mardi 18 octobre 2022

Escapade à Vienne, 2

 Vienne concentre dans un quartier, le Hofburg, les plus beaux musées du pays. Dans ma précédente escapade, j'avais négligé les appartements de l'impératrice Sissi, une icône incontournable de la Vienne des Habsbourg. J'avais vu un documentaire Arte sur cette femme incarnée naïvement au cinéma par Romy Schneider. Sa personnalité tourmentée ne coïncide pas avec l'image d'Epinal de son règne. Epouse fantasque, mère en mode mineur, voyageuse, poétesse, esprit républicain, cette Sissi me semblait plus humaine que cette statue impériale, pétrifiée dans une beauté enfantine. Dans cet appartement complètement déserté par les touristes, j'ai arpenté les salles luxueuses de son palais avec des tentures rouges, des meubles raffinés, de la vaisselle ancienne dorée et kitsch, sa salle de gymnastique et sa chambre de jeune femme esseulée. Au fond, je touchais des yeux le luxe inouï dans lequel vivait la dynastie des Habsbourg. Une visite à caractère historique. Puis, changement de siècle avec le musée Albertina, installé dans un palais, près de la Hofburg. Spécialisé dans les estampes et les dessins collectionnés par les Habsbourg, l'Albertina dispose aussi d'une collection de peintures modernes où j'ai pu voir des Picasso, Cézanne, Klimt, Kokoschka, Egon Schiele, etc. Une exposition temporaire proposait cinquante tableaux du génial Basquiat, peintre noir américain, un Rimbaud pictural fulgurant et politique, mort d'une overdose à 28 ans en 1988. Ces toiles ressemblent à des coups de poing dénonçant le racisme, l'inégalité sociale et la société de consommation. Une exposition passionnante et dérangeante aussi. Dans l'après-midi, j'ai profité du  soleil pour visiter le Belvédère, la résidence d'été du Prince Eugène de Savoie. Le Belvédère supérieur (1722) se trouve au sommet des jardins et dès que l'on pénètre dans ce lieu magique, la somptuosité de ce palais saute aux yeux : plafonds décorés, vestibule des atlantes, chapelle magnifique. Le palais recèle une collection importante de chefs d'œuvre dont les 24 tableaux de Gustav Klimt ("Le Baiser", "Judith"). Le Belvédère inférieur propose aussi une galerie d'art des artistes qui illustrèrent Vienne à son âge d'or. Entre ses deux châteaux baroques, s'étale un parc de toute beauté avec une fontaine centrale à plusieurs étages. Je vivais un retour au XVIIIe siècle en imaginant le Prince Eugène et sa cour déambulant à travers les parterres fleuris des jardins. Après le Belvédère incontournable, j'ai assisté à un concert de lieder de Schubert au Konzerthaus avec le baryton allemand, André Schuen. J'avais à côté de moi un couple de mélomanes qui suivaient les lieder avec des partitions mais la compagne de ce monsieur était non-voyante et ses partitions étaient en braille. Elle semblait habitée par la musique et tout le public partageait toute cette ferveur autour de Schubert. Un concert inoubliable...