mardi 30 août 2011

Ma Bibliothèque, portrait, livres d'art, 1

Le livre que j'ai choisi présente pour moi deux intérêts : Albert Camus en est l'auteur, et René Char a composé une post-face pour son ami. Je dois mentionner aussi les très belles photos en noir et blanc d'Henriette Grindat sur le beau pays de Sorgue. La première édition date de 1965, la mienne date de 1986. Albert Camus écrit dans ce livre des textes brefs, poétiques et quand j'ai lu pour la première fois "La postérité du soleil", j'ai confondu cette prose incandescente avec celle de Char. Quelques extraits :
"Dans la jeune lumière l'hiver sera sec.
Sur les terres du soleil, août éteint les couleurs, mais le froid resplendit, le ciel est bleu de neige. Etés noirs, hivers d'or, la vraie force a deux visages."
"Le matin est radieux ; la lumière pique; renonce à ta visite. Ils peuvent attendre, et non ta joie."
"Le pire, le seul malheur, est l'ennui, quand tout le ciel est dans les flaques."
"D'autres après nous encore recevront sur cette terre le premier soleil, se battront, apprendront l'amour et la mort, consentiront à l'énigme et reviendront chez eux en inconnus. Le don de vie est adorable".
Les photos belles et naturelles rendent hommage à ce pays du Lubéron et épousent merveilleusement les textes de Camus. "Ombre et lumière", les deux faces de Camus selon son biographe Roger Grenier. Je retrouve dans ce beau livre d'art le côté solaire de Camus sans oublier sa part d'ombre...
En décrivant les ouvrages essentiels de ma bibliothèque, j'en profite pour relire mes "livres-veilleurs", mes sentinelles, mes éveilleurs de vie... Il faut toujours revenir à Camus, qui a provoqué dans ma jeunesse un amour profond des mots, des idées, de la littérature, en fait...

lundi 29 août 2011

"D'acier"

Silvia Avallone a écrit un roman social dans une petite ville côtière et industrielle de l'Italie. Le titre du livre bref, tranchant et brutal, "D'acier" nous place d'emblée dans une atmosphère teintée de désespoir, d'inquiétude et de misère sociale. La trajectoire de deux familles ouvrières, liées à l'entreprise de Piombino, la "Lucchini" qui fabrique de l'acier, forme la trame du livre. Dans ce magma sans espoir, deux adolescentes vont se créer un monde à part, un monde secret d'amitié amoureuse. Anna, la bonne élève, va pourtant trahir son amie Francesca en nouant une relation avec un copain de son frère Arturo. Cette liaison mettra leur complicité entre parenthèses... Autour de cette histoire vibrante, Silvia Avallone nous décrit avec une empathie certaine, le sort "difficulteux" de tous ces garçons prisonniers de l'acier, de l'usine et sans espoir de faire "mieux"... La drogue, l'alcool, les boîtes, font partie de leur vie pour supporter ce destin mesquin... La relation des deux adolescentes, seule, va donner à ce roman "naturaliste", un espoir d'une vie meilleure, symbolisée par la vision rêveuse de l'île d'Elbe. Ce monde abîmé par la misère montre les faiblesses des femmes trop souvent humiliées, la violence des maris, les adolescents sans avenir, des fragments de vie gâchée... Malgré le soleil et la mer, l'écrivain a voulu nous montrer le "malaise" social d'une Italie annonçant la dérive "berlusconienne". Seule, l'amitié passionnelle de Francesca et d'Anna illumine ce roman, si âpre et si vraie...

vendredi 26 août 2011

Rentrée littéraire, suite

J'ai donc remarqué des noms d'écrivains en recoupant les avis des critiques. dans ma liste de mes futures lectures automnales, je retiens cinq romans français :
- Emmanuel Carrère, "Limonov", que certains considèrent comme un événement littéraire,
- Eric Reinhardt, "Le système Victoria"
- Véronique Ovaldé, "Des vies d'oiseaux",
- Delphine de Vigan, "Rien ne s'oppose à la nuit",
- David Foenkinos, "Les souvenirs".
Du côté étranger, voici ma liste :
- Jonathan Franzen, "Freedom",
- Haruki Murakami, "1Q84", tomes 1 et 2
- David Grossman, "Une femme fuyant l'annonce"
- Laura Kasischke, "Les revenants"
- Joseph O'Connor, "Muse".
Voilà ma petite sélection des dix romans que je vais lire dans les semaines qui viennent...
En lisant le JDD de ce dimanche, Marie-Laure Delorme signe un article "La vie secrète des livres" en nous conseillant certains livres cités dans ma liste. Elle nous annonce la sortie d'un essai de Mona Ozouf, "La Cause des livres" qui va paraître le 6 octobre et je ne résiste pas à vous offrir l'extrait concernant cet ouvrage qui me semble déjà passionnant à lire : "La littérature sur la chaîne usée des destinées humaines, n'en finit pas de broder de nouveaux festons. Elle accorde aux hommes le droit d'être doubles. Elle multiplie les transfuges, les convertis, les renégats. Elle a un faible pour les trajectoires qui brusquement dévient, pour les sentiments qui divaguent. Elle fait sa part au mystère. Elle illustre la profusion d'un univers que nous ne percevons bien, selon le grand liseur qu'était Jaurès, qu'à travers des livres capables de démultiplier nos vies étroites". Rendez-vous le 6 octobre en librairie pour cet essai si parlant pour moi pour "La cause des livres". Mon blog existe pour servir cette Cause, cette noble et belle Cause des livres !

jeudi 25 août 2011

Rentrée littéraire 2011

Plus de 650 romans vont paraître à la rentrée dont une petite soixantaine de premiers romans... Vertige du chiffre, vertige du lecteur ou lectrice lambda qui se demande comment choisir les meilleurs d'entre eux. Je connais la réponse : il faut passer par le choix des meilleurs livres de la rentrée littéraire dans la presse. Du magazine spécialisé au magazine généraliste, on trouve des papiers sur ce rite de la fin d'août. Le magazine "Lire" propose son très passionnant cahier habituel sur les romans remarqués par les libraires. Le Magazine littéraire consacre lui aussi un dossier sur les nouvelles parutions. Les hebdos nous offrent leurs pages de critiques. Des noms d'écrivains semblent attirer l'attention des critiques formant la "caste" des habitués de la rentrée littéraire dont l'incontournable Amélie Nothomb. Sur Internet, j'ai remarqué la liste des 30 romans sélectionnés par la Fnac avec une garantie de qualité... Cette déferlante traditionnelle de romans et d'essais me console beaucoup de la perte de nos belles journées d'été où la lecture se pratique dans un jardin à l'ombre d'un cerisier, dans un fauteuil pliant confortable et au bord de ma petite piscine... La rentrée littéraire s'annonce comme un très bon cru pour tous les goûts éclectiques du lecteur : du jeune écrivain un peu vert à l'écrivain confirmé, des écrivains étrangers très attendus aux premiers traduits, des très confidentiels méritants aux commerciaux millionnaires, tous ces "écrivants" espèrent rencontrer leur public. Je réponds présente pour repérer les nouveaux talents de la littérature française et d'ailleurs, aussi... Et, évidemment, j'en parlerai dans ce blog !


mardi 23 août 2011

"Ticket d'entrée"

Joseph Macé-Scaron est l'auteur de ce "Ticket d'entrée", sorti récemment avec des critiques élogieuses... Il faut dire que Joseph Macé-Scaron est le directeur du Magazine littéraire. Il pilote aussi "Marianne". On le voit à Canal+ dans le Grand Journal débattre avec talent et humour. Cumulant donc des postes de journaliste, il écrit aussi. Trop vite peut-être car une polémique vient de naître concernant ce roman. Il aurait oublié de citer des emprunts à un écrivain américain. Je considérais Joseph Macé-Scaron comme un "honnête homme" surtout quand on donne des leçons de vertu dans Marianne et à la télévision... J'ai quand même ressenti un léger agacement quand je pense qu'il pratique le plagiat, si fugace soit-il. Ce copiage non signalé est une imposture, un mensonge par rapport aux lecteurs qui font confiance aux écrivains. Pourtant, son roman possède des qualités indéniables : humour, ironie, parodie et audace. L'histoire de Benjamin, bobo-gay, peut se résumer ainsi : c'est un arriviste cynique dans le milieu journalistique de droite. Evidemment, le lecteur peut reconnaître des people odieux, des sarkozistes ridicules, des politiques pourris, etc. L'activisme sexuel de Benjamin lasse, la recherche permanente de drogues "illicites" semble un peu "immorale", la vie uniquement parisienne ou barcelonaise agitée est d'un conformisme affligeant... Je suis étonnée des bonnes critiques que ce roman a recueillies. On peut le lre comme un témoignage sur le cynisme de notre époque, sur les moeurs particulières d'une catégorie de privilégiés des médias et du monde politique... J'attendais beaucoup mieux de Joseph Macé-Scaron... Je suis sûre qu'il fera mieux dans son prochain roman...

lundi 22 août 2011

Le poème

Je lis de temps en temps de la "poésie". J'ai conservé pendant des années une petite carte sur laquelle j'avais noté un poème de Michel Leiris en oubliant d'indiquer le titre du recueil. la semaine dernière, je parcourais des yeux le fonds de poésie de ma bibliothèque de quartier qui n'est pas très riche en exemplaires. Le lecteur pouvait emprunter les poètes les plus célèbres comme Hugo, Rimbaud, Prévert, Baudelaire, etc. Cependant, je remarque sur l'étagère un Michel Leiris et son recueil "Haut Mal". Je le feuillette et je tombe enfin sur ce poème que j'avais recopié sur cette carte perdue. Pour ne jamais plus l'égarer à nouveau, je l'intègre dans ce blog et j'en garderai ainsi une trace... permanente :
"Avare"

M'alléger
me dépouiller

réduire mon bagage à l'essentiel

Abandonnant ma longue traîne de plumes
de plumages
de plumetis et de plumets

devenir oiseau avare
ivre du seul vol de ses ailes

Michel Leiris

vendredi 19 août 2011

Le Monde des Livres

Ce cahier hebdomadaire du Monde paraît tous les vendredis et je crois que je le lis depuis une bonne trentaine d'années... Ce "Monde des Livres" m'accompagne donc comme un fil conducteur dans ma vie de lectrice, de lectrice dévoreuse d'informations littéraires. Je le conserve pendant un an, le lis et le feuillette régulièrement. La qualité de l'écriture des critiques, la rigueur du jugement, l'esprit d' intelligence et le goût de la culture définissent cette publication assez unique dans le milieu des médias. Ce vendredi 19 août, la maquette du monde a changé... Et chaque fois qu'un changement s'opère, je ressens un certain regret de la forme du cahier comme un adieu mais je me suis réjouie tout de suite de la nouvelle maquette plus claire, plus structurée, plus lisible. J'apprécie le choix des couleurs du titre, (le rouge et le noir), le titre encadré par des rectangles noirs, le graphisme des articles, la composition du cahier en rubriques régulières (j'apprécie tout particulèrement le "Prière d'insérer de Jean Birnbaum"), les chroniques des écrivains critiques, l'enquête originale et la rencontre à la fin du cahier. Cette nouvelle mouture m'a déjà conquise et je remercie toute l'équipe du Monde des Livres, pour leur immense travail de recomposition en leur souhaitant de conquérir encore plus de lecteurs et lectrices fidèles comme moi depuis tant d'années !

jeudi 18 août 2011

Jeanne

Jacqueline de Romilly a écrit ce récit à la mort de sa mère en 1977 pour quelques amis. Son éditeur Bernard de Fallois le publie maintenant après la disparition de Jacqueline de Romillly. Ce portrait attachant et émouvant de sa mère devient un témoignage précieux sur la vie des femmes au début du XXème siècle. Sa mère Jeanne subit un sort terrible dès son premier mariage, son mari meurt à la Guerre de 14-18. Elle devient veuve à la naissance de sa fille Jacqueline, puis perd aussi un fiancé dans un accident de chasse. Jeanne consacrera sa vie à sa fille Jacqueline de Romilly, qui deviendra l'éminente professeur au Collège de France et grande spécialiste du monde grec antique. Jeanne vit une deuxième passion après celle qu'elle éprouve pour sa fille, c'est l'écriture. Elle est publiée, ses romans ont un succès relatif malgré de bonnes critiques. Cet hommage posthume nous révèle une histoire d'amour mère-fille touchante. On sent des regrets, des remords, des distractions de la part de Jacqueline de Romilly concernant la carrière "littéraire" ratée de sa mère, et se rendant compte de l'acharnement et de l'obstination de Jeanne pour se faire reconnaître du milieu des Lettres des années 30 à 6O... Malgré la création de pièces de théâtre radiophoniques, ses romans et son théâtre ne seront pas des grands succès auprès du public. Le caractère volontariste de sa mère pour survivre et sauvegarder son noyau familial force le respect pour cette femme-courage... Jacqueline de Romilly nous offre un très beau portrait de l'amour maternel et filial, entre une mère "célibataire" qui ne renonce pas, qui se bat pour survivre, et une fille pour qui sa mère représente un modèle de force et d'indépendance. Ce bel hommage posthume se lit comme un témoignage sur la vie des femmes dans un certain milieu intellectuel du Paris des années 20 à 60, sur les destins brisés par les grandes guerres du XXème siècle. Courage, abnégagion, sacrifice sont des mots "démodés" de nos jours concernant la morale individuelle mais que c'est rassurant aussi de penser que des femmes comme Jacqueline de Romilly, issue elle-même d'une femme exemplaire peuvent servir de "modèle" aux jeunes générations... et à la mienne, évidemment !

mercredi 17 août 2011

La Une de libération

Ce mardi 16 août, j'ai constaté avec intérêt qu'un grand quotidien national, "Libération", a mis dans sa première page le portrait de l'écrivain américain Jonathan Franzen avec pour titre : "Freedom de Jonathan Franzen, il était une fois l'Amérique". Cet écrivain américain, l'un des plus importants d'aujourd'hui, va marquer la rentrée littéraire dix ans après son roman extraordinaire "Les corrections" qu'il faut lire absolument, si ce n'est déjà fait...
Je reparlerai de ce "Freedom" que je vais m'empresser d'acquérir en librairie. Dans l'éditorial de Nicolas Demorand et de Sylvain Bourmeau, le choix de la première page est justifié ainsi : "Un roman à la une. (...) Certaines oeuvres sont, par leurs qualités propres, des événements au sens les plus forts du terme. Des miroirs où se réfracte le monde et où des lecteurs, de littérature et de journaux, trouveront de quoi nourrir leur propre regard, leur propre intelligence du réel. (...) Franzen croit que le roman a encore tout son sens, son irréductible nécessité dans la civilisation de l'image et du divertissement. Quitte à le lire sur des tablettes numériques, ses millions de lecteurs à travers le monde partagent visiblement cette intuition. (...) La civilisation de l'écrit et de la lecture silencieuse a encore de beaux jours devant elle." Libération rend donc hommage à la littérature et aux écrivains qui nous éclairent sur la marche folle du monde... Il est très rare de constater un tel engouement médiatique pour un roman et un écrivain. Je remercie ce journal souvent inégal et brouillon dans ses articles de mettre ainsi en avant la littérature qui apporte une vision du monde où chacun d'entre nous peut se confronter. Bonne rentrée littéraire en perspective !

lundi 15 août 2011

"Des adhésifs dans le monde moderne"

Ce titre bizarre a retenu mon attention sur la table des nouveautés de ma bibliothèque municipale. Je l'ai donc choisi et lu avec intérêt. Les romans teintés d'humour sont assez rares dans la production littéraire. L'humour de qualité ne rime pas toujours avec littérature de qualité. Je ne peux même pas citer une dizaine de romans humoristiques que j'ai découvert en un an... Marina Lewycka est d'origine ukrainienne, a grandi en Angleterre et a rencontré le succès avec deux romans, "Une brève histoire du tracteur en Ukraine" et "Deux caravanes". Son troisième roman, traduit en français par Sabine Porte, se lit avec plaisir et avec légéreté. En ce moment, en période de vacance d'esprit, j'éprouve un sentiment d'indulgence envers les romans dits "d'été"... Celui-ci possède les caractéristiques du "pavé" : 507 pages, une femme en crise au bord du divorce, un ado garçon qui s'éloigne, une fille indépendante, un mari volage... Pourtant, Marina Lewycka a écrit une histoire loin des clichés du roman féminin de la trahison. Le personnage de la femme abandonnée, Georgie, rencontre une vieille femme excentrique, Mrs Shapiro, dans une épicerie à Londres, bataillant pour acheter le moins cher possible des denrées périssables. Cette rencontre sera le point de départ du roman car une amitié va naître entre Georgie et Mrs Shapiro, vieille émigrée juive vivant dans une maison en ruines, maison convoitée par des agents immobiliers. Georgie est journaliste dans une revue "Les adhésifs dans le monde moderne" et cet emploi de télé-travail lui donne du temps libre pour s'occuper de la vieille dame et la protéger des convoitises immobilières. Le monde de Marina Lewycka fourmille de personnages cocasses, ambigus, outranciers, ridicules mais aussi attachants. Le passé de Mrs Shapiro révèle un secret que je ne dévoilerai pas. Il est rare d'associer l'humour, la dérision, l'ironie à des passages plus graves dans le roman mais le fil conducteur demeure l'histoire de Georgie et de sa "reconstruction". La morale du livre, c'est l'alchimie des liens qui se tissent entre les êtres, liens du passé comme ceux du présent, provoquant une "adhésion" des uns aux autres, adhésion douloureuse, adhésion heureuse, mais surtout adhésion à la vie...

vendredi 12 août 2011

Ma bibliothèque, portrait, livres culinaires, 3

Encore un petit livre carré des Editions Robert Morel, tout vêtu de rouge, avec un clou en cuivre au milieu de la tranche pour le tirer du rayonnage de sa bibliothèque... Je veux parler d'une collection "La cuisine rustique" dont je ne possède qu'un titre "Pays Basques", évidemment... Robert Morel écrit dans sa préface :"Sous le titre Cuisine Rustique, nous avons voulu réunir quelques traditions de cuisine locale, paysanne, simple, voire élémentaire, avant que le monde moderne les oublie définitevemnt". Une longue introduction très intéressante, écrite par Huguette Couffignal, apporte un éclairage ethnologique et historique sur l'histoire des Basques. Et les recettes succulentes déferlent sous nos yeux gourmands : tourin, elzekari, garbure, ttoro,et toutes les soupes traditionnelles, Ensuite, on passe aux céréales avec le maïs, la méture, le taloa, le milhoc ou millet, puis les oeufs et les omelettes aux piments, au jambon, au chorizo, la célébrissime pipérade... Le livre aborde aussi les viandes avec le gigot, le axoa de veau et les poissons avec les délicates et savoureuses pibales ! Que de souvenirs familiaux pour moi quand ma mère me cuisinait, avec un art inégalé, du salmis de palombe, des pibales à l'ail, du magret de canard, du foie gras aux pommes... Tous ces plats solides et goûteux représentaient la culture culinaire du Pays Basque : un patrimoine de laboureurs et de marins, à sauvegarder à tout prix... Ce livre est une mine d'or pour les amateurs de cuisine qui aiment le "gras" et le "salé", la montagne rugueuse et l'océan piquant... On est loin de la cuisine aérienne et hors de prix d'aujourd'hui. Quand j'ai envie de me ressourcer, de retrouver mes racines rurales du Pays Basque, j'ouvre ce merveilleux petit livre rouge et je lis une recette et toutes les odeurs, les senteurs, les couleurs du pays m'enveloppent et me procurent une douce chaleur, un regain de nostalgie pour cette terre, hélàs, trop envahie de "touristes" de mai à octobre... Pour savourer le Pays Basque, il faut y aller en hiver, les plages sont retournées à leur état sauvage, les montagnes se libèrent de leurs randonneurs, et les villes respirent. Et puis, la cuisine basque nous protège de la maussaderie hivernale...

mercredi 10 août 2011

Ma Bibliothèque, portrait, livres culinaires, 2

Attention, ce livre de cuisine ne ressemble pas à un livre de cuisine... Il s'agit d'un drôle de livre sous la forme d'un torchon de cuisine avec un liseré rouge sur la couverture, deux initiales JD, et un anneau en cuivre pour suspendre ce livre-objet dans sa cuisine. Ce livre de cuisine a été écrit par un grand écrivain totalement oublié aujourd'hui par le public (à part quelques amateurs de trésors cachés). Cet écrivain original ne pouvait qu'écrire un livre de cuisine original. Je vous parle de Joseph Delteil et de sa "Cuisine paléolithique", édité par Robert Morel en 1964, à Forcalquier. Joseph Delteil définit sa cuisine paléolithique ainsi : "La cuisine paléolithique, c'est la cuisine naturelle, celle qui apparut dès le commencement par pur instinct, simple appétit entre l'homme et le monde. La nature des choses. Quant à moi, j'ai très délibérément entrepris de vivre une vie naturelle, une vie comme la vivaient les premiers hommes voire hominiens (mettons, s'il vous plaît, il y a 100 000 ans). (...) Au fronton de ma maison des champs, j'ai inscrit la formule sacrée de Confucius : VIVRE DE PEU. La civilisation moderne, voilà l'ennemi. C'est l'ère de la caricature, le triomphe de l'artifice. Une tentative pour remplacer l'homme en chair et en os par l'homme robot. Tout est falsifié, pollué, truqué, toute la nature dénaturée". Joseph Delteil crie au fou, seul en 1972, il y a quarante ans, quel visionnaire ! Pour revenir à son livre de cuisine, il dénonce l'alimentation "chimique" et recommande une cuisine brute, comme il y a l'art brut. Simplicité et rusticité, deux mots pour qualifier les recettes de Joseph Delteil. Cet ouvrage est une célébration de la soupe, des tomates, du gigot, de la volaille, des pommes de terre sous la cendre, du cassoulet, des haricots, des omelettes, des cochonailles, de la poule au pot, du civet de lapin, etc. Les pages de la fin du livre évoquent "les secrets magiques, voire sentimentaux, voire secrets d'état" de l'art de cuisiner. Chut... Je garde les secrets de Joseph Delteil pour moi... Vive donc la cuisine paléolithique ! Une vraie gourmandise littéraire...

mardi 9 août 2011

Ma Bibliothèque, portrait, livres culinaires, 1

Dans le billet numéro 2 sur les livres originaux de ma bibliothèque, j'ai mentionné les Editions Robert Morel que je conserve précieusement. Il a développé un thème permanent dans ses productions, celui de la cuisine. Certains d'entre nous passons du temps à cuisiner. Il y a ceux qui font ça par obligation et résignation et d'autres considèrent ces moments comme des moments privilégiés dans la vie quotidienne, loin de la routine et de l'ennui. Manger bien, avec gourmandise, est un véritable art de vivre. J'ai remarqué que les humains qui négligeaient cet aspect "physique" de la nourriture montraient quelque part un indifférence à la vie, aux sens du goût, du toucher, de la vue et je les suspecte de ne pas aimer les vraies richesses de l'existence. Pour revenir aux livres, je possède trois livres de cuisine édités par Robert Morel. Je vais vous décrire le premier : "Le livre des friandises" de Auguste J. Roulet, Maître confiseur pâtissier, publié en 1977. Ce livre comporte un moule à biscuits au milieu de la couverture gris clair argenté, placé au centre. Ce livre est donc un livre-objet. On y trouve une multitude de recettes de friandises salées et sucrées et des noms inconnus pour moi jaillissent : pellerines, bricelets, gimbelettes, brichelles aux oeufs, tranches doboches, friandises divines plus alléchantes les unes que les autres... Si vous voulez vous lancer dans la pâtisserie haut de gamme, il faut vous procurer cet ouvrage plus que précieux et l'art des macarons ne sera plus un secret pour vous... Des planches anciennes d'ustensiles de cuisine illustrent l'ouvrage au tout début. Et surtout Robert Morel a pris le parti courageux de ne pas glisser une seule photo dans l'ouvrage. Le lecteur se doit d'imaginer la forme, la couleur, la texture du biscuit, de la crème, de la taille du produit. Tant pis pour celui qui ne sait pas donner forme à ses "rêves culinaires"...

vendredi 5 août 2011

Pour une éthique de la lecture

Ce titre aussi sérieux est celui d'un ouvrage d'Alberto Manguel, essayiste, romancier, traducteur, homme du livre par excellence. Cet essai se compose de trois textes : "Comment Pinocchio apprit à lire", "La bibliothèque de Robinson" et "Vers une définition du lecteur idéal". Alberto Manguel ne cesse de s'interroger sur l'état actuel de la lecture, la lecture sur "papier" face à l'explosion irréversible de la lecture sur Internet. Je ne vais pas résumer un essai, mais j'aime butiner dans le livre et rebondir, parcourir et m'arrêter sur un paragraphe, celui-ci par exemple : "Comme un fleuve impossible, notre existence coule dans deux directions : de la masse infinie de noms, de lieux, d'êtres vivants, d'étoiles, de livres, de rituels, de souvenirs, d'illuminations et de pierres que nous appelons le monde, vers ce visage qui nous contemple chaque matin du fond d'un miroir ; et de ce visage, de ce corps qui entoure un centre que nous pouvons voir, de ce qui nous sommes, individuellement, associé à celui d'être les citoyens de l'inconcevable univers, collectivement, confère à notre vie ce que l'on pourrait appeler un sens - sens que les livres de nos bibliothèques ont transposé en mots". Alberto Manguel nous communique sa confiance dans le livre et la lecture face à la concurrence des "nouvelles technologies". J'apprécie sa ferveur de lecteur mais je ne partage pas toujours avec lui son optimisme idéaliste... Il écrit plus loin : "Je suis convaincu que nous continuerons à lire aussi longtemps que nous persisterons à nommer le monde qui nous entoure. Tant de choses ont été nommées, tant de choses continuerons de l'être, et en dépit de notre folie, nous ne renoncerons pas à ce petit miracle qui nous donne une étincelle de savoir. (...) Les livres nous offrent la possibilité de ces choses, la possibilité du changement, la possibilité de l'illumination." Il faut lire et écouter Alberto Manguel, car son livre nous apporte un bienfait certain...

jeudi 4 août 2011

"Bonjour, Anne".

Dès qu'un ouvrage de Pierrette Fleutiaux sort en librairie, je l'achète et le dispose dans ma bibliothèque. J'attends quelques semaines car je ne veux pas me précipiter, ni me ruer sur le livre. Je le conserve et je prends mon temps pour le savourer, le déguster, l'apprécier comme un amateur de vins et de chocolat... J'ai un souvenir de lectrice comblée avec son livre sur sa mère "Des phrases courtes, ma chérie" que je considère comme un chef d'oeuvre. Ce dernier opus de Pierrette Fleutiaux est une "chronique d'une amitié", celle de l'écrivaine avec Anne Philipe. Ce récit émouvant, d'une beauté subtile et secrète, se lit avec une reconnaissance sans fin. Il s'agit d'une biographie déguisée d'Anne Philipe, la discrète et attendrissante Anne Philipe, connue surtout du public par son mari célèbre et magnifique, le comédien de génie Gérard Philipe. La lectrice que je suis est entrée avec précaution et attention dans la vie de ce couple mythique des années 50, dans un parcours tellement exceptionnel et tragique aussi, avec la mort prématurée de Gérard Philipe. Pierrette Fleutiaux écrit aussi sur le tout début de sa propre vie d'écrivain. Découverte et encouragée par Anne Philipe, directrice de collection chez Julliard, Pierrette Fleutiaux raconte sa laborieuse vocation pour vivre de son écriture et sans l'aide amicale d'Anne Philipe, son destin d'écrivain ne se serait pas accompli. Anne Philipe est décrite comme une femme douée pour l'amitié, la littérature et la culture, la vie. Ce récit est constitué de fragments, de morceaux, d'éclats, de brisures, de souvenirs, d'images et de paroles d'Anne Philipe. J'ai retrouvé aussi dans le livre les amis d'Anne Philipe comme les peintres Vieira da Silva et Arpad Szenes, Roger Grenier, Georges Perros que j'apprécie tout particulièrement. Ces "affinités littéraires électives" entre Pierrette Fleutiaux et Anne Philipe sont dévoilées d'une façon pudique et respectueuse de la part de Pierrette Fleutiaux, sans aucun voyeurisme. Je comprends grâce à ce livre que j'aime cette littérature de la discrétion, de la simplicité, du courage d'être et de vivre malgré toutes les vicissitudes que la vie vous réserve. Je cite les premières lignes : "Bonjour, Anne. Il y a longtemps que nous ne nous sommes parlé. Pourtant vous êtes souvent dans mes pensées, très souvent depuis ces dernières années. Vous avez été la première femme parfaitement accomplie que j'ai rencontrée. Vous avez changé ma perception de la vie, grâce à vous des horizons que je croyais fermés se sont ouverts, vous m'avez fait un don prodigieux. C'était il y a trente-cinq ans. Maintenant que j'ai dépassé l'âge que vous aviez lors de notre première rencontre, j'ai besoin de vous retrouver". Cette chronique d'une amitié littéraire parle d'héritage culturel, de reconnaissance d'écrivain à écrivain, de gratitude (sentiment rare et précieux), d'écriture et de lectures. Si vous n'avez jamais lu Anne Philipe, précipitez-vous en librairie ou à la bibliothèque et lisez tout, surtout "Un été près de la mer", "Le regard de Vincent", "Le temps d'un soupir". Pour Pierrette Fleutiaux, éditée aux Editions Actes Sud, je suis sûre que vous avez tout lu d'elle...

mardi 2 août 2011

Ma bibliothèque, portrait, livres originaux, 2

Dans mon blog, j'ai déjà évoqué le nom de cet éditeur provençal, Robert Morel. Depuis quarante ans, je collectionne les livres, estampillés Robert Morel et j'en possède une petite trentaine. Les prix de ces drôles d'ouvrages ont bien augmenté. Quand j'en trouvais un par hasard chez un bouquiniste, son prix était abordable. Robert Morel n'a pas édité des grands écrivains, des textes classiques, des best-sellers, des policiers et autres catégories courantes de l'édition. Lui, il a eu l'idée de collections atypiques et originales. Je vais commencer par la collection "Célébration" d'un format carré 14cmx14cm, couverture toilée monochrome et d'une vingtaine de pages. Les titres de ma bibliothèque concernent les "Célébration de la Lettre", "Célébration du bois", "Célébration des grands-mères", "Célébration du vin". Dans la liste de la collection, on trouve aussi l'andouille, l'âne, les anges, l'asperge, le chat, le cimétière, l'eau, le fromage, le miel, l'oeuf, le pain, le silence, le rouge-gorge et bien d'autres encore... L'intérêt de ces petits livres carrés et originaux, loufoques et humoristiques, ne se prennant pas au sérieux, révèle un Robert Morel facétieux et exaltant les valeurs simples de la vie, les choses ordinaires, les aliments indispensables, les fleurs, les animaux de compagnie, la vie banale des choses. En furetant sur les sites internet des bouquinistes, je peux acquérir certains titres mais je préfère les dénicher dans les librairies d'occasion, chez des bouquinistes. La vente à distance me semble trop facile et ce que j'aime dans la constitution d'une collection, c'est qu'elle comporte l'effet de "chasse aux trésors"... En choisissant la difficulté de leur recherche, le goût des livres est plus prononcé et poivré. La chasse pour compléter ma collection peut se décliner à l'infini et j'aime cet espace-temps pour me les procurer et même si je n'en trouve plus comme avant, mes quatre titres suffisent à mon bonheur de bibliophile !

lundi 1 août 2011

Campagne de publicité

Dans le Monde, la lectrice attentive que j' essaie d'être, a remarqué une publicité concernant les librairies indépendantes. Dès que le milieu professionnel du livre se mobilise pour défendre la cause des libraires, je soutiens à cent pour cent cette forme de publicité. Le slogan de l'encart publicitaire est le suivant : "Des milliers de livres à ma disposition. Qui m'aidera à faire le bon choix si mon libraire n'est plus là ? Un petite phrase parachève le message : "Pour garder ces lieux de conseil et de rencontres, il suffit de continuer d'acheter vos livres chez votre libraire. Une vérité s'incrit en gras :"Les librairies sont vivantes. Elles le resteront avec vous." Belle phrase et conseil amical. Si, nous les lecteurs, nous désertons les petites librairies indépendantes, la menace de leur disparition se fait plus concrète. A Chambéry, une librairie va fermer à la rentrée... En centre ville, on ne rencontrera plus que des boutiques de vêtements, des banques, des restaurants, des pharmacies et des stands de restauration rapide... Les librairies qui ponctuaient le paysage et apportaient une note culturelle aux espaces commerciaux sont donc en danger. J'ai vécu moi-même la fermeture définitive de ma librairie en 1981 et bien que j'aurais souhaité la maintenir en vie, j'en garde pourtant un merveilleux souvenir de rencontres avec des fous de littérature, des militants basques, des féministes découvrant la solidarité et la sororité, des passionnés de poésie, des amateurs d'Histoire, des parents soucieux de la bonne qualité des livres pour les enfants, etc. Formulons un souhait durable : que nos librairies françaises soient soutenues par les municipalités comme des centres culturels et surtout par les lecteurs. Ces lieux magiques d'intelligence et de savoir, ces lieux de l'imaginaire humain doivent absolument survivre et il faut franchir le seuil de ces "boutiques" de livres pour fureter, fouiller, toucher, feuilleter nos chers bouquins et participer ainsi à leur développement !