lundi 8 septembre 2014

Une rencontre

Il peut arriver dans une vie de lectrice d'ignorer un écrivain. On connaît sa réputation, sa célébration, son influence auprès de ses confrères et de la presse littéraire. Mais, la négligence, les préférences et la méconnaissance l'emportent sur le désir de la découverte. Un jour, j'ai trouvé un folio de cet auteur dans la librairie d'Emmaüs. Je l'ai intégré dans un choix de livres pour mon atelier. Quand il a été question de cet ouvrage, la lectrice avait éprouvé une admiration pour ce petit folio et je me suis dit qu'il fallait que j'entreprenne sa lecture cet été. J'avais aussi rencontré Pierre Dumayet (un passeur merveilleux de littérature) à Bron dans le cadre d'une fête du livre et quand je me suis entretenue avec lui, je lui ai posé la question fatidique : quel sont vos écrivains préférés ? Je me souviens d'un  nom en particulier, celui de... Pierre Michon. Je n'avais pas été étonnée mais après cet aveu si important, j'ai continué à ignorer ce conseil si précieux. Je crois qu'il faut parfois attendre de longues années pour enfin ouvrir un livre d'un écrivain un peu secret, un peu complexe, dont l'univers ne nous attire pas d'emblée. Quand j'ai commencé "Les vies minuscules" publié en 1984, j'ai retenu mon souffle et j'ai plongé dans la prose poétique de Pierre Michon, dans son monde tellement particulier, un monde ancien, paysan, humble, de petites gens, mais qu'ils racontent à la façon d'un Homère de la Creuse. Le recueil cité rassemble huit histoires : vie d'André Dufourneau, vie d'Antoine Peluchet, vies d'Eugène et de Clara, etc. Ces histoires sont racontées par un narrateur, témoin de ces vies perdues, oubliées.  Je n'ai pas l'intention de résumer ces récits qui ressemblent à des nouvelles mais je vous cite une phrase de Pierre Michon : "Le désert que j'étais, j'eusse voulu le peupler de mots, tisser un voile d'écriture pour dérober les orbites creuses de ma face ; je n'y parvenais pas ; et le vide têtu de la page contaminait le monde dont il escamotait toute chose (....)". Un style unique,  un monde perdu décrit comme une civilisation disparue, un écrivain rare et magnifique. J'ai emprunté un ouvrage sur lui à la médiathèque pour mieux appréhender cette œuvre. J'en parlerai demain...