mardi 26 juin 2018

Rubrique cinéma

Le titre du film du cinéaste argentin, Sébastian Lelio, "Désobeissance", résume à merveille l'histoire de Ronit, une photographe anglaise, exilée à New York. Quand elle apprend la mort de son père, un rabbin de la communauté juive orthodoxe, elle revient à Londres pour assister aux funérailles. Pourtant, ce saint homme, très apprécié de ses fervents religieux, avait répudié sa fille. Ronit est aujourd'hui une femme libre, indépendante et détachée de ses origines. Elle ne se sent pas la bienvenue même si David, le jeune rabbin, fils spirituel du "Rav", l'accueille avec sa jeune femme, Esti. Cette jeune femme effacée et soumise aux traditions de sa religion semble bouleversée par la venue de Ronit. En fait, elle a aimé cette femme dans le passé et leur passion mutuelle ne s'est pas éteinte. Les deux femmes se cachent dans les rues pour se parler et se retrouver malgré leur amour interdit dans ce milieu ultra fermé et rigide sur les mœurs. La réprobation de la communauté pèse sur la conscience d'Esti, qui n'est pas prête à se libérer de ce joug moral. Esti représente la femme sacrifiée et son mari, la Loi archaïque et éternelle de la religion. Ronit affronte les hommes du clan avec une liberté insolente. Elle apprend que son père l'a déshéritée au bénéfice de la synagogue. Quand elle visite la maison familiale, elle ne prend aucun objet pour ne pas se souvenir de lui. Ronit et Esti finissent par s'aimer dans une chambre d'hôtel. Esti avoue à son mari l'amour qu'elle éprouve pour Ronit. Sebastian Lelio filme ce trio avec justesse et délicatesse en évitant la mièvrerie. Chaque personnage va en fait se libérer et devenir eux-mêmes. Le jeune rabbin pense avoir retrouvé sa femme quand elle lui apprend sa grossesse. Mais, elle se sépare de son mari. Ronit repart à New York sans Esti. Le jeune rabbin renonce à la succession du Rav, un rôle écrasant pour lui. La fin du film reste ouverte : Ronit et Esti vont peut-être se retrouver, le jeune rabbin deviendra un bon père et un ami dévoué. Les deux jeunes femmes jettent les chaînes des traditions misogynes de ces communautés religieuses figées. Ronit se rend sur la tombe de son père et photographie sa tombe comme un dernier clin d'œil sur cette relation ratée. Un très bon film original, sensible et émouvant...