mardi 5 octobre 2021

B. T. au Panthéon

 Dès que les médias ont annoncé le décès de B. T., un parisien modeste et un marseillais d'adoption, l'émotion a débordé dans les commentaires que j'ai plus ou moins suivis. Cet homme volontaire, audacieux, transfuge de classe a donc attiré l'admiration d'une majorité de mes concitoyens. Je me suis sentie dans une marge ultra minoritaire ne ressentant pas une admiration sans bornes pour cet homme d'affaires dont l'idéal, comme le disait Pierre Rosanvallon dans un entretien sur France Culture, portait sur l'argent, sur la fortune. Les médias célèbrent ce culte de l'aventure individuelle et sur sa passion du football. La "coupe de la ligue des champions", un événement pour moi très anodin,  ressemble à la guerre de Troie ou à une conquête du Graal.  B. T., l'Achille du XXe siècle, le héros mythique des humbles, des vaincus, des modestes est compagnon des dieux, petit-fils de Zeus, et frère d'Athéna. L'exagération des médias est inquiétante. L'outrance des témoignages frôle le fanatisme religieux. On sait bien que, pour certains amateurs de ce sport universel, l'esprit religieux tient une place importante. Cet homme au demeurant fort sympathique voulait surtout réaliser son propre destin en devenant riche, une revanche sur ses origines. Notre Président, nos élus, le peuple français, pleurent la disparition de B. T. dans un concert unanime de louanges dithyrambiques. Je ne veux pas égratigner la stature incontestable d'un homme charismatique, un battant joyeux et indestructible. Sa dernière victoire et son ultime défaite contre le cancer lui donne une dimension humaine, la plus compassionnelle possible. Je salue vraiment les messages qu'il a envoyés à tous les malades du cancer et je préfère cet homme héroïque dans les dernières années de sa vie que celui de repreneur d'affaires, de gourou footballistique de Marseille et de ministre précaire de la gauche mitterrandienne. Les médias m'ont donné une indigestion ce week-end et heureusement, il reste encore un choix aux téléspectateurs, celui de fermer son écran et de s'adonner à d'autres loisirs. Je suis peut-être isolée dans mes réactions mais je me demande si une pétition surgira un de ces jours prochains pour lui donner une place au Panthéon, comme l'a demandée les passionnés de Johnny Hallyday... Pourquoi pas, cela nous changerait de Victor Hugo, Voltaire, Jean Moulin, Simone Veil, les vrais héros de notre France. Mon blog reflète aussi mes humeurs du moment et comme j'ai une préférence pour la nuance, la modération, la sobriété, cette déferlante médiatique m'a bien interpellée sur les passions d'une société que je ne partage pas toujours...