jeudi 6 septembre 2018

"Les Portes de fer"

J'ai déjà écrit un billet sur le roman de Jens Christian Grondahl, "Les Portes de fer" en 2016. Mais, je me remets à relire depuis cet été. La relecture possède des avantages certains : revitaliser sa mémoire, renouer avec le plaisir de redécouvrir un roman que l'on a un peu oublié, se rendre compte que le temps a passé, se replonger dans un beau souvenir de lecture. J'ai relu ce livre car une amie m'en a parlé cet été et coïncidence heureuse, je l'avais choisi pour une sélection bibliographique concernant la littérature nordique que je proposerai aux lectrices de l'atelier Lectures, Comme j'ai visité Copenhague en juin dernier, j'ai retrouvé dans le roman l'ambiance de cette ville magnifique. L'écrivain danois brosse le portrait d'un homme dans sa jeunesse et dans sa maturité jusqu'à sa retraite. Trois moments de sa vie décryptés et analysés avec une basse continue mélancolique. Ses jeunes années sont marquées par sa découverte de l'amour avec Erika, une jeune allemande, de la littérature grâce à une femme professeur et de son engagement politique. Il est trahi par cette jeune fille qui lui préfère un homme plus âgé. Il aborde ses années d'adulte devenu professeur en se mariant, puis devient père, divorce ensuite. Encore une rupture inévitable. Le personnage narrateur retrouve sa solitude qui, au fond, lui convient davantage : "J'étais libre de faire selon mon bon vouloir. (…) Cela me réjouissait de prêter attention à la réalité particulière de chaque jour, et j'avais compris que l'on s'en rend compte encore mieux quand on est seul". Il rencontre une nouvelle compagne sans vivre avec elle car il ne veut pas renouer avec la vie familiale. Il accueille un adolescent chez lui, un élève de sa classe, et tombe amoureux de la mère de celui-ci. Mais cette histoire n'aboutit pas. Voilà notre narrateur à Rome, le jour de ses soixante ans et il rencontre une jeune fille étrange, artiste photographe. Leurs affinités culturelles les rapprochent mais le gouffre de l'âge les éloigne l'un de l'autre… Le roman se termine ainsi sur le constat de la solitude intrinsèque de tout homme (ou femme). Il existe pourtant une grande consolation pour l'écrivain : "Nous formons une sorte de société parallèle, nous les rats de bibliothèque, les passionnés de Brahms, nous fonctionnons mieux en tête à tête et nous sommes mal à l'aise dans les grandes fêtes". Quel beau roman sur la vie, sur l'amour, sur la solitude, sur la désillusion, mais aussi sur la lucidité heureuse…