lundi 4 février 2013

"Jan Karski"

Je poursuis ma connaissance de l'oeuvre de Yannik Haenel en découvrant "Jan Karski", écrit en 2009 et paru chez Gallimard dans la collection très littéraire, "L'Infini". Ce roman est surtout un récit autobiographique dans sa première partie. Yannick Haenel se saisit d'un homme réel, Jan Karski et nous relate sa vie extraordinaire de citoyen polonais dans une période historique elle aussi extraordinaire. Nous sommes en 1942 à Varsovie. La Pologne est envahie par les Nazis et dévastée aussi par les Soviétiques. Jan Karski devient un "messager" de la Résistance polonaise auprès de son gouvernement en exil à Londres. Sa vie va basculer quand deux hommes le font entrer clandestinement dans le ghetto afin qu'il prévienne le monde "libre" que l'extermination des Juifs est bien une réalité. Jan Karski va découvrir des scènes terrifiantes dans le ghetto. Il va traverser l'Europe en guerre, informe les Anglais et finit par rencontrer Roosevelt, le Président américain. Les deux premiers chapitres relatent cette expérience et la rupture intervient au troisième quand le récit passe de "il" à "je". La force du livre réside dans cette reprise du point de vue littéraire à la première personne. La première phrase de la partie 3 démarre ainsi "On a laissé faire l'extermination des Juifs. Personne n'a essayé de l'arrêter, personne n'a voulu essayer". Jan Karski a témoigné dans le film de Jacques Lanzmann, "Shoah". Yannick Haenel imagine la vie de cet homme à partir de cette indifférence face à l'extermination des Juifs. Ce roman documentaire a obtenu le prix Interallié et celui de la Fnac. Le lire aussi, beaucoup plus tard qu'à sa parution, éloigne les polémiques entre Claude Lanzmann, des historiens et l'écrivain. Il est ensuite intéressant d'aller voir les critiques de l'époque pour se renseigner sur ce pari littéraire de Yannick Haenel : a-t-on le droit d'utiliser la fiction pour rendre encore plus réelle, la réalité historique ? Vaste question... .