jeudi 21 octobre 2021

Marcel Proust, 150 ans déjà...

Marcel Proust est né le 10 Juillet 1871 et si on compte bien, cet écrivain français, mort en 1922, fêterait ses 150 ans cette année. Sur France Culture, l'anniversaire de sa naissance a été marqué par une série d'émissions sur ce démiurge littéraire inimitable. J'ai écouté Matthieu Garrigou-Lagrange, "Pourquoi La Recherche est-il un roman culte" avec ses invités, Charles Dantzig, Thierry Laget et Michel Erman. Je suis une "Proustolâtre" dirait un critique littéraire concernant les amateurs inconditionnels et admiratifs de ce génie français. La photo de Proust est bien lovée dans ma bibliothèque. Dans ma jeunesse étudiante, le premier tome de sa Recherche, "Du côté de chez Swann", figurait au programme de ma troisième année de licence de Lettres. Les Pléiades de Proust en trois volumes reposent dans ma bibliothèque depuis des décennies. Leur présence matérielle m'appelle à les relire et parfois, j'ouvre une page et je parcours ces phrases avec une certaine délectation. Mais, cela ne ma satisfait plus. Ecouter ces émissions sur France Culture a stimulé mon envie de me replonger dans ces pages sublimes de beauté. Un des critiques évoquait la "Recherche du temps perdu" comme une Joconde. Le regard de la Joconde nous suit des yeux quand on la découvre au Louvre. Lire Proust, c'est se retrouver soi-même, comme une lecture de son "soi", un miroir que l'écrivain tend à son lecteur/lectrice. Quand j'ai découvert les premières pages de cette cathédrale de mots, j'ai tout de suite compris qu'il se passait un événement unique que j'ai surtout rencontré chez Virginia Woolf et chez Marguerite Yourcenar. Ce narrateur écrivant décrit un monde disparu entre bourgeoisie et noblesse en utilisant une langue française d'une richesse inouïe, composée de longues phrases, des phrases sensuelles et rêveuses. L'art proustien ressemble à un travail de mineur, un travail d'archéologue, une tâche titanesque à la recherche du passé qui surgit grâce à la mémoire involontaire. Le paradis perdu du passé se réincarne dans un réel réenchanté. Marcel Proust ressuscite son enfance, ses parents, Françoise, sa grand-mère, ses amours et tant d'autres moments de vie dans un ballet de sensations, d'émotions, d'idées et sa vision de la vie : "La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent pleinement vécue, c'est la littérature". Même si Proust n'est pas aussi lu qu'on le dit, beaucoup de lecteurs et lectrices ont entendu des échos de cette œuvre : la petite madeleine, "Longtemps, je me suis couché de bonne heure", Combray, la jalousie maladive de Swann, le petit pan de mur jaune, la sonate de Vinteuil, Madame de Verdurin, la mondaine snob, Bergotte, Venise, etc. Ce monument littéraire peut intimider et parfois provoquer un certain recul mais, il suffit de s'affranchir de sa réputation mondaine pour pénétrer dans une planète tellement surprenante, celle d'un jeune homme à la recherche de son temps perdu et retrouvé grâce à l'art de la littérature. Après la tempête des prix littéraires, je range ma pile de livres à lire et je dépose sur ma table de chevet le premier volume de ma Pléiade... Je me confinerai dans son monde du début du XXe siècle avec un bonheur renouvelé et peut-être encore plus approfondi que lors de ma première lecture juvénile.