monde le touche et il note des événements qui le scandalisent. L'empathie généreuse de Charles Juliet se manifeste au fil des pages jusqu'à la rencontre avec un homme de mauvaise foi qui déleste l'écrivain de quelques centaines d'euros. Sa naïveté confondante fait sourire le lecteur(trice). Cette prose poétique d'une grande clarté réclame une lecture attentive, silencieuse et contemplative. Charles Juliet se confie, se révèle, raconte, conte, commente et analyse la vie, sa vie, la vie des autres qui n'ont pas la chance, dit-il, de vivre "en littérature". "Ecrire est un action grave. Certes, écrire, c'est creuser en soi, c'est fixer dans des mots notre lutte contre la fuite des jours, contre la fatalité de la mort, contre ce qui nous ronge, parfois nous terrifie". Sa vocation d'écrivain naît dans cette quête de sens, dans cette obsession de noter tous les instants de l'existence pour qu'ils ne sombrent pas dans l'oubli. Un très beau journal intime d'un écrivain très attachant...