mercredi 13 septembre 2017

Voyager avec Marguerite Yourcenar

Je possède un défaut courant chez les passionné(e)s de littérature : j'accumule des livres au fil des jours et j'éprouve parfois le sentiment de ne plus avoir assez de temps devant moi pour les lire... La lecture dévore les secondes, les minutes, les heures, les jours, les mois, les années, toute une vie. Mais, je ne peux pas consacrer tous mes instants à cette noble et belle occupation... Pour éviter ce vertige du temps quand je me retrouve devant ma bibliothèque, je commence à faire du tri : la liste des "à lire", celle des "lus, sans y revenir", celle des "à relire", celle des "enfin, je les découvre alors qu'ils étaient là depuis longtemps". Ce classement subjectif m'aide à ranger ma bibliothèque et à me délester de certains titres. J'ai donc saisi un volume concernant Marguerite Yourcenar, car j'éprouve en ce moment le désir de retourner sur ses terres littéraires. Je possède les deux pléiades de ses œuvres et je les ouvre régulièrement. J'avais acheté et mis de côté, "Le bris des routines", dans l'excellente et originale collection, "Voyager avec..." des éditions La Quinzaine littéraire, paru en 2009. Michèle Goslar, grande spécialiste de Marguerite Yourcenar, dirige l'essai en question. J'ai retrouvé l'univers "géographique" de l'écrivain dans les chapitres intitulés ainsi : l'Europe, une vaste patrie, l'Amérique et la connaissance de soi, l'Afrique ou un moment de bonheur, l'Asie, à la recherche de sensations nouvelles. Elle a parcouru tous les continents et tous les temps. Son œuvre me fascine et plus, je la fréquente, plus j'approfondis ma connaissance "yourcenarienne" si j'ose dire...  La marque des grands écrivains me semble résider dans ce pouvoir inépuisable de leurs textes où plane l'énigme de leur imaginaire. Elle écrit : "Le voyage, comme la lecture, l'amour ou le malheur, nous offre d'assez belles confrontations avec nous-mêmes, et fournit de thèmes notre monologue intérieur". Chaque escapade de l'écrivain est décrite avec des extraits d'ouvrages, des lettres, des inédits, et même des entretiens avec l'écrivain. Certaines de ses visites font naître des œuvres : l'Italie avec "Denier du rêve" et les "Mémoires d'Hadrien", la Hollande avec "L'œuvre au noir". Elle voyage pour se "décentrer", pour aller à la rencontre d'un autre, de l'étranger, de l'étrange... Partir se transforme en quête initiatique spirituelle.  La stature "académique" de Marguerite Yourcenar l'a enfermée dans une image distante, écrasante, issue de sa classe sociale et de son œuvre érudite. Ce livre montre bien au contraire une femme libre, sans préjugés, écologiste avant l'heure et d'une culture qu'elle partage à satiété... Je vais donc mettre à mon programme hivernal de lectures, les mémoires autobiographiques qu'elle a baptisées tout simplement "Le labyrinthe du monde"...